PAS DE CLEMENCE POUR QUI N’A PAS TROUVE LES CLES DU MANS.
Le GP de France a vu une nette domination de l’usine Yamaha avec la victoire de Lorenzo et la deuxième place de Rossi, le premier podium de la saison pour Suzuki et Vinales, la perte de la tête championnat pour Marquez et Honda et une nouvelle déception pour l’usine Ducati.
Sur le plan pneumatique, Michelin a réagi , après les critiques visant le pneu arrière de Jerez, en portant plus tôt que prévu des modifications en vue d’améliorer sa motricité .
Une carcasse soft moins rigide a donné cette fois satisfaction à la majorité des pilotes, à tel point que Lorenzo a enregistré un temps record en qualifications.
Mais ce sont toutefois les nombreuses chutes de l’avant émaillant la course qui ont alimenté les conversations.
A Jerez, la faible motricité du modèle de pneu arrière proposé a fait baisser le rythme de la course qui s’est révélée être plus lente de 31 secondes par rapport à l’an passé.
Il y a eu très peu de chutes (une seule en course) en comparaison de la course au Bugatti qui a été beaucoup plus rapide : 7 secondes de plus qu’en 2015 avec pourtant un équipement électronique de moindre niveau, mais 9 chutes en course.
Le tracé du Mans étant typé « stop and go », il alterne accélérations et freinages rapprochés, ce qui ne facilite pas le refroidissement du pneumatique avant.
La monte arrière plus performante passant plus de puissance au sol a en outre augmenté l’intensité des freinages et le rythme a été de bon niveau, faisant déclarer aux pilotes que le point faible de Michelin se situait cette fois au niveau du pneu avant.
L’image de la chute synchronisée de Marquez et Dovizioso en est l’illustration, tandis que les coureurs s’accordaient a dire que cette enveloppe est performante mais que son comportement n’est pas stable, imprévisible.
Pour autant, il est marquant que les premières chutes soient survenues quasiment au même moment, celui qui marque la fin de la prudence suivant le départ et la mise en chauffe des gommes avec le plein. Iannone, Marquez, Dovizioso, ont chuté également en tentant d’augmenter leur rythme hors de leur zone de confort.
Bradley Smith émet une hypothèse qui pourrait expliquer le coté
erratique du pneu avant français: l’air se dilate en rapport avec
la température et celui qui est compris dans les gommes des MotoGP
ne fait pas exception a la règle.
Quand un pilote tente d’exploiter le potentiel du pneu arrière,
l’avant le permet dans un premier temps puis il est le premier à
surchauffer.
Le pneu étant déjà très rigide, et l’air participant a la rigidité
de la gomme, cette chauffe accroît la pression a l’intérieur de
l’enveloppe qui perd en surface de contact au sol et de sa capacité
à absorber les inégalités de la piste.
Les bosses présentes sur le tracé deviennent donc des pièges, et il
est risqué de sortir d’une trajectoire « propre ».
Cette remarque au moment où les capteurs de pression vont devenir obligatoires dès le Mugello et où l’allocation des pneus avant est en baisse (le « 36 » à carcasse plus tendre n’est plus disponible au grand dam de Dovizioso et…de Smith) sonne comme une demande faite à Michelin pour abaisser les pressions de service de ses enveloppes.
Mais si on observe attentivement, les Bridgestone souffraient aussi de la configuration du Bugatti, puisqu’en 2015, il n’y a eu que deux chutes de moins qu’avec les Michelin cette année, dans des conditions comparables.
MUGELLO
Le tracé du Mugello peut faire peur : les vitesses atteintes sont parmi les plus importantes de la saison, ce qui met a l’épreuve la bande centrale du pneu arrière, et il y a un enchaînement de courbes rapides ( Casanova-Savelli,et Arrabbiata 1 et 2 ) effectué sur un tracé a très bon grip, abrasif, qui va cette fois maltraiter les flancs (en particulier droits : il y a neuf virages à droite et six à gauche ) des gommes.
Ces courbes rapides qui useront le boudin arrière sont complétées par des enchaînements plus lents qui concerneront le pneu avant au même titre qu’un énorme freinage a haute vitesse en bout de ligne droite, où les MotoGP passeront de quasi 360 km/h à 120 km/h en 325 mètres, encaissant 1,6 G sur une durée de plus de 6 secondes !
Mais, bonne nouvelle pour le pneu avant, les courbes « lentes » sont plus fluides qu’au Mans et la durée de freinage sur un tour n’est que de 19% (contre 28% pour le Mans).
A priori, malgré son coté effrayant, ce tracé sera moins exigeant pour l’extrémité avant, nous faisant ainsi espérer moins de chutes qu’au Mans!
Les pilotes Yamaha sont les plus capés sur le Mugello et Lorenzo sera bien placé pour la victoire; reste a savoir a quel niveau se placera Rossi…
Le tracé moins heurté qu’au Bugatti peut laisser espérer un podium à Marquez, mais a domicile, avec une puissance moteur inégalée et moins de difficultés avec l’avant, les Ducati peuvent avoir une grosse carte à jouer…
REPONSE AUX INTERNAUTES
Enfin pour clore cet article, voici quelques réponses aux interventions suscitées par l’article précédent au sujet de l’électronique.
Willy Le Borgne
Vous dites « il est toujours possible de régler la moto virage
par virage en ce qui concerne la puissance et le couple délivrés
par le moteur. Comment fait on sans géolocalisation ? »
La localisation des MotoGP s’effectue par transpondeurs; utilisés depuis longtemps pour enregistrer les temps tours par tours, il s’agit d’éléments noyés dans le bitume émettant une boucle électromagnétique qui une fois traversée par la moto est captée et arrête le chrono du tour en cours, et démarre celui du tour qui commence.
Par la suite, ce signal a été utilisé pour le « reset » électronique de la machine qui peut ainsi « savoir » sur quelle partie du circuit elle se trouve. Complémentée par le tachymètre qui mesure les vitesses et la distance parcourue, l’électronique peut dérouler ses réglages programmés, la marge d’erreur liée aux différences de trajectoires étant relativement faible.
Les problèmes commencent en cas de sortie ou pire si le transpondeur de reset n’est pas capté…
Comme le dit Eric Draven, c’est arrivé à plusieurs reprises, à Lorenzo en 2013 en essais ou, plus souvent, à Cal Crutchlow qui est un peu le spécialiste de ce genre de Bugs ! (cette année sur Honda et au Qatar sur Ducati où il a fini (6 ème!) à 60km/h dans la ligne droite, sa moto se croyant dans la pit lane…