Ducati a travaillé dur pour sa saison 2022, le moteur desmodromique ayant gagné en puissance, comme l’a annoncé Gigi Dall’Igna, tout en conservant l’agrément de pilotage de leur ancien moteur, mais les ingénieurs de Bologne ont également travaillé sur les entrées en courbe, mais aussi l’aérodynamisme. Mais jusqu’à présent, Ducati a connu une année 2022 compliquée. Ce qui est réellement arrivé à Ducati au Qatar a d’abord semblé être un mystère, beaucoup de spéculations ont émané autour du fait que la GP22 n’était visiblement pas au niveau des attentes des ingénieurs de Borgo Panigale. Alors qu’ils cherchaient à comprendre leur GP22, au fil des courses, les résultats sont présents, mais même si beaucoup pensent que Ducati a la meilleure moto sur la grille, est-ce que 11 manches du Championnat du Monde ont été trop longues pour comprendre le missile de Bologne ?
Ducati a commencé la saison 2022 avec plus d’inquiétude qu’ils avaient terminé la saison 2021. Après que les équipes techniques aient travaillé tout l’hiver pour faire évoluer la GP21, les pilotes ont découvert la GP22 sur la piste lors du test de Sepang. A ce moment-là, les équipes de l’usine de Borgo Panigale ont constaté que certaines des pièces qu’ils avaient précédemment essayées avec leur GP21 à la fin de la saison dernière ne fonctionnaient pas comme ils le souhaitaient.
Cette saison, Ducati a des problèmes de moteurs, pas de puissance mais de choix : fidèle à leur réputation, les équipes techniques de Bologne ont trouvé encore plus de puissance pour le moteur 2022, mais gérer cette puissance et pouvoir l’utiliser sur une course d’une durée de 40 minutes est quelque chose de plus facile à dire qu’à faire.
L’une de ces pièces était le nouvel échappement – surnommé Didjeridoo par Jack Miller – qui n’était pas passé inaperçu lors des tests de Jerez, et qui n’est pas sans nous rappeler celui que Yamaha avait testé en 2020 à Misano. Honda avait également testé cette solution en 2017. Après l’avoir essayé, tous ont constaté que cela rendait le moteur déjà endémique de la Ducati un peu plus difficile à contrôler et donc, tous les pilotes l’ont abandonné et sont revenus à l’échappement inférieur plus court pour débuter la saison. Celui-ci ne semble pas apporter les améliorations escomptées pour l’instant.
Mais le plus important était que les pilotes d’usine Ducati, Pecco Bagnaia et Jack Miller, sont revenus à un moteur légèrement plus ancien au lieu de la dernière spécification de moteur 2022 que Jorge Martin et Johann Zarco ont continué à utiliser.
Pour 2022, l’une des plus grandes améliorations apportées par Ducati sur leur moto était aérodynamique. Tout au long de 2021, ils ont eu du mal avec l’agilité de l’entrée en virage sur leur prototype. Les ailerons de la version 2021, que l’on observe ci-dessus, étaient très grands et créaient une énorme force d’appui mais aussi, en raison de leur forme, la Ducati rencontrait des difficultés en entrée de courbe, et c’est ce sur quoi ils se sont concentrés pour tenter d’apporter des améliorations pour 2022.
Voici les ailerons de la version 2022 : la partie supérieure est légèrement plus petite que la version 2021, mais toujours très grande dans l’ensemble. Néanmoins, le changement clé concernait l’aileron inférieur du ponton. Sa moitié inférieure s’incline vers l’intérieur pour se connecter au carénage, par rapport à l’aileron de ponton 2021 qui descendait tout droit puis subissait un angle droit pour se connecter au carénage.
Il semblerait que c’est ce changement qui a aidé Ducati dans les entrées de virages, permettant au missile rouge de réaliser une transition plus douce de l’appui complet lorsque la moto est en ligne droite à une perte effective de cet appui lorsqu’elle passe à un angle d’inclinaison élevé.
Pour 2022, Ducati a été une fois de plus la marque à apporter de nombreuses innovations, notamment grâce au sorcier Luigi Dall’Igna. Car effectivement, lors du test officiel à Sepang, Ducati a dévoilé à ses concurrents que ses équipes techniques avaient trouvé une nouvelle façon de repousser les limites de la dynamique des véhicules. Déjà par le passé, les équipes de Borgo Panigale étaient les premières à introduire les ailerons, le becquet de bras oscillant arrière, le Holeshot Device et Ride Height Device à l’arrière. La question pour cette nouvelle saison était donc de savoir ce que Gigi Dall’Igna et son équipe d’ingénieurs avaient imaginé cette fois-ci.
