Cela fait plus de 10 ans que nous entretenons une relation particulière avec Valentin Debise sur les circuits français ou internationaux. Il était donc naturel que nous lui ouvrions une fois de plus nos colonnes pour partager son aventure en Championnat de France FSBK, dans lequel l’Albigeois vise à nouveau le titre en Supersport 600 et en Superbike 1000, mais aussi lors des deux manches qu’il effectue cette année en Championnat du monde Supersport.
La première a eu lieu à Most, en République Tchèque, fin juillet, et s’est soldée par une 4e positon en FP1, une 5e en FP2, une 10e en qualification, une 4e lors de la course 1 et une 8e lors de la course 2 où, après un départ difficile, l’Albigeois a roulé très vite en s’octroyant même le record du tour jusqu’au dernier tour.
Vu de l’extérieur, il s’agit d’un bilan positif pour une première acclimatation en situation réelle avec la Yamaha R6 du GMT94 équipée de pneus Pirelli. Mais qu’en pense l’intéressé lui-même ?
Valentin Debise : « Si je devais tirer le
bilan, je dirais qu’il y a du positif mais que je suis un peu déçu
en même temps, parce que je pense que je n’ai pas optimisé mes
capacités. Notamment pendant la première course où je n’ai pas fait
de supers chronos quand j’étais deuxième. Après, à la deuxième
course, j’ai fait un mauvais choix dans le premier virage, ce qui
m’a fait perdre pas mal de positions avant de me faire bousculer et
de perdre ma vitesse. Ensuite, durant les trois premiers tours,
j’ai doublé à chaque fois un pilote par tour mais ça ne suffisait
pas : j’aurais dû en doubler plus que ça et aller plus vite.
J’aurais perdu un peu moins de temps, car après, une fois que je me
suis débarrassé du paquet, j’ai roulé plus vite que les leaders
pendant les sept derniers tours, sauf au dernier tour avant le
drapeau rouge où les deux premiers ont roulé plus vite que
moi.
D’un autre côté, je suis quand même satisfait parce que ce
n’est jamais évident de débarquer comme ça dans un championnat,
même si j’ai eu l’opportunité de rouler une journée à Carole avec
la moto. Ce n’est pas évident car il faut s’adapter aux pneus, à la
moto et au circuit alors qu’il y a très peu de tours et de séances
: deux séances libres, une petite qualif et c’est la course ! Ce
n’est donc pas évident et je pêchais pas mal au secteur trois, et
c’est seulement au warm up que j’y ai trouvé des solutions pour
faire de bons chronos. Finalement, par rapport à la course 1, mis à
part quelques petits détails dans un ou deux virages je n’avais pas
fait grand-chose mais c’est ça qui a fait la différence. »
Dans la course 1, tu as été un bon moment en deuxième
position avec un groupe de furieux à tes basques. On parle quand
même du championnat du monde Supersport : stress ou pas stress
?
« Je sais que j’ai la condition physique pour attaquer du
premier au dernier tour, donc je ne me suis pas économisé et j’ai
fait le maximum du début à la fin. Je pense que c’est pour ça que
j’ai réussi à rester devant. Après, l’avantage que j’ai aussi,
c’est que j’ai beaucoup travaillé sur le freinage depuis l’année
dernière, car les autres étaient un peu meilleurs que moi dans ce
domaine. J’ai beaucoup travaillé sur ce point là et, du coup, je
n’ai pas trouvé quelqu’un qui freinait plus tard que moi à Most.
Forcément, ça m’a beaucoup aidé d’autant que la moto du GMT 94 est
réglée pour freiner fort : la moto demande à ce qu’on freine fort
pour qu’elle tourne bien ! Du coup, ça me donne un petit avantage
par rapport aux autres, et dès qu’ils me passaient, je les
repassais directement. Avec les chronos que je faisais, je savais
que je n’étais pas capable de m’échapper, mais il fallait les
redoubler à chaque fois pour ne pas qu’eux puissent échapper. Dans
le secteur trois et le début du secteur quatre, Manzi me passait
à chaque fois car je n’arrivais pas bien ressortir du
virage, donc dans le dernier tour je l’ai passé au premier virage
et j’ai fermé la porte dans le deuxième pour qu’il reste derrière.
