La génération actuelle de moteurs V6 F1 turbocompressés de 1.6 litres est sans aucun doute le moteur à combustion interne le plus avancé jamais développé. Seuls quatre constructeurs ont sauté le pas et osé faire le lourd investissement nécessaire pour les créer et, bien que Honda se retire de la catégorie après 2021, le motoriste cherche déjà à transférer la technologie développée en compétition pour des véhicules de série.

Bien que l’on puisse imaginer que les véhicules automobiles en seraient les bénéficiaires, à bien des égards, les moteurs de motos sont soumis à des régimes de rotations élevés et à une puissance spécifique élevée similaires à celles de la F1, et au moins l’une des technologies clés de la dernière ère de la F1 est sur le point d’être transposée sur des motos de série dans un avenir proche.

La technologie en question est appelée allumage à préchambre et permet aux moteurs d’utiliser des mélanges plus pauvres et des taux de compression plus élevés, donnant plus de puissance tout en consommant moins de carburant.

 

 

Obtenir le bon mélange d’air et de carburant dans un moteur est l’un des plus grands défis pour maximiser les performances. En théorie, il existe un rapport stœchiométrique idéal entre l’air et le carburant (la combustion ne peut se produire que lorsque 1 g d’essence se trouve en présence de 14,7 g d’air), mais les moteurs fonctionnent généralement plus riches que cela à forte charge (c’est-à-dire avec plus de carburant) pour diminuer la température des cylindres et réduire le risque de cliquetis qui se produit lorsque le mélange dans la chambre de combustion s’auto-allume au lieu de brûler de manière contrôlée. L’explosion causée par le cliquetis peut aller jusqu’à faire un trou dans un piston dans le pire des cas.

 

 

La combustion en préchambre, telle qu’utilisée sur tous les moteurs de F1 actuels, est une solution qui permet à la bougie d’allumage d’allumer une très petite poche de mélange riche, avec plus de carburant, puis fait rentrer les jets de ce mélange brûlant dans la section principale de la chambre de combustion – remplie d’un mélange beaucoup plus pauvre – pour l’allumer sans provoquer de cliquetis. Le résultat est un moteur plus puissant, plus propre et plus économique (mais beaucoup plus technologique).

 

 

En F1, la question de la combustion en préchambre est compliquée par des règles qui permettent uniquement aux concepteurs d’utiliser un injecteur de carburant par cylindre, ce qui rend difficile d’avoir le mélange riche requis dans la préchambre et le mélange pauvre dans la chambre de combustion principale. N’ayant pas ce genre de contraintes sur une moto de série, Honda a conçu un système – révélé dans de nouvelles demandes de brevet – qui utilise deux injecteurs par cylindre.

Le premier injecteur est tout à fait conventionnel, envoyant du carburant dans l’air d’admission juste après le papillon d’admission d’air, de sorte qu’il pénètre dans le cylindre par la soupape d’admission, comme sur tout moteur de moto que l’on connait. L’astuce vient du fait qu’il y a aussi un deuxième injecteur installé dans une petite préchambre, au-dessus de la chambre de combustion principale. La bougie d’allumage émerge également dans la préchambre et un barillet rotatif entraîné par l’arbre à cames sépare sélectivement la préchambre de la chambre de combustion principale.

C’est là que la conception du moteur de moto breveté par Honda est très différente de la technologie F1. Le barillet rotatif est une sorte de tube dans lequel sont percés des trous soigneusement positionnés, de sorte qu’il effectue plusieurs opérations à différentes étapes du cycle du moteur lorsqu’il tourne.

 

 

La partie principale du barillet, qui forme effectivement la section centrale supérieure de la chambre de combustion principale, a un grand orifice sur un côté. Il est présenté à la chambre de combustion pendant les phases d’échappement et d’admission – permettant à la préchambre d’être débarrassée des gaz d’échappement et remplie de mélange frais (mais pauvre).

Pendant la phase de compression, le barillet tourne pour présenter une section fermée à la chambre de combustion principale, tandis qu’un petit trou près de l’injecteur de la préchambre s’ouvre pour introduire un jet de carburant supplémentaire dans celle-ci.

Au moment de l’allumage, le grand orifice se situe en haut du barillet et un ensemble de petits orifices s’aligne avec le haut de la chambre de combustion principale. Lorsque la bougie d’allumage déclenche une étincelle, elle enflamme le mélange riche dans la préchambre, et ce mélange enflammé et en expansion jaillit en jets à travers les petits orifices – se répandant à travers le mélange pauvre à l’intérieur de la chambre de combustion principale pour l’allumer de manière contrôlée. On appelle cela un allumage par torches.

 

 

Alors que la F1 a récemment concentré son développement sur la combustion de préchambre, la réflexion de Honda avec la même pensée remonte beaucoup plus loin. En effet, Soichiro Honda avait lui-même supervisé le développement du système « CVCC » (Combustion Contrôlée par Vortex Composé) de la société Nippone au début des années 1970. Ce système équipait les Honda Civic dans les années 1970. Bien qu’il utilisait un carburateur au lieu de l’injection, le CVCC comportait une préchambre, où la bougie était installée, et une seconde petite soupape d’admission qui permettait un mélange plus riche dans la préchambre que le mélange qui pénétrait dans la chambre de combustion principale.

Ce système a permis à Honda de respecter les limites d’émissions américaines de 1975 sans utiliser de catalyseur à l’échappement, coûteux, lourds et réducteurs de puissance, alors que tous ses concurrents ont dû l’adopter.

Bien que la nouvelle demande de brevet de la société n’indique pas spécifiquement à quelles motos elle pourrait être destinée, les illustrations montrent clairement les contours de la FireBlade, ce qui suggère que ce système devrait être réservé à des machines de type Superbike.