L’an passé est apparu sur toutes les machines le Ride Height Device, un correcteur d’assiette qui a le même rôle que les ailerons : il réduit physiquement les wheelings, de sorte que l’anti-wheeling géré par l’ECU n’a pas besoin d’entrer en fonction. Et c’est là que c’est utile, car lorsqu’il le fait, il diminue le couple disponible à la roue arrière, ce qui nuit à l’accélération.
La réponse à cela se situe aussi à l’avant de la GP22, et non seulement à l’arrière. Ducati a installé un nouveau Holeshot Device à l’avant de la Desmosedici, qui semble se doubler d’un dispositif Ride Height Device avant. Là où l’ancien et simple Holeshot Device se composait d’un simple loquet et n’était utilisable que lors de la phase de départ, le nouveau système est beaucoup plus sophistiqué et est utilisé dans les phases d’entrée en courbe, mais également lors de la sortie de courbe.
Nous avons remarqué très tôt que leur configuration à double levier, disposé sur le té de fourche supérieur, avait changé sur les machines d’usine. On observe ici la configuration 2021, qui impliquait deux leviers identiques : un pour le Holeshot Device avant et un pour le Holeshot Device arrière. Cela a donc changé pour 2022, mais il faut surtout comprendre pourquoi ils ont réalisé cette modification ou si cela permettait simplement de rendre le levier plus facile à utiliser.
Voici donc la version 2022, avec la modification réalisée pour 2022. En y regardant de plus près, il reste bien un levier, mais le second s’est transformé en une petite manette qui se situe juste devant le té de fourche supérieur.
Il s’avère que c’est plus qu’un simple changement du levier lui-même et que c’était en fait le premier aperçu du nouveau système complet de Ride Height Device avant que les Italiens ont développé.
Et voici donc ce fameux système de Ride Height Device avant, visible sur la photo ci-dessus. Le vérin hydraulique se trouve devant le tube de fourche droit et possède une tige qui s’étend jusqu’au bas de la fourche, endroit où est fixé. Les pilotes Ducati l’ont tous testé lors des tests de pré-saison à Sepang, et nous avons notamment à quel point cela permettait à Michele Pirro d’abaisser l’avant en sortant du virage.
Pour cela, le pilote active le système en entrant dans le virage, puis lorsque la fourche est comprimée au milieu du virage, cela l’empêche de se détendre à la sortie de celui-ci. Ce faisant, ce dispositif abaisse le centre de gravité de la moto, ce qui contribue à réduire le wheeling. Mais alors que tous les pilotes Ducati l’ont essayé, seul Johann Zarco a choisi de l’utiliser tout au long de la saison, les autres pilotes déclarant qu’ils n’aimaient pas la sensation que cela procurait lorsqu’ils arrivaient dans le virage suivant et que l’avant était vraiment bas lors de la phase de freinage. Tous les pilotes disposant d’une GP22 sont équipés de ce système, mais seul le pilote tricolore l’utilise.
À titre de comparaison, voici la configuration de la GP21. On peut constater que le cylindre et la tige qui en dépassent ne sont pas présents sur le prototype 2021 et qu’à la place, le Holeshot Device se situe au niveau du bas du tube de fourche.
Au Test Officiel à Barcelone, Ducati a présenté un premier aperçu d’une évolution aérodynamique pour sa GP22. Les ailerons eux-mêmes n’avaient pas changé, c’était en fait le carénage avant lui-même qui avait été remanié : il était légèrement plus grand et un peu plus imposant. Il semblerait que cela permette au pilote de lui faciliter la tâche pour fendre l’air.
Mais ce n’est pas tout : nous avons eu un aperçu de 2023 lors de ce test catalan. Johann Zarco a testé ce châssis et c’est vraiment intéressant : il a de grandes zones de matériau découpées dans le cadre autour du pivot du bras oscillant. C’est une solution assez radicale et Johann Zarco est resté assez discret sur l’objectif de Ducati quant à ces modifications, mais il a tout de même révélé qu’il s’agissait d’un élément de développement pour le prototype de 2023.
Mais même si Ducati travaille déjà pour 2023, nous ne sommes qu’à la mi-saison et les équipes techniques ont encore beaucoup de travail à réaliser en 2022. Leur moto est incroyable et beaucoup pensent que c’est la moto de référence sur la grille, mais la saison n’a pas été aussi facile pour eux que ce qu’ils espéraient.
Les difficultés de début de saison ont été causées par leur dilemme concernant le choix des spécifications techniques du moteur pour l’année, puis il leur a fallu quelques courses pour que les pilotes soient vraiment à l’aise. En plus de cela, nous avons encore vu quelques erreurs inhabituelles de la part de Pecco Bagnaia, qui accuse déjà 66 points de retard à la pause estivale sur le leader du Championnat du Monde, cela laisse peu de marge à l’erreur, même si mathématiquement, tout reste possible !
Photos : Dorna Sports