Une nouvelle taxe en vue pour 2025… (Sans commentaire)
Amendement n°I-1268, déposé le jeudi 17 octobre 2024, adopté le 8 novembre 2024 par l’assemblée nationale.
- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Code concerné : Code de l’environnement
Cet amendement propose la création d’un « malus bruit » sur les 2 et 3 roues motorisés les plus bruyants.
En effet, selon l’OMS, le bruit est le deuxième facteur environnemental le plus important à l’origine de problèmes de santé, juste derrière la pollution atmosphérique. Les conséquences sanitaires de la pollution sonore sont graves et concrètes : perturbation du sommeil, du système endocrinien, du système cardio-vasculaire, effets sur le système immunitaire.
Mal connu, ce problème de santé publique concerne pourtant une vaste part de la population. L’Agence européenne de l’environnement (AEE) estime ainsi que 20 % de la population européenne (soit plus de 100 millions de personnes) est exposé à des niveaux de bruit de longue durée néfastes à leur santé. Cette pollution représente un coût faramineux pour la société. Selon l’Ademe, le coût social des pollutions sonores en France s’élève à 147 milliards d’euros par an, en prenant notamment en compte le coût des troubles et pathologies associées et la perte de productivité. C’est quasiment l’équivalent du coût social du tabac, estimé à 156 milliards d’euros.
L’une des premières causes de pollution sonore est le trafic routier. L’OMS recommande ainsi de réduire les niveaux sonores émis par le trafic routier à moins de 53 décibels (dB) en journée, et à moins de 45 dB la nuit. Malheureusement, ces limites sanitaires sont bien souvent fortement dépassées. Selon l’ANSES, 40% de la population française est exposée à des niveaux sonores supérieurs à 55 dB, dont les ¾ sont liés au trafic routier. Ces niveaux sont sans surprises encore plus élevés dans les zones très urbanisées puisque 40 % de la population des agglomérations de plus de 250 000 habitants est exposé à un niveau sonore de jour supérieur à 60 dB en raison du trafic routier.
Or, tous les véhicules ne contribuent pas de la même manière à la pollution sonore : les 2 et 3 roues motorisés (2/3 RM) y contribuent outre mesure par rapport à leur part de transport. Ainsi, alors même qu’ils n’assurent que 2% du transport routier de voyageurs (CGEDD/SDES), le bruit causé par les 2 roues motorisés arrive largement en tête des bruits de transport les plus gênants pour les Franciliens (Crédoc). Autrement dit, les 2 roues transportent peu de gens mais nuisent à beaucoup.
Et pour cause : la réglementation en termes d’émissions sonores des 2/3 RM est plus laxiste que celle des automobiles. En effet, au moment de l’homologation, alors que les émissions sonores d’une voiture particulière ne doivent pas dépasser 74 dB, celles d’une moto sont quant à elles autorisées à atteindre 80 dB. Cette différence de 6 dB, déjà injustifiée sur le papier, est par ailleurs dans les faits loin d’être négligeable en matière de perception sonore : du fait de l’échelle logarithmique utilisée dans le calcul des décibels, une augmentation de niveau sonore de 5 dB correspond environ à un triplement de l’émission sonore.
En outre, cet écart réglementaire est aggravé par la réalité de la situation et des pratiques :
- Le niveau sonore d’homologation est inférieur à celui répertorié sur la carte grise et sur la base duquel les contrôles de police sont effectués. Ce dernier est mesuré à l’arrêt, à la moitié du régime de puissance maximale. Ces niveaux varient donc selon les modèles d’engins et peuvent facilement dépasser les 80-85 dB(A) voire même les 100 dB(A) pour certains modèles de motos de grosses cylindrées.
- Les silencieux des pots d’échappements des 2 RM sont facilement et fréquemment modifiés, dans un but de personnalisation du véhicule.
- Certaines pratiques de conduite à tendance sportive ou agressive accentuent également le bruit émis.
Ainsi et au vu de la contribution déraisonnable des 2/3 RM à la pollution sonore, cet amendement propose la création d’un “malus bruit” pour ces véhicules sous la forme d’une taxe progressive.
En raison du manque d’accès aux données nécessaires, notamment sur la répartition des niveaux sonores indiqués sur le certificat d’immatriculation du parc de véhicule, cet amendement propose que le barème de la taxe soit fixé par décret. Ce barème pourrait associer un tarif marginal à chaque fraction de décibel du véhicule, exprimée en dB (A) et arrondie à l’unité tel que ci-dessous :
Emissions sonores (en dB(A)) | Tarif marginal (en €/dB) |
Inférieures à 77 | 0 |
77-80 | 5 |
81-85 | 10 |
86-90 | 20 |
91-100 | 40 |
>101 | 80 |
Le produit de cette taxe serait affecté au soutien à la transition du parc de 2/3 RM vers l’électrique, moins polluants et plus silencieux.
Source : Assemblé nationale