Álvaro Bautista va-t-il poursuivre sa marche triomphante, concrétisée jusqu’à présent par 6 victoires en 6 courses ? On s’attendait à une belle prestation de l’Espagnol de Talavera de la Reina en raison de ses qualités de pilotes, mais avec des espoirs tempérés par sa méconnaissance totale des Pirelli, par le fait qu’il avait utilisé des disques de frein en acier pour la dernière fois en 2009 (250 Aprilia du Mapfre Aspar Team), et surtout parce qu’il disposait d’une toute nouvelle machine avec sa Ducati Panigale dotée pour la première fois d’un V4 et dans sa saison inaugurale.
Le dernier obstacle, qui n’était pas le moindre, s’appelait Jonathan Rea, quadruple Champion du Monde successif sur ZX-10R, qui lui-même revenait de loin. Tout commença pour l’Irlandais du Nord en 2008 chez Ten Kate quand James Toseland (Champion du Monde WSBK en 2007 sur Honda pour le team néerlandais) prit le chemin des Grands Prix et fut remplacé par Carlos Checa et Ryuichi Kiyonari. Parallèlement, Rea roulait dans la même équipe en Supersport avec Andrew Pitt. Les cousins Gerrit et Ronald ten Kate changèrent de tactique en engageant dès la dernière course de l’année au Portugal en 2008 Jonathan Rea en catégorie Superbike, qui resta au sein de l’équipe batave jusqu’à la fin de la saison 2014 au Qatar. Johnny cacha la misère de la CBR avec brio, gagnant au moins une course chaque année, et terminant même troisième du Championnat du Monde en 2014 avec 4 victoires, ce qui lui valut d’être embauché par Kawasaki pour remplacer Loris Baz parti en MotoGP chez Forward Racing sur Yamaha (4e à Misano en 2015).
Michael van der Mark et Sylvain Guintoli succédèrent à Rea chez Honda en 2015, puis Nicky Hayden à la place du Français en 2016, puis Stefan Bradl en 2017, puis Jake Gagne et Leon Camier en 2018, sans le moindre succès depuis la dernière victoire de Jonathan Rea à Portimao le 6 juillet 2014.
Chez Kawasaki, Rea s’imposa royalement pendant quatre saisons consécutives. Allait-il continuer sur sa lancée en 2019 ? Lors des tests de Jerez de janvier dernier, Rea impressionnait en réalisant 1’39.160 en pneus course, soit 1.5 plus vite que son propre record du tour établi en 2017. Son coéquipier Leon Haslam se classait 4e à 0.350 et Toprak Razgatlioglu 6e à 0.790.
Peu après, à Portimao, Johnny Rea tentait sa chance dans le tout dernier quart d’heure sur un revêtement désormais sec et parvenait à réaliser un tour exceptionnel en 1’40.855 avec un pneu de qualification. Les écarts étaient alors énormes, avec Alex Lowes à 0.9, Álvaro Bautista à 1.0 et Leon Haslam à 1.2. Pour beaucoup la cause était entendue et avec un tel écart Rea ne semblait absolument pas menacé.
Puis Álvaro Bautista s’imposa devant le leader Kawasaki avec 14.983 d’avance dès la première course en Australie. En Thaïlande, l’Ibère remit le couvert en remportant la Course 1 avec 8.217, puis la troisième avec 10.053. On ne tiendra pas compte ici de la Course 2 qui ne se déroule que sur la distance réduite de 10 tours.
