Quel est le point commun entre Johann Zarco,
Jorge Martín, Enea Bastianini et
Pedro Acosta ? Tous sont passés par la Red
Bull Rookies Cup, la fameuse formule de promotion réservée aux
jeunes talents. Ici, tout le monde à la même moto et les mêmes
chances. Il s’agit par conséquent de l’une des académies les plus
fertiles. Depuis 2007, ce championnat a vu éclore de nombreux
grands noms. Pourtant, à un très jeune âge, il est parfois
difficile de confirmer d’aussi grandes attentes. Ensemble,
revenons sur les oubliés passés par les rangs de cette école de la
performance. Il ne s’agit pas de les dénigrer, bien au
contraire ; Cette saga vise à mettre la lumière sur eux, mais
aussi à illustrer la difficulté du niveau mondial. Gardons à
l’esprit que les noms cités précédemment sont des exceptions, et
que la majorité des adolescents prometteurs se heurtent à des
difficultés parfois extra-sportives.
Cet épisode fait suite à celui d’hier, que vous pouvez retrouver en
cliquant sur cette phrase en surbrillance.
I) Scott Deroue
Dommage que le Néerlandais n’ait pu transformer
l’essai. Dès son plus jeune âge, Scott se passionne pour
les deux-roues et se révèle sur le plan national dans les plus
petites catégories. Comme de nombreux autres talents prometteurs,
il est inscrit à l’édition 2011 de la Red Bull Rookies Cup, et ne
tarde pas à monter sur le podium, à 15 ans seulement.
Lors de la saison 2012, le monde le découvre à Estoril, lorsqu’il
remporte les deux manches organisées sur le tracé Portugais.
Dès lors dans la course au titre, il se bat mais ne peut
vaincre Florian Alt, que nous avons évoqué dans l’épisode
précédent. Vice-champion en titre, il peine à s’adapter
aux nouvelles Moto3 quatre-temps, mais remporte quand même une
course à Silverstone. Logiquement, une place lui est offerte en
mondial, aux côtés d’Ana Carrasco chez RW
Racing.
C’est la débandade. Scott ne marque aucun point,
avec une seule 17e place comme meilleur résultat. À 19 ans, il est
d’ores et déjà contraint de se réorienter. Il tombe en championnat
Moto3 britannique, qu’il domine, avant de s’inscrire en Supersport
300 pour 2017, une catégorie nouvellement introduite. Il est alors
le premier vainqueur de l’histoire de la discipline, et termine
régulièrement sur le podium, malheureusement sans jamais s’imposer
au général. Après quatre années passées sur une
Kawasaki 300cc, il annonce sa retraite début 2021,
mais s’engage pourtant en championnat allemand. Une carrière pas à
la hauteur de son talent, mais tout de même impressionnante.
II) Karel Hanika
Depuis le début de cette série d’articles, nous étudions des
pilotes certes prometteurs, parfois vainqueurs de la coupe de
promotion. Mais les deux profils qui suivent étaient de
calibre « champions du monde » avant de rater le
coche. Tout d’abord, Karel Hanika. Le Tchèque fait
sensation dès ses premiers tours de roue lors de l’édition 2021.
Doté d’une vitesse foudroyante, il amasse trois victoires,
quatre podiums et huit pole. Il termine à la troisième
place, derrière Alt et Deroue. Logiquement favori l’année suivante,
il ne déçoit pas, et réalise une campagne fantastique avec sept
succès et trois podiums en quatorze sorties. Mieux, il s’élance de
la première position à six reprises. Quand il annonce sa signature
avec la prestigieuse structure d’Aki Ajo pour 2013, Karel a marqué
la série de son empreinte. Encore aujourd’hui, il détient
le plus grand nombre de pole, au total (10) comme dans une saison
(6), mais aussi le plus de victoires (10), le tout en seulement
deux ans.
Très attendu en mondial, il ne répond pas aux
attentes. Pourtant équipé d’une machine officielle, il
chute très souvent et n’est même plus si rapide. Après deux années
sans podiums, pole, ou meilleurs tours en course, Ajo s’en sépare.
Il débute l’année 2016 chez Mahindra, mais il est
remplacé par Danny Webb à mi-saison. Terrible.
Quelque wildcards plus tard, dont une en Moto2 lors de l’exercice
2017, et le rêve d’un jour finir champion du monde était
terminé.
Bien sûr, Hanika n’a pas disparu ; autant de
talent ne peut pas se perdre en si peu de temps. Il fait le bonheur
du YART en endurance, et les fans de la discipline
ont pu se rendre compte de sa vitesse rare. D’ailleurs, il
détient désormais le record du tour aux 24 Heures Motos, mais
estime qu’il est possible d’aller encore plus vite… Rendez-vous en
avril pour le voir à l’œuvre.
III) Bo Bendsneyder
Pour clôturer cette saga, qui de mieux que l’homme avec le plus de
victoires sur une saison. Né en 1999 aux Pays-Bas, Bo
Bendsneyder débarque au sein de l’académie en 2014.
Héroïque, il remporte sa première course devant son public, à
Assen. Alors 9e du classement, personne ne pouvait prévoir
l’explosion qui allait suivre. Il débute la campagne 2015
avec cinq victoires sur les cinq premières courses, avant
d’essuyer un abandon lors de la deuxième manche au Sachsenring. Il
se ressaisit à Brno, avec une deuxième place et une nouvelle
victoire. Puis, enchaîne avec deux autres succès à Silverstone et
Misano. Diminué pour les deux dernières manches, Bo a déjà fait le
plus dur. Avec huit victoires en seulement douze courses
disputées, il établit un nouveau record qui tient toujours à
l’heure où ces lignes sont écrites.
Ni Fabio Di Giannantonio, Ayumu
Sasaki, Raúl Fernández ou Kaito
Toba n’ont pu ralentir le missile batave. Les offres ne
manquent pas pour 2016, et bien sûr, Aki Ajo a la
priorité. L’adaptation est moins difficile que pour Karel
Hanika. Il monte sur la boîte à deux reprises en tant que
rookie. Aussi incroyable que cela puisse paraître, il
s’agit, à l’heure actuelle, de ses deux seuls podiums en
mondial.
Après une saison 2017 difficile, Tech3 le récupère
en Moto2 mais sans succès, avec seulement deux points marqués, et
une blessure en fin d’année causée par l’explosion de son moteur au
Japon. Désormais chez NTS, les belles heures de la Rookies
Cup sont derrière lui. Il peine énormément, et connaît de
gros passages à vide : Ps le mieux pour se remettre en confiance.
Après avoir mangé son pain noir deux années durant, il signe chez
Pertamina Mandalika SAG, et parvient à regagner en
performance. En 2021 et 2022, il progresse, passe de la 16e
à la 13e place au général. Toujours au sein de la même
formation pour 2023, nous espérons vivement qu’il réussisse son
pari ; Bo a tout le talent pour discuter avec les meilleurs de
la catégorie intermédiaire. Prions pour qu’il y reste
encore de nombreuses années, et qu’il prouve aux jeunes qu’avec un
mental à toute épreuve, un début de carrière difficile ne
conditionne pas toute une vie.
Aviez-vous ces trois pilotes en tête ? Dites-nous ce
que vous en pensez en commentaires !
Photo de couverture : Chris Page