En voilà un Japonais à part. Il est vrai que
lorsque nous évoquons les pilotes talentueux de l’archipel,
Noriyuki Haga est rarement en tête de liste, sans
doute parce qu’il n’a pas roulé assez longtemps en Grands Prix. Une
fois n’est pas coutume, allons plutôt en Superbike pour découvrir
le parcours de ce pilote formidable, malheureusement jamais
couronné.
Tout commence au début des années 1990. Noriyuki est engagé en
championnat japonais, à l’époque très prolifique. Il signe chez
Yamaha en 1995, et immédiatement, se révèle sur le plan national.
En 1996, il remporte les 8 Heures de Suzuka aux côtés de
Colin Edwards sur un YZF750, puis, une année plus
tard, est sacré champion du Japon en 500cc. Un début de
carrière on ne peut plus prometteur.
Comme bon nombre de ses compatriotes, il avait déjà couru en
Superbike lors de la manche locale, en tant que wildcard.
D’ailleurs, en 1996, il termine deuxième de la première course
avant de subir une disqualification lors de la seconde. C’est en
1997 que la première grosse opportunité de sa carrière se présente.
Edwards, blessé chez Yamaha, ne peut disputer les deux dernières
manches du championnat, prévues à Sugo, chez lui,
mais aussi à Sentul en Indonésie. Il ne lui en
faut pas plus. Il prend sa première victoire lors de la deuxième
manche japonaise, et décroche un guidon avec l’équipe officielle
Yamaha pour 1998.
Les saisons 1998 et 1999 ne sont pas si convaincantes
: Noriyuki est rapide mais trop de chutes l’empêchent de
se battre pour le titre. En revanche, il effectue en 1998 une
apparition remarquée en Grands Prix, pour Yamaha, toujours en tant
que wildcard à
Suzuka : troisième à l’arrivée. Aussi, la moto
frappée du n°41 peine beaucoup en qualifications. Pourtant, en
2000, la fenêtre est plus ouverte que jamais, mais cela aurait bien
pu tourner au vinaigre. Dès le premier rendez-vous en Afrique du
Sud, il est contrôlé positif à l’éphédrine, une
substance mal connue par chez nous. Moins répandue que les
stéroïdes anabolisants, elle est d’une composition chimique proche
des amphétamines, et reste régulée dans de très nombreux pays.
Utilisée en tant que produit dopant, la molécule augmente
l’agressivité et permet d’atténuer la fatigue. Haga parle
lui d’un produit naturel pris pendant l’hiver.
Toujours est-il qu’il est écarté des circuits pour un mois.
Cependant, l’affaire traîne pendant la saison et la sanction est
réduite à deux semaines, ce qui l’empêche de disputer le titre
jusqu’au bout contre Colin Edwards. Car oui,
Haga réalisait sa meilleure saison avec quatre
victoires et sept podiums. Il échoue à la deuxième place. Coup de
théâtre fin 2000 : Yamaha souhaite se concentrer sur les GP, et
contraint Haga à venir s’essayer à plein temps en 500cc, au sein de
la structure Red Bull WCM. Malgré une quatrième
place en Grande-Bretagne, sa campagne est décevante. Immédiatement,
le japonais cherche une porte de sortie pour retourner en WSBK.
C’est PlayStation 2-FGF Aprilia qu’il l’accueille.
Puis, le constructeur italien décide de le renvoyer en
MotoGP ! Sur la RS-Cube mal née, la sauce ne
prend pas. Lui comme Colin Edwards, de nouveau son
coéquipier (les deux ne se lâchent plus) peinent
énormément à son guidon. Pour 2004, il prévoit son deuxième retour
en Superbike, et signe chez Renagade Ducati Koji
dans l’espoir de jouer le titre. Il ne peut rien faire face à la
régularité de James Toseland, et se fait même
battre par Régis Laconi.
Retour chez Yamaha, via la structure Italia WSB en
2005 mais rien n’y fait : de nouveau troisième, cette fois derrière
Troy Corser et Chris Vermeulen.
Jamais deux sans trois : il est toujours troisième en 2006,
précédé par Troy Bayliss et James
Toseland ! Décidément. Il redouble d’efforts en 2007,
est plus incisif, meilleur en qualifications… pour perdre de
nouveau contre Toseland. Quand ça ne veut pas, ça ne veut pas.
Toujours très rapide en 2008, il est troisième derrière les
« Troy », Bayliss et Corser. C’est tout
de même la quatrième fois en cinq ans qu’il échoue à cette position
plus que frustrante. Mais l’annonce de la retraite du
« Baylisstic » ouvre la porte à
Noriyuki. Ducati Xerox, team central en Superbike,
l’engage pour décrocher la couronne ; tout autre objectif ne
serait qu’une immense déception. Alors que toutes les planètes sont
alignées arrive un extra-terrestre, un rookie qui n’a jamais posé
les pieds en Superbike auparavant. Son nom : Ben
Spies.
Dès les premières manches, on s’aperçoit que l’Américain
n’est pas là pour compter les cuillers de pèche. Les deux
s’échangent les coups et se partagent la majorité des victoires,
avec quelques miettes laissées à Michel Fabrizio
et Max Biaggi. Haga a l’avantage, mais une
blessure engendrée à Donington provoque la remontée
d’« Elbowz ». La régularité et la
vitesse intrinsèque de Spies, bien meilleure, ont raison des
chances du Japonais qui laisse une fois de plus s’échapper le
championnat. L’écart n’est que de six points, sur les 462
engrangés par le vainqueur.
Rendez-vous compte : Noriyuki avait terminé sept fois
sur le podium final, mais jamais il ne s’était imposé. Il
s’agit, encore et toujours, de l’un des meilleurs pilotes à n’avoir
jamais été titré dans l’histoire du sport moto. À déjà 35 ans, il
n’est plus aussi rapide en 2010, peut-être usé par tant de
désillusions. Passé chez Aprilia Pata en 2011, il préfère se
tourner vers le championnat britannique, le BSB, avant de prendre
sa retraite.
Haga, c’est tout de même 286 courses en WSBK, pour
43 victoires et un total de 110
podiums, le tout accompagné de 55 meilleurs tours
en course, avec « seulement » sept poles. Pas de
couronne, il est vrai, mais des souvenirs impérissables pour
quiconque l’ayant vu rouler.
Gardez-vous des souvenirs de lui ? Dites-le nous en
commentaires !
Photo de couverture : Smudge 9000