Je savais qu’il n’était pas en mesure de me doubler sur tout le
reste du circuit sauf dans le secteur trois. Je pensais donc être
deuxième, qu’il me passe dans le secteur trois et que je finisse
sur la troisième marche du podium si je n’arrivais pas à le
repasser dans le dernier virage. Troisième, j’étais content. Mais
il a décidé de me pousser, donc j’ai perdu ma vitesse et Odendaal
en a profité pour me passer. »
C’est donc cette quatrième place qui t’apporte un peu de
frustration…
« Oui et non. Je ne suis pas trop
frustré dans le sens où mon rythme n’était pas idéal. Bien sûr,
j’aurais bien aimé accrocher le podium pour dire que j’avais fait
un podium, mais on va dire que ce n’était pas 100 % mérité dans le
sens où les chronos n’étaient pas supers bons. J’ai fait un bon
chrono mais ensuite je n’ai pas réussi à être régulier. Quand je
suis passé devant le groupe, je roulais en 36,0 ou 35,9 au maximum,
alors qu’il aurait fallu que je sois deux ou trois dixièmes plus
vite, et là cela aurait été mérité. Donc déçu, oui et non.
»
Le carambolage du premier virage t’a surpris
?
« Non. L’année dernière, j’ai fait quatre courses à Most en
IDM, et quatre fois ça a tapé. En mondial Supersport, ça avait tapé
aussi et cette année encore : on a l’impression que dans cette
catégorie, les jeunes jouent leur vie au premier virage ! C’est
donc toujours un peu une loterie mais cette fois ça a tourné à mon
avantage lors de la première course. Dans la deuxième course, c’est
moi qui ai pris une mauvaise décision et ça a tourné à mon
désavantage. »
Au vu de ces deux courses à Most, tu te situes comment
dans le plateau ?
« Je pensais me situer entre cinq et huit, mais au final
je pense que j’ai les capacités d’être au minimum dans les trois
premiers, au vu des chronos que j’ai effectués en course. Après, il
faut que j’arrive à mettre tout bout à bout et que je me fasse un
peu plus confiance, mais je pense que j’ai le niveau pour être dans
les trois premiers. On le voit dans la deuxième course avec les
chronos que j’ai faits en étant seul. Après, c’est toujours délicat
de débarquer comme ça et je savais que j’allais progresser de
séance en séance, donc ce n’est pas évident mais il va falloir que
je me mette vite dans le bain la prochaine fois pour espérer faire
des meilleurs résultats dès la course 1. »
Le niveau que tu as montré à Most est également une
bonne nouvelle en ce qui concerne le niveau du championnat de
France FSBK…
« Il n’y a pas toujours une logique,
mais ce qui est sûr, c’est qu’en mondial le niveau est extrêmement
serré et il faut avoir des capacités d’adaptation élevées. Cela
explique par exemple pourquoi certains pilotes qui se battent
souvent ensemble en France seront plus distanciés en mondial. Cette
parenthèse fermée, c’est sûr que le niveau est très élevé en France
cette année. Je suis donc curieux de voir ce que Matthieu Gregorio
va faire à Magny-Cours, car je pense qu’il peut faire bien.
»
En quoi la Yamaha R6 du GMT 94 diffère de ta moto du
championnat de France, et t’y es-tu vite adapté ?
« La grosse différence, ce sont les pneus, Pirelli en
mondial, Michelin en FSBK. Leur philosophie n’est pas la même et du
coup, c’est toujours pareil : pour être à la limite de la limite,
il faut vraiment bien les connaître. J’arrive quand même à aller
vite mais pour être à l’extrême limite de tous les virages pendant
tous les tours de la course, c’est un peu plus délicat. Je pense
que c’est aussi pour cela que j’étais mieux dans la course 2. Et
puis, évidemment, le moteur change aussi beaucoup : il est plus
puissant et a des caractéristiques vraiment différentes. Mais c’est
comme tout, il faut s’y habituer. Ce qui change aussi par rapport à
l’année dernière, c’est la nouvelle réglementation qui concerne le
poids, et par rapport aux pilotes légers, j’ai la chance d’être
pile-poil au poids idéal. Donc ma moto, qui n’est pas lestée, est
plus légère qu’en championnat de France. Cela rééquilibre les
choses, et, alors que l’année dernière je me faisais doubler en
ligne droite, cette année ce n’était plus le cas : j’arrive
quasiment à y doubler tout le monde, sauf les MV Agusta, qui sont
très puissantes, et les Triumph. Ce sont les deux seules motos où
j’ai un peu de mal, alors qu’avec les Ducati et les autres Yamaha,
je ne suis pas mal. »
Crédit photos : GMT94