Au travers de l’exposition « Françaises de Grand Prix »,
la Sunday Ride Classic 2022 mettra
à l’honneur sur le circuit Paul Ricard bon nombre de mythes, ayant
émané des esprits les plus géniaux de l’hexagone. Aujourd’hui,
notre attention se porte sur l’aventure HO (pour Houzé –
Offenstadt) et la But, machine ô combien originale.
La carrière d’Éric Offenstadt, alias « Pépé », est loin d’être
conventionnelle. Après des débuts prometteurs à moto à l’aube des
années 1960, il s’oriente vers la monoplace, empilant les
excellents résultats. Ford France choisit même de soutenir le
charentais en Formule Junior. À l’époque, ces formules de
promotions fourmillent de dizaines d’immenses talents et même d’une
poignée de futur légendes. Sur le circuit de La Châtre, Éric
s’offre Jackie Stewart, futur triple champion du monde de Formule
1.
Après quelques déconvenues en monoplaces, celui qui compte parmi
les plus grands espoirs français se résigne et retourne aux deux
roues en 1970. « Pépé » est un fin metteur au point et un
brillant sorcier de la mécanique. Alors soutenu par Kawasaki
France, il modifie considérablement ses machines avec la précieuse
aide de son entourage. C’est ici que sa légende naquit.
Alors en Grand Prix, il imagine un châssis monocoque en aluminium,
emmené par un moteur Kawasaki. En effet, les pilotes se plaignent
du comportement de la H1R 500cc, et sont contraints de trouver des
alternatives. Cependant, l’approche Offenstadt est radicale. En
plus de cela, il équipe sa monture de freins à disque, qui
n’avaient pas la faveur des ténors. Pourtant, Éric compte trois
podiums en cette année 1971.
En 1976, après plusieurs années d’expérimentation, de travail acharné et d’apprentissage sur des cylindrées plus petites, Offenstadt créée la H.O. 500, défrayant la chronique. La moto est un concentré de toutes les innovations de « Pépé » ; le rendu final est déroutant, déstabilisant. Tout d’abord, l’utilisation de jantes à six branches en magnésium, chère au sorcier depuis le début de la décennie. Deux amortisseurs oléo-pneumatiques spécialement étudiés et non réglables en fonction des circuits s’accrochent au bras oscillant.
Ce n’est pas tout : Le châssis coque en aluminium coulé comporte
deux réservoirs séparés et la fourche fait appel à la technologie
préféré du cognaçais : la « roue tirée ».
Le système, trop complexe pour être expliqué en quelques lignes,
possède de nombreux avantages vérifiés : une plus grande stabilité
au freinage, moins d’écrasement et une bonne tenue de route.
Le moteur, lui aussi maison (!), était doté d’un système
d’admission très complexe. Chaque cylindre disposait de deux
carburateurs, ce qui rendait l’ensemble extrêmement difficile à
régler selon les pilotes. La HO (en 350cc ou 500cc), véritable
concentré d’innovation exploité par Alain Chevallier, n’a jamais
vraiment brillé. Trop de révolutions sur une seule et même machine
peut nuire à son développement, déjà limité par le temps.
En 1978, l’équipe récidive avec la « But », évolution intéressante
et toujours aussi surprenante, sponsorisée par les magasins
d’équipement de la maison. Plus basse, plus longue, et ayant
abandonné la poutre de la HO au profit d’une monocoque, elle offre
une meilleure prise en main, bien plus facile à emmener. En effet,
selon les dires d’Olivier Chevallier, pierre angulaire du projet,
la première était fatigante quand mal réglée. Malheureusement, les
projets du sorcier ne rencontreront jamais le succès escompté.
L’imagination, peut-être trop fertile, a pu poser quelques problèmes. La quatrième place au Grand Prix de France 350cc 1979 signée Hervé Guilleux reste son meilleur résultat à part une victoire dans une course secondaire en Espagne. Pour qu’un tel projet fonctionne, une structure organisée et conséquente aurait été nécessaire, avec le budget qui suit. Devant les faibles retombées médiatiques, l’enseigne But se retire. L’une des grandes pages de l’innovation « à la française » venait de se refermer… pour le moment.
Vous en avez peut-être entendu parler : le projet GECO, depuis
2013, est en constante évolution. Éric n’en démord pas et
n’abandonne pas le principe de la suspension à roue tirée, sa
marque de fabrique. Sur une base de Yamaha YZF-R1, les travaux se
poursuivent et plusieurs pilotes renommés à l’image de Lucas Mahias
ont été impliqués.
Offenstadt, peu importe les résultats, reste un grand monsieur de
la moto française. Un rêveur, qui n’a jamais eu peur d’oser.
Retrouvez ses travaux, dont certains sont encore actuellement en
restauration, à l’occasion de la Sunday Ride Classic, les
11 et 12 juin 2022 sur le Paul Ricard !
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