Les pneus d’un véhicule sont un pilier important en termes de performances : ce sont en fait ceux qui le relient au sol. Le pneu est le dernier, mais pas le seul, composant qui transmet le couple et la puissance sur l’asphalte. Une célèbre marque de pneus en a fait son slogan : « Sans Maitrise, la Puissance n’est rien », et pour cela, les pneus nécessitent une étude extrêmement approfondie. MegaRide, un spin-off de l’Université Federico II de Naples, s’occupe depuis sa création de la manière d’extraire le maximum d’adhérence et de performances possibles des différents pneumatiques.
Lors des tests de pré-saison de Formule 1 à Bahreïn, certains techniciens responsables des pneumatiques ont utilisé un étrange outil en forme de pistolet sur les pneus, juste avant que les voitures n’entrent en piste. Il s’agit du tout nouvel instrument appelé VESevo. C’est un « pistolet » qui permet d’effectuer un contrôle non destructif sur les pneus et de révéler ses moindres secrets. Etant également développé pour étudier les pneus des MotoGP, il pourrait arriver rapidement dans le paddock.
Tout d’abord, nous devons nous demander pourquoi le besoin d’avoir un tel outil se fait sentir. En dynamique des véhicules, la connaissance de la viscoélasticité des composés est fondamentale pour modéliser la mécanique du contact pneu-asphalte. Cela permet d’évaluer et de prédire le coefficient de friction pour comprendre les performances du véhicule, également en termes de sécurité. Par conséquent, il offre la possibilité d’obtenir plus d’informations, et en même temps de les avoir plus détaillées.
Le comportement du pneu
Un matériau viscoélastique a un comportement intermédiaire entre un matériau purement élastique, qui respecte la loi de Hooke, et un matériau purement visqueux qui respecte la loi de Newton sur la viscosité. Cela signifie que le matériau soumis à une contrainte se déformera en fonction à la fois du temps et de la température. La réponse du matériel sera retardée, déphasée par rapport à la sollicitation. La relation d’analyse de réponse, qui exprime la résistance à la déformation, est un module complexe constitué de la somme de deux facteurs.
La partie réelle, connue sous le nom de module de stockage, est une mesure de l’élasticité du matériau. Elle est liée à la capacité de stocker de l’énergie lors d’un stress. La partie imaginaire, quant à elle, prend le nom de module de perte et est liée à la capacité du composé à dissiper de l’énergie sous forme de chaleur. La relation entre ces quantités est appelée facteur de perte. C’est grâce à ce dernier qu’il est possible d’analyser les applications dynamiques du véhicule. On peut prévoir, comme on l’a dit précédemment, l’adhérence, mais aussi l’usure du pneu.
Les propriétés viscoélastiques sont généralement déterminées par analyse mécanique dynamique (DMA), une technique qui nécessite une instrumentation de laboratoire assez coûteuse et complexe. De plus, les échantillons à tester avec le DMA doivent avoir des dimensions et des caractéristiques précises, et surtout elles doivent être obtenues à partir du pneumatique, le détruisant et lui faisant perdre sa fonctionnalité. Ainsi, il n’est pas possible de faire des tests sur des pneus qui devront ensuite être montés sur une moto pour l’envoyer en piste.
Exemple : Comparaison de 3 gommes
Il faut tout d’abord définir l’indice préliminaire de comportement viscoélastique : il représente la variation de l’énergie cinétique avant et après le premier contact entre la tige à l’intérieur du VESevo et la bande de roulement, dans une certaine plage de température. L’énergie cinétique est l’énergie que possède un corps en mouvement et est proportionnelle au carré de la vitesse.
Megaride explique que cet indice a été choisi pour cette analyse préliminaire pour sa cohérence physique avec le concept intrinsèque de dissipation due à la viscoélasticité et pour sa bonne adaptation aux courbes de référence disponibles du facteur de perte.
Dans le diagramme ci-dessus, on observe les données relatives à l’indice viscoélastique de trois gommes de référence de trois pneumatiques (A, B et C) en fonction de la température, ainsi que leurs courbes d’ajustement. Les tendances montrent une bonne corrélation avec celles du facteur de perte, qui sont normalisées pour le secret industriel dans le second graphique.
On observe un pic de correspondance avec la température de transition vitreuse à laquelle se produit la perte d’énergie maximale : d’une part, le pneumatique C apparaît caractérisé par un pic de facteur de perte plus élevé que l’autre ; en revanche, le pneumatique B semble présenter la température de transition vitreuse la plus basse, la courbe étant décalée vers la gauche par rapport aux deux autres. La température de transition vitreuse représente la température en dessous de laquelle il y a un comportement vitreux, c’est-à-dire que les mouvements des molécules sont « gelés », limitant tout à de simples vibrations des atomes isolés, mais rien de plus.
Dans la seconde partie de ce dossier, nous verrons comment le pistolet VESevo permet de caractériser la viscoélasticité de la bande de roulement du pneumatique.