C’est fini : Suzuki quitte le monde des Grands
Prix. Voici l’occasion de revenir sur les grandes dates du
projet depuis le retour de la firme d’Hamamatsu en 2015. Au cours
de ses huit années d’exploitation, la GSX-RR a connu de nombreux
succès, des grands moment, suspendus dans le temps.
Vous pouvez trouver l’épisode d’hier en cliquant sur cette phrase
en surbrillance. Aujourd’hui, penchons-nous sur un
autre épisode doré de cette épopée : le Grand Prix d’Europe
2020.
Comme nous l’avions statué dans le précédent volet, la saison 2019,
malgré l’exploit de Álex Rins, n’avait pas été
exceptionnelle. Suzuki et les trois principaux constructeurs
étaient désormais sur un même pied d’égalité. La campagne se
termina dans le ventre mou du classement, mais il faut quand même
noter la belle performance de Rins, quatrième au général.
Joan Mir, rookie, était passé à côté de son année.
En plus d’une blessure survenue à mi-saison, Mir souffrait
considérablement face à son coéquipier. La fin avait été meilleure
que le début, et on notait tout de même une amélioration.
Cependant, impossible de prévoir ce qui allait
suivre.
La saison 2020 commence… ou pas. Nous n’allons pas
vous refaire toute l’histoire, mais comme vous le savez, la
pandémie de Covid-19 perturba le monde entier, et donc, les Grands
Prix motos. Tard dans l’année, la FIM publia un nouveau calendrier
composé de 14 courses. En plus d’être
historiquement courte, cette saison voyait différents Grands Prix
se tenir sur les mêmes tracés. En tout et pour tout, neuf circuits
différents furent empruntés. Une saison aussi restreinte laisse
place à la surprise, même si les forces en présence n’avaient pas
changé depuis 2019.
Marc Márquez, sur le papier, était le grand
gagnant de ces modifications. D’abord, il s’était fait opérer fin
2019 pour un problème à l’épaule : Rappelez-vous comment
elle se déboîtait facilement. En débutant la saison en
Juillet, cela lui laissait largement le temps de se reposer. En
plus de sortir de la plus grande saison de sa vie, Marc allait
rouler que sur des circuits qui lui convenaient, ou presque : Deux
manches à Aragón et deux à Jerez ! il ne pouvait pas rêver mieux.
Andrea Dovizioso, triple vice-champion du monde en
titre, était logiquement favori. Fabio Quartararo,
toujours chez Petronas SRT, pouvait confirmer, tandis que la
surprise pouvait venir de Álex Rins sur
Suzuki.
Coup de tonnerre. Lors de la manche d’ouverture,
Rins se blesse en fin de Q2 et ne pourra prendre le départ. Le
lendemain, Márquez chute lourdement et doit abandonner. Bien sûr,
vous connaissez déjà les conséquences de cet épisode majeur de
l’histoire des sports motos. Cela contraint l’octuple champion du
monde à quitter le paddock pour la saison. Notre « El
Diablo » national s’impose lors des deux manches disputées sur
le circuit de Jerez, et prend fermement la tête du championnat.
Avec deux courses remportées sur 14, il s’est mis dans des
conditions optimales pour chasser son premier titre.
Vous l’aurez compris, la physionomie de la saison est plus
qu’étrange. Quarta’ baisse en régime, et Dovizioso, qui
devrait prétendre à la couronne en l’absence de son ancien
adversaire, ne répond pas présent alors que la Ducati s’affirme
comme la meilleure machine du plateau. C’est comme si personne ne
voulait prendre la tête. Rendez-vous compte : après huit
courses, « Desmodovi » menait le général avec seulement 84
points, soit une terrible moyenne de 10,5 points par course
! Si Rins n’arrive plus à se montrer dangereux, c’est son
compatriote Joan Mir qui tire la firme vers le haut. Alors, oui,
Mir parvient à monter sur le podium assez régulièrement, progresse
, mais sans jamais afficher un niveau de champion du monde. Il mise
sur sa régularité (en réalité sa seule arme) pour
essayer de jouer les trouble-fête. Mais la deuxième partie
de saison bouleverse la hiérarchie.
Dovizioso n’y arrive plus. Quartararo est aux
abois alors que le titre lui tend les bras. Rins revient fort, et
s’impose même à l’occasion du Grand Prix de Aragón. Franco
Morbidelli, sur sa Yamaha, effectue lui aussi une belle
remontée après sa première victoire à Misano. Mais Joan
Mir, en épouvantail, a mieux géré l’entièreté de la
saison. Lors de la deuxième manche disputée sur le circuit
de Aragón, sa capacité à rester bien placé, peu importe les
dynamiques, est enfin récompensée, il s’empare de la tête du
championnat. À trois courses de la fin, va-t-on couronner
un champion du monde sans aucune victoire ? Un tel fait
serait inédit dans l’histoire de la catégorie reine. Dès lors, les
discussions vont bon train. En effet, et sans diminuer la grandeur
de son exploit jusqu’alors, Mir n’avait jamais été vraiment
convainquant. Il n’était pas le plus rapide, pas le plus incisif,
ni le plus fort sur un tour, mais il était devant.
Vient le Grand Prix d’Europe, première des deux
courses disputées sur le circuit Ricardo Tormo.
Ici, Mir n’y a encore jamais gagné. Parti depuis la cinquième
position, il réalise un départ correct. Lui et Rins, plus rapides,
effacent le poleman Pol Espargaró pour la tête.
Dans le même temps, Fabio Quartararo chute de nouveau. Ses
chances d’être titré sont réduites à néant. La course
n’est pas aussi palpitante que le Grand Prix de Grande-Bretagne
2019, nous vous l’accordons. Un Mir en jambe passe Álex Rins, qui
ne défend pas outre-mesure. Les positions restent figées jusqu’à la
présentation du drapeau à damier. Il s’agit du seul doublé
Suzuki au XXIe siècle, mais le plus important n’est pas
là.
Le Majorquin est enfin récompensé, et cela ne fait plus
aucun doute. Avec 36 points d’avance à deux courses du
terme, son sacre n’est plus qu’une question de temps : Cette
victoire le couronne en quelque sorte. Il décroche le titre de
champion du monde lors de la seconde manche à Valence, depuis la
septième place à l’arrivée. Ce succès au Grand Prix
d’Europe est un tournant, car avec ce doublé, la mission de Suzuki
est accomplie. Revenir triompher au plus haut niveau, peu
importe les conditions, est loin d’être facile.
À l’heure où ces lignes sont écrites, il s’agit de la seule
victoire en MotoGP pour Joan Mir. Si cela devait en rester là,
l’Espagnol décrocherait un nouveau record : Champion du
monde en catégorie reine avec le moins de victoires dans sa
carrière. Mais cette performance à Valence légitime son
héritage, qui, à coup sûr, ne sera pas oublié.
Qu’avez-vous pensé de cet épisode de l’épopée Suzuki ?
Dites-le nous en commentaires !
Photo de couverture : Michelin Motorsport