Pour certains, ce n’est pas la Ducati qui est la cause du triomphe, mais Bautista. Leur preuve : les 3 autres Ducati sont loin. Leur oubli : Chaz Davies revient de blessures et d’opérations à répétition, tandis que Michael Ruben Rinaldi a une bonne moto chez Barni Racing mais pas vraiment le niveau de pilotage de Bautista, et Eugene Laverty ne dispose peut-être pas chez Goeleven d’une moto idéalement préparée : ne déclarait-il pas récemment à Buriram « Pour la quatrième fois de ma carrière, je suis arrivé dans un virage sans freins et j’ai dû sauter à 200 km/h. Une fois dans la carrière d’un coureur, cela peut arriver. Deux fois, c’est rare. Trois fois, cela signifie que j’ai dû être un vrai bâtard dans une vie antérieure. Mais quatre fois !? »
On peut donc difficilement séparer les mérites à attribuer à Ducati et à Bautista. Carl Fogarty (4 fois Champion du Monde sur Ducati) expliquait que le manque de résultats de la Panigale V2 ne venait pas de la moto, mais des pilotes. On va avoir l’occasion de s’en rendre compte dès la prochaine course en Aragon, avec Chaz Davies désormais remis, sur son circuit favori. En 2013, Chaz y remportait les deux manches sur sa BMW officielle. Sur Ducati, il gagnait une manche en 2015, les deux en 2016, une en 2017 et une en 2018. Il détient les deux records du circuit, celui des essais en 1’49.319 et celui du tour en 1’50.421. Si donc Chaz doit gagner une course en ce début de saison, ça devrait être en Aragon.
Johnny Rea, également vainqueur à MotorLand l’an dernier, sera lui aussi dans de bonnes conditions : Aragon est le circuit habituel d’essais de son équipe Provec située à Granollers près de Barcelone. C’est là que le Kawasaki Racing Team effectue l’essentiel de ses tests de mise au point hivernaux.
L’avantage de Ducati sur Kawasaki sera donc réduit au minimum en Espagne, beaucoup plus qu’en Australie et en Thaïlande. Le résultat sera d’autant plus important que ce sera après cette troisième course du calendrier que le règlement sera modifié ou non pour équilibrer techniquement les forces en présence. Si Kawasaki ne réagit pas victorieusement, la suite de la saison peut s’annoncer difficile pour les Verts.
Essais secrets en Aragon pour Ducati
Face à la parfaite connaissance du terrain de Provec, Ducati ne pouvait que réagir et c’est pourquoi Bautista et Davies ont été tourner pendant deux jours en Aragon dans le secret le plus absolu. Toutes les équipes y avaient déjà roulé (publiquement) en mi-novembre dernier. Les résultats de ces deux journées de test confondus étaient :
1-Jonathan Rea (Kawasaki Racing Team WorldSBK) 1.49.668
2-Alex Lowes (Pata Yamaha Official WorldSBK Team) 1.51.157
3-Chaz Davies (Aruba.it Racing – Ducati) 1.51.180
4-Michael van der Mark (Pata Yamaha Official WorldSBK Team) 1.51.852
5-Leon Haslam (Kawasaki Racing Team – WorldSBK) 1.51.479
6-Michael Ruben Rinaldi (Barni Racing Team) 1.51.656
Alvaro Bautista n’était pas là, car il courait à Valence lors du dernier Grand Prix avec la GP17 de l’équipe Angel Nieto.
Selon nos collègues de Corsedimoto.com, Ducati vient peut-être de tester des moteurs avec le régime limité, puisqu’après Aragon ils peuvent être obligés de retirer 250, voire 500 tours/minutes à leur V4 qui a droit actuellement à 16 350 tr/min.
Les Ducati V4 officielles qui participent au BSB avec Josh Brookes et Scott Redding sont limitées à 16 000, et elles viennent de tourner à Portimao comme on peut le voir sur la vidéo ci-dessous, due à Aaron Kingswood que l’on remercie.
Vidéo : Alvaro Bautista contre Johnny Rea lors de la course de Buriram (Dorna TV)
😯 Relive the breathtaking battle in Buriram between @jonathanrea & @19bautista #THAWorldSBK🇹🇭 #WorldSBK pic.twitter.com/woj30Z4s3Y
— WorldSBK (@WorldSBK) March 22, 2019
Vidéo ci-dessous : Josh Brookes et Scott Redding (Panigale V4 BSB) à Portimao
We let @JoshBrookes and @Reddingpower get comfortable on the 2019 @PBM_Team Ducati V4R before making video stars of them at @AIAPortimao – video credit: @AaronKingswood pic.twitter.com/ibcX0ooky6
— PBM MCE Ducati (@PBM_Team) March 22, 2019
Photos : Ducati