Nous allons aujourd’hui vous conter l’une des grandes
histoires de l’ingénierie motocycliste à la française :
l’aventure Pernod. Une histoire à vivre lors de la Sunday Ride
Classic les 11 et 12 juin prochain sur le Paul Ricard.
Fin des années 1970. Jean Bidalot, ingénieur motoriste, marche
particulièrement bien en Grand Prix grâce à ses Motobécane.
Sponsorisée par Ricard puis Pernod (la fameuse distillerie),
l’équipe française tient le bon bout. L’implication de Pernod
semble grandir, jusqu’à ce fameux weekend du Mans, dernière manche
de la saison.
Le fougueux Guy Bertin s’impose en 125cc, triomphant à domicile sur
une machine de l’hexagone. C’est la consécration ; immédiatement,
Pernod revoit son engagement. La firme désire désormais une machine
de course entièrement française, capable de jouer la victoire en
250cc. Dans un pays où le sport moto n’est pas une priorité, le
pari semble osé. Bidalot, pierre angulaire du projet Motobécane,
est recruté pour dessiner l’arme future.
Tel un sorcier, Jean tire les plans de la monture dans son
sous-sol, approchant tous les sous-traitants tant bien que mal.
L’objectif reste le début de saison 1981. Il opte pour un
bicylindre 2-temps refroidi par eau avec admission par
distributeurs rotatifs. Les importants moyens déployés n’en font
pas une moto révolutionnaire pour autant, tout en restant à la
pointe.
Lors de la présentation, le PDG de Pernod, Bernard Cambournac, est
sûr de lui : « La Pernod de Grand Prix… de très grand prix
» dit-il, confiant. Lors des premiers essais à Carole début 1981,
Thierry Espié, pilote désigné, ne peut cacher sa joie. « La
partie cycle réclame un peu de mise au point mais le moteur est
fabuleux ». La moto, vendue comme « française », est en
réalité européenne. Bidalot est allé se fournir chez les italiens
de Dell’Orto pour les carburateurs (des Mikuni seront aussi
utilisés), Marzocchi pour les suspensions et Zanzani pour les
freins, en Allemagne pour l’allumage ainsi qu’en Espagne pour les
jantes siglées Beymag.
La haute technologie est au rendez-vous : Le cadre et l’échappement
sont réalisés par un fournisseur de l’équipe Formule 1 de Renault.
Le rendez-vous est donné au Grand Prix des Pays-Bas. Espié, lors de
la première séance d’essai, n’est qu’à une seconde des ténors. La
machine est bien née.
Au fil des manches, la progression est nette, ravissant toute
l’équipe. Cependant, le sort n’épargne pas les plus valeureux. À
Silverstone, Espié subit une lourde chute, et doit être remplacé ;
Christian Estrosi est appelé. Ce dernier fait bonne figure, malgré
quelques mésententes et coups de sang. À la fin de l’année, la
Pernod tient tête aux meilleures, sans jamais s’imposer toutefois.
Cinq concepteurs de talent ont réussi, en deux ans, à réaliser ce
que peu arrivent en cinq. Le succès n’était pas loin …
Le début de saison 1982 est compliqué. Estrosi est associé à Espié,
et les deux machines peinent à se hisser au niveau des japonaises.
Des broutilles et autres défaillances mineures se répercutent sur
la performance mais n’altèrent pas le moral des troupes. La fin de
saison est toute aussi frustrante. Meilleur pilote Pernod,
Christian Estrosi, pointe en 11e place. Pourtant, le paddock sait
que ces machines peuvent jouer devant à chaque course. 1983 devrait
être la bonne.
Avant même la manche d’ouverture, les choses changent. Espié est
viré, tandis que Bidalot retourne partiellement chez Motobécane,
tout en gardant un œil sur « sa » Pernod. Estrosi se voit
confier la responsabilité du team, tout en étant l’unique pilote.
Ces multiples tâches, couplées à ses résultats en dent de scie, le
contraignent à engager un autre pilote pour l’épauler, en la
personne de Jacques Bolle. C’était le
changement à opérer.
Lors du Grand Prix de Grande-Bretagne, Bolle conjure enfin le
mauvais sort et impose la Pernod, pour sa première (et seule)
victoire en mondial. Malgré l’arrivée du pur talent Jean-François
Baldé, ce succès est en réalité le dernier grand moment de joie des
équipes.
En effet, les raisons de l’arrêt du programme restent, encore à
l’heure actuelle, un sujet sensible. De toute évidence, gérer les
relations humaines quand une grande entreprise et de si fortes
têtes sont associées n’est pas de tout repos. Toujours est-il qu’en
1984, la troupe est déchirée, jusqu’à totalement cesser quelques
temps plus tard. Les principaux concernés, dont Bidalot, préfèrent
éviter de ressasser cet épisode douloureux. Qu’il en soit
ainsi.
Malgré une fin étrange au goût amer, l’aventure Pernod est
définitivement ancrée dans l’histoire du sport motocycliste
français. Une victoire 100 % française sur le sol anglais
accompagnée d’une campagne de pub massive n’auront pas manqué de
marquer les esprits des rêveurs.
Retrouvez cette tranche de légende les 11 et 12 juin au Castellet lors de l’exposition « Françaises de Grand Prix » dans le cadre de la Sunday Ride Classic !
Sunday Ride
Classic
www.circuitpaulricard.com
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Fiche technique Pernod 250 Grand Prix:
Moteur
Bicylindre deux temps face à la route, à cylindres et culasses
indépendants en alliage d’aluminium, incliné de 35° vers
l’avant.
Refroidissement : refroidissement liquide par pompe à eau à
entraînement mécanique.
Alésage : diamètre 54 mm.
Course : 54 mm.
Carburation : carburateurs Dell’Orto, diamètre 34 mm, en alliage de
magnésium par l’intermédiaire de disques rotatifs, placés sur les
faces extérieures du vilebrequin et entraînés par celui-ci.
Transmission
Primaire : à taille droite et denture rectifiée.
Embrayage : à sec comportant 7 disques frittés et 6 disques
acier.
Boîte de vitesses : 6 rapports à étagements multiples.
Partie-cycle
Cadre : multitubulaire en tubes d’acier au chrome molybdène
vanadium entrecroisés.
Suspensions
AV par fourche télescopique Marzocchi diamètre 35 mm avec
amortissement réglable.
AR à flexibilité variable, un amortisseur hydraulique réglable en
compression et en détente.
Roues: AV: 16 x 3 – AR: 16 x 3,5. Jantes monobloc en alliage de
magnésium coulé à 5 branches.
Réglage de la tension de la chaîne par un excentrique placé sur
l’axe de roue arrière.
Freins
AV 2 disques diamètre 260 mm.
AR 1 disque diamètre 230 mm. Disques composites. Âme: en alliage
d’aluminium. Revêtement de la surface de friction à haute dureté
obtenu par bombardement de molybdène sous plasma. Étriers et
maître-cylindre AV et AR en alliage de magnésium pour les fonderies
et titane pour les composants usinés.
Réservoir : en tôle aluminium formée de 1 mm d’épaisseur.
Poids à sec : 100 kg.
Vu à la SRC :