La catégorie Moto3 est plus disputée que
jamais. Rien qu’en 2022, sept pilotes différents se sont
imposés. Et ce n’est pas qu’une question de matériel, puisque cinq
d’entre eux utilisaient la KTM RC250GP, ou
équivalentes Husqvarna et GasGas.
La modernisation du sport moto, dans les années 1980, a rendu les
grilles plus compétitives. Pour la crédibilité du championnat, une
– nouvelle – grosse période de domination n’était simplement pas
imaginable. Les champions se sont multipliés, mais quelques uns
sont passés entre les mailles du filet. Aujourd’hui, revenons sur
une prouesse inégalable, à savoir la saison 1987 de Fausto
Gresini.
À l’époque, il est loin d’être inconnu, c’est un net favori
au titre. Fausto effectua des débuts surprenants en
catégorie 125cc, et son passage sur Garelli
orchestré à la mi-saison 1984 porta ses fruits. Dès lors, il était
un candidat régulier à la victoire. En 1985, il vint à bout de
Pier Paolo Bianchi et s’offrit son premier titre
mondial, immédiatement remis en jeu l’année suivante.
Le nouveau n°1 de la catégorie peina face à un Luca
Cadalora en feu, lui aussi chevauchant une Garelli. Les
machines italiennes étaient clairement plus performantes, mais cela
n’avait rien à voir avec la domination outrancière des MV
Agusta en catégories supérieures dans les années 1960.
Parfois, une MBA et même une Bartol pouvaient accrocher la
victoire. Cependant, il termina l’année en trombe, avec un succès
au Grand Prix du Bade-Wurtemberg (organisé à
Hockenheim). Retenez-bien ceci, car nous allons
l’évoquer de nouveau.
Débute la saison 1987. Le calendrier 125cc diffère
de celui réservé aux 250cc et aux 500cc, et c’est donc en Espagne
que se retrouvent les habitués de la discipline. À
Jerez, la course est disputée, mais Gresini vient
à bout du poleman Domenico Brigaglia. À
Hockenheim, il est intraitable et réalise un « hat
trick », à savoir pole, meilleur tour en course et victoire.
Chez lui, du côté de Monza, il gagne d’un cheveu face à
Bruno Casanova, lui aussi pilote Garelli.
August Auinger, sur MBA, est
troisième à moins d’une demi-seconde. Nouvelle victoire sur le fil
en Autriche ! C’est déjà la quatrième consécutive sur la
saison, et à chaque fois, ça ne passe pas loin. Alors que
Fausto prend une bonne option sur le titre, Casanova reste
proche.
Incroyable. À Assen, Gresini gagne de nouveau pour moins
d’une seconde, toujours devant son coéquipier ! En
revanche, Le Mans réserve moins de suspens. Gresini écrase la
concurrence et colle plus d’une minute à son poursuivant. À ce
stade, on s’approche du tour de force. En comptant Hockenheim 1986,
nous sommes déjà sur une série de six victoires consécutives. Et ce
n’est pas fini : À Donington, nouveau coup de
maître. Intraitable le dimanche, il est désormais
quasiment certain d’être titré après la chute de Bruno Casanova,
qui s’élançait pourtant depuis la pole.
Même tarif à Anderstorp, en Suède, où il triomphe loin
devant. Casanova ne peut plus rien faire. Gresini, en
remportant le Grand Prix de Tchécoslovaquie, s’adjuge son deuxième
titre mondial 125cc, sans surprise. À Misano, il enfonce le clou et
continue sa série historique. Va-t-il réaliser une
« année dorée », soit gagner toutes les courses sur une
saison ? Il n’est plus qu’à un Grand Prix de marquer
son temps.
La saison 125cc se clôture à Jarama, dans le cadre
du Grand Prix du Portugal. En effet, la piste de Estoril n’était
pas prête à accueillir les motos, et les droits furent cédés pour
cette année au circuit Espagnol, situé non loin de Madrid. Gresini
est de nouveau en pole position. Mais contre toute attente,
l’Italien chute ! La victoire est « offerte » à
Paolo Casoli, le troisième du championnat.
Fausto Gresini restait invaincu en petite catégorie depuis
près d’un an, et totalisait 11 succès consécutifs. Cet
exploit anachronique est fou, et sûrement pas assez discuté de nos
jours. Il réalise ainsi la 6e meilleure série d’invincibilité de
tous les temps, à égalité avec Ángel Nieto sur les campagnes
1978-1979. Autour de lui, que des anciennes gloires, comme
Carlo Ubbiali, Hailwood,
Surtees et bien évidemment, le
« roi Ago » (qui culmine à 35
unités, autant vous dire que vous pouviez parier sans trop
de risques en 1968 et 1969). Aucun autre pilote des petites
catégories ne l’a rejoint jusqu’à aujourd’hui, car il est
impensable, dans ces classes extrêmement disputées, de revoir une
telle domination.
Une saison 1988 hachée par les blessures eut raison de sa forme
quasi-divine. Plus jamais il n’accrocha un titre de champion du
monde, même s’il ne passa pas si loin en 1991 et 1992, cette fois
sur Honda. Bien entendu, sa carrière continua et Fausto eut une
« deuxième vie » tout aussi belle avec son équipe très
performante dans toutes les catégories, jusqu’à sa
disparition en 2021.
Connaissiez-vous cette saison record de Gresini ?
Dites-le nous en commentaires !
Photo de couverture : Vedi Sotto