NSU, c’est comme Peugeot en plus dramatique.
Fondée en 1873, l’iconique marque allemande sombra par deux fois au
cours du XXe siècle. Aujourd’hui oubliée, elle était en son temps
la marque de moto la plus importante sur le globe. Retour sur une
histoire hors du commun, portée par de véritables légendes des
sports mécaniques.
La Neckarsulmer Strickmaschinen Union, signifiant
« Union des machines à tricoter de Neckarsulm », fut fondée il y a
148 ans par Christian Schmidt et Heinrich Stoll. Devant le succès
relatif de leur affaire, les deux comparses se tournent, en 1886,
vers une activité plus lucrative : les
bicyclettes.
Dès 1900, les motocyclettes, utiles et peu chères, sont la cible de
la marque allemande. La construction de voitures suivra, mais c’est
elle qui précipitera la première chute de l’entreprise. NSU essuie
d’énormes difficultés financières, et se voit contraint de vendre
la partie automobile à FIAT.
Les motos de petites cylindrées deviennent donc la priorité. Une
fois la Seconde Guerre mondiale passée, NSU devient le premier
fabriquant mondial du secteur. Les dirigeants s’aventurent dans
toutes sortes de catégories, allant de 50cc à 500cc. Une belle
reconversion après le premier revirement de 1929.
De fil en aiguilles, la marque s’installe dans le riche paysage
européen. Comme tous les constructeurs d’époque, la firme du
Bade-Wurtemberg a un pied dans la compétition et les records de
vitesse. Wilhelm Herz, sur un modèle Max Standard,
devient le premier homme à passer la barre des 200 mph
(soit 322 km/h) en 1956.
Le championnat du monde moto, lancé en 1949, ne passe pas inaperçu.
Il regroupe les meilleurs pilotes et constructeurs européens;
autrement dit, c’est une occasion en or pour d’avantage augmenter
son influence.
Le grand Mike Hailwood a, par exemple, roulé une
NSU le temps d’un championnat. En 1958, il choisit la firme
allemande pour la catégorie 250cc. Deux podiums plus tard, il
conclut la saison avec une belle quatrième place au général. Trois
ans plus tôt, c’est le mythique John Surtees qui
propulsait NSU au sommet lors du Grand Prix
d’Ulster.
N’y voyez-là rien de comparable avec Gilera,
Norton ou MV Agusta : NSU
reste une firme populaire, plus spécialisée dans les petites
motocyclettes à bas coût. Ainsi, l’implication en Grands Prix reste
moindre par rapport aux marques énumérées plus haut.
Cependant, comment ne pas évoquer Werner Haas, fer
de lance de la marque en compétition. Pur produit NSU, il ne pilota
que ces machines durant sa courte carrière, étendue de 1952 à 1954.
Lors de son année rookie, il choqua les spécialistes en remportant
le Grand Prix d’Allemagne 125cc. Il manqua de réitérer l’exploit à
Monza devant les Moto Guzzi mais Enrico
Lorenzetti arracha la première place dans les derniers
instants.
1953 est l’année de la consécration pour le fantastique duo
NSU/Haas. Le prodige allemand termine sur le
podium à cinq reprises en six courses et s’adjuge le titre 250cc.
Mieux encore, il fit de même en 125cc, ne descendant jamais du
podium. Un sacre dans cette catégorie est un véritable exploit,
surtout à l’époque; quatre MV Agusta suivaient au classement.
Le double champion du monde ne compte pas s’arrêter là. En 1954,
il livre sa plus belle prestation en triomphant lors de toutes les
manches du championnat 250cc. NSU, à cette époque,
domine la catégorie (sept représentant dans le top 10).
La firme n’hésite pas à jouer de son statut en compétition lors de
différentes campagnes de publicités. Malheureusement, elle aura du
mal à durer dans le temps. La fabrication d’automobiles, reprise
entre temps, ne marche pas mieux que la première fois, aux dépens
des motocyclettes. Rachetée en 1969, puis dissoute en
1977. Voilà la triste fin d’une marque légendaire et en
avance sur son temps.
Werner Haas, tué lors d’un accident d’avion en
1956 ne pourra vivre et conter ses exploits en championnat du
monde. C’est bien dommage, car il s’agit là d’un des meilleurs
pilotes allemand de tous les temps, son ratio de victoire en
carrière étant de 50 %. NSU était destinée à
marquer l’histoire. Durer dans le temps, c’est plus
dur.
Photo de couverture : Lothar Spurzem