L’incident de course, au sens général, qui a opposé Jonathan Rea à Álvaro Baustita lors de la dernière course de la manche française du championnat du monde Superbike à Magny-Cours a déjà fait couler beaucoup d’encre.
Manœuvre scandaleuse du Nord-Irlandais pour certains, malheureux mais simple fait de course pour les autres, les passionnés se déchirent et, face au flegme britannique qui minimise l’incident, Ducati est monté au créneau avec véhémence pour fustiger à la fois le pilote Kawasaki et la clémence de la FIM à son égard.
Commedia dell’arte ?
Quoi qu’il en soit, afin d’y voir un peu plus clair, nous avons contacté Paul Duparc, un officiel de la FIM qui nous a confié l’éclairage suivant.
Paul Duparc : « La décision de pénaliser Jonathan Rea a été prise pendant la course par les Stewards. Ils ont analysé l’incident pendant la course avec différentes caméras et sous différents angles de vue. Ils ont pris une décision et c’est ce qu’on appelle une constatation de fait. Comme elle est prise dans l’urgence et qu’elle impacte de la course, elle n’est pas susceptible d’appel. Elle est prononcée, et qu’elle soit trop lourde ou trop légère, elle est prise : C’est comme un penalty au football, on ne revient pas en arrière.Comme Ducati s’est montré très virulent, puisque, pendant la course, ils sont rentrés par deux fois de façon incorrecte dans la Direction de course, les Stewards ont sorti Serafino Foti de la salle de Direction de Course. Après la course, ils se sont entretenus avec Serafino Foti et Marco Zambenedetti dont la colère n’était pas retombée. Les Stewards FIM, par acquis de conscience, ont quand même demandé à voir les données télémétriques des points de freinage et les angles de la moto de Jonathan Rea, et il s’avère que sur ce virage là, il a freiné exactement au même endroit et avec la même pression qu’aux tours précédents. D’après les techniciens en télémétrie qui ont également analysé les données, il n’a pas eu un comportement différent de d’habitude, et donc aucun comportement anormal.
Si Ducati s’emporte et fait des déclarations à la presse, il n’y a rien eu d’officiel et aucun appel n’a été déposé. Il y a seulement eu des coups de téléphone. De toute façon, il n’y a aucun appel recevable. Le Président de la FIM a interrogé les Stewards qui lui ont expliqué comment cela s’était passé. On a regardé toutes les données statistiques des pénalités prononcées depuis des années, et Jonathan Rea n’a jamais été pénalisé pour un comportement anti-sportif ou irresponsable. Il a eu des accrochages, mais cela a toujours été considéré comme des incidents de course, et c’est donc la première fois où une pénalité lui est infligée. Là, il a fait une faute et a été pénalisé. Après, vu de l’extérieur, on peut trouver la décision trop légère ou trop lourde mais il faut faire confiance aux Stewards qui ont accès à toutes les données.
Quant au comportement de Ducati, il est dans l’intention du Président de la FIM de leur écrire pour leur demander de rester gentleman et respectueux. »
Quand un représentant de Ducati déclare qu’ils ont fait
ou qu’ils vont faire appel, cela a-t-il un sens ?
« Devant les institutions FIM, il n’y a aucun
appel possible. Ils peuvent porter l’affaire en
justice mais ils n’ont aucune chance de gagner. Ils peuvent aller
devant la justice, au Tribunal Arbitral du Sport, mais le TAS ne
rentre pas sur ce qu’on appelle le « Field of Play ». Le
TAS va toujours juger en droit, c’est-à-dire relever s’il y a un
problème de procédure ou d’application des règles. Depuis un arrêt
qui date d’une dizaine d’années, jamais les juges professionnels du
TAS ne vont rentrer sur le champ des experts et laissent les
décisions sportives aux officiels. Ils ne vont pas analyser s’il y
a eu un comportement fautif ou pas, mais par contre ils se
prononceront s’il y a eu une mauvaise application du règlement. On
n’est pas du tout dans cette optique là. Ducati peut donc
faire un recours au TAS, mais ils vont le perdre, et ils ne peuvent
plus faire un appel devant les instances FIM. D’ailleurs,
peut-être ont-ils formé un recours au TAS, puisqu’ils avaient cinq
jours pour le faire, mais le TAS ne nous a pas informé de ça…
»