Jonathan Rea a eu le temps de bien analyser sa situation et celle de Kawasaki après deux meetings consommés dans cette saison de WSBK. Et les conclusions qu’il tire sont assez radicales. Pour résumé, il faut qu’au Japon on prenne conscience que la donne a changé, notamment sous l’impulsion de Ducati, et qu’il faut tout autant accélérer sa méthode de travail que la revoir. Cela ne vous rappelle rien ?
Jonathan Rea s’est livré à une sortie franche dans les colonnes du site officiel du WSBK qui devrait faire vibrer les murs de l’usine Kawasaki. Comme un appel à un passage à l’état d’urgence, il rappelle d’abord – et pour bien se faire comprendre – sa situation au championnat après les joutes de Phillip Island et de Mandalika : « je ne m’attendais à ce que ce soit facile, mais pas si difficile » commence-t-il avant d’ajouter : « après la catastrophe de Phillip Island, j’espérais que ce serait mieux à Mandalika, mais c’était la même merde. Physiquement je vais bien, mais mentalement c’est difficile en ce moment« .
Il précise : « Ducati a un package vraiment solide, même les motos de leurs clients se mélangent avec les cinq ou six meilleurs pilotes. Andrea Locatelli s’est également amélioré, tout comme mon coéquipier Alex Lowes. Donc le top 8 est vraiment rapide et si tu ne peux pas t’échapper avec Alvaro et Toprak devant, tu es coincé dans le peloton. Si vous avez des problèmes pour dépasser, vous ne progresserez de toute façon pas. C’était comme ça dans les deux premiers tours ».
A partir de là, il demande à Kawasaki d’autres armes pour se sortir de ce mauvais pas : « notre moto est très similaire depuis quelques années maintenant. Nous en tirons le maximum, mais nous avons besoin de plus », a déclaré Rea en direction de l’usine d’Akashi. Mais il ne veut pas encore de fâcher avec elle… « Kawasaki a été incroyablement bon avec moi et je ne peux pas me plaindre car ils continuent d’améliorer la moto. C’est une grande décision pour un constructeur comme Kawasaki de faire un ajustement à son homologation ».
Jonathan Rea : « je ne suis pas au courant de l’orientation future de Kawasaki et ils ne sont pas très réactifs par rapport à ce qui se passe en WorldSBK »
A partir de là, il entre dans le dur en disant ses quatre vérités : « nous en avons eu quelques évolutions, mais ils ne sont pas très réactifs par rapport à ce qui se passe en WorldSBK. Nous devons regarder vers l’avenir. Puccetti n’a pas beaucoup de composants identiques aux nôtres. Pour bénéficier d’une équipe privée, il faut avoir une moto avec les mêmes spécifications et le pilote doit être très bon. Vous avez alors trois ou quatre façons d’analyser. Yamaha a très bien fait avec l’équipe GRT et chez Ducati, les motos des équipes clientes sont les mêmes, à une exception près. C’est ce qu’il faut faire ».
Jonathan Rea, sixième du Championnat du monde, compte déjà 68 points de retard sur le leader du Championnat du monde Alvaro Bautista sur la Ducati. Et tandis que l’Espagnol semble être dans une ligue à part, le pilote Kawasaki subit une pression croissante pour seulement rester dans le top cinq. La Kawasaki ZX-10RR a connu quelques améliorations de détail pour 2023. Cependant, elles n’ont pas réduit le déficit de puissance.
Le constat fait et les revendications signalées, Jonathan Rea termine en s’inquiétant ouvertement pour l’avenir. « Je ne suis pas au courant de l’orientation future de Kawasaki. Nous leur donnons beaucoup d’informations et de données sur la piste et j’espère que nous verrons bientôt cela alimenter les modèles de production ». En juillet 2022, le désormais âgé de 36 ans avait convenu avec Kawasaki de poursuivre le contrat qui existait depuis 2015 jusqu’à fin 2024. On s’attend à ce qu’il y ait une toute nouvelle moto pour l’année prochaine.
Mais déjà, les 30 et 31 mars, il y aura deux jours de test à Barcelone qui devra rassurer l’Irlandais du Nord avant d’aller à Assen, pour une prochaine manche où il a déjà déclaré qu’il serait extrêmement déçu de se retrouver dans l’incapacité d’y jouer les premiers rôles. Cependant à bien écouter le sextuple titre du mondial Superbike, on semble entendre le refrain de la complainte du pilote officiel d’une marque japonaise déjà entonnée en MotoGP…