Romano Albesiano, le responsable technique d’Aprilia en MotoGP vient de l’annoncer : le tout nouveau moteur de la firme de Noale qui s’alignera en 2020, un V4 à 90°, possédera un volant-moteur extérieur.
Pourquoi, et surtout où en est la concurrence, voici les points que nous vous proposons d’aborder dans cet article.
Le volant-moteur est une masse métallique qui tourne en même temps que le vilebrequin. Grâce à son inertie, sa fonction est d’amortir les petites mais non-négligeables variations du régime du moteur dues aux explosions dans les chambres de combustion, un phénomène encore accentué depuis l’adoption du calage big-bang par tous les constructeurs de V4 en MotoGP.
Aujourd’hui, malgré l’électronique, c’est devenu un domaine très sensible afin d’avoir la meilleure adhérence possible, que ce soit à la remise des gaz à l’accélération, ou en frein-moteur à la décélération. Trop léger, le volant-moteur rend le moteur trop brutal, avec toutes les pertes d’adhérence qui s’ensuivent. Trop lourd, ce dernier devient pataud et pas assez vif.
Il devient donc extrêmement important de ne pas se tromper sur le choix de cette masse additionnelle, et c’est pourtant ce qu’ont fait Yamaha en 2017 et Suzuki en 2018, l’un en adoptant un volant-moteur trop léger, l’autre trop lourd, sans pouvoir réagir durant toute la saison puisque les moteurs sont scellés pour une année complète.
Pendant ce temps-là, on rigolait bien chez les constructeurs de V4, et en particulier chez Ducati où la quasi nécessité d’externaliser le volant-moteur avait été mis en application depuis bien longtemps, comme en témoigne par exemple cette photo de la GP12 de Valentino Rossi (avant 2012, le volant-moteur, plus petit, était caché derrière une protection, d’abord en acier puis en carbone).
Non seulement cela permet, en cas d’erreur, de rectifier le tir en cours de saison, mais surtout de changer cette masse en fonction des besoins propres à chaque tracé. On comprend aisément l’avantage d’un tel système…
Aujourd’hui, chez Ducati, on utilise toujours bien évidemment un volant-moteur externe, tout comme Aprilia s’apprête donc à le faire.
Chez Honda, également en V4, aucune information n’a été diffusée et aucune photo ne permet de réellement prouver qu’un tel système est utilisé. Pourtant, selon nos sources, c’est bien le cas, le volant-moteur n’étant cette fois pas visible puisque monté derrière l’alternateur. Cela ne l’empêche pas d’être amovible sans briser les scellés, et donc de pouvoir monter une masse différente selon les besoins de chaque tracé.
Reste le cas KTM où nous ne disposons d’aucune information, mais où il serait étonnant que Mattighofen ne suive pas cette tendance déjà bien affirmée…
Bon, tout cela est bien joli mais est-ce à dire que Yamaha et Suzuki sont condamnés ad vitam æternam à souffrir d’un handicap face aux V4 ?
Quelques bribes de conversation entendues dans le paddock nous laissent penser que non : Yamaha en particulier serait en train d’étudier un tel système, malgré le fait que cela est beaucoup moins facile à implanter sur un 4 cylindres en ligne.
Bien sûr, en théorie, on pourrait monter le volant-moteur en bout de vilebrequin, mais cela n’est recommandé ni pour les efforts sur ce dernier, ni pour le comportement dynamique de la M1, ni même pour la largeur hors tout de l’assemblage qui pourrait alors compromettre la prise d’angle maximale.
L’idéal serait donc de mettre cette masse en rotation dans l’axe de la moto, tout en restant démontable sans briser les scellés qui relient carters-moteur, culasse, etc.
Or, justement, il reste une telle place disponible sur le propulseur d’Iwata : derrière les cylindres, sous les corps d’injection, avec le générateur. Pour cela, le volant-moteur, qui n’a pas besoin d’être aussi gros que pour un V4, serait donc entraîné par la chaîne cinématique suivante : vilebrequin / arbre intermédiaire servant également d’arbre d’équilibrage et au démarrage du moteur / couronne d’embrayage / générateur et donc volant-moteur.
Là, bien à l’abri des regards mais en toute conformité avec le règlement, le volant-moteur que l’on pourrait changer en fonction des circuits remplirait parfaitement son rôle et permettrait ainsi de réduire à néant un des deux handicaps qu’ont connu les quatre cylindres en ligne ces trois dernières années (l’autre étant la puissance maximum).
Inutile de vous dire que nous ne sommes pas prêts de vérifier cette possibilité à l’aide de photos !
Par contre, un homme averti en valant deux, il sera extrêmement intéressant d’observer les Yamaha et d’écouter les déclarations des hommes aux trois diapasons durant cette saison…