Jim Redman, en voilà un nom légendaire. Même
s’il est très reconnu et en aucun cas oublié, son palmarès est
absolument ahurissant et mérite qu’on le rappelle. Ensemble,
étudions l’histoire d’un des architectes de la dynastie Honda en
Grands Prix.
Né dans la capitale britannique en 1931, Jim Redman est un
brillant élève. Mais une fois son père décédé, il décide
de s’exiler en Afrique à l’aube de ses vingt ans, et plus
précisément, en Rhodésie. Il s’agissait d’une ancienne colonie
britannique (devenue la République du Zimbabwe en
1979-1980), qui accueillait nombre d’expatriés du vieux
continent.
Il y rencontre John Love, un pilote local. Les
deux se prennent d’amitié, et la passion pour la compétition moto
naît à ce moment là. Les deux montent une boîte consacrée à la
réparation et à la vente de deux-roues. L’aventure démarre.
Dès lors, Redman aide à la préparation des monoplaces de
son ami John, qui débutait une nouvelle épopée sur quatre
roues. En échange, il lui laissait piloter ses anciennes
motos avec son vieux matériel. De fil en aiguilles, Redman gagne en
expérience et devient l’un des meilleurs pilotes du pays, notamment
en catégorie 350cc. Puis, en 1957, il part à la conquête du
championnat Sud-Africain sur Norton Manx. Tout le monde est
sous le choc. De toute évidence, l’homme est doué, mais
les circuits africains sont trop petits pour autant de talent.
Il décide donc de revenir sur ses terres natales, où il y trouve
une concurrence bien plus féroce. Lors de sa sortie au meeting de
Pâques à Brands Hatch, il partage la piste avec
Geoff Duke, mais aussi un jeune,
Mike Hailwood. Au milieu de tout ce beau monde, Jim
termine deuxième, mais décide de repartir en Rhodésie… pour mieux
revenir quelques temps plus tard, cette fois pour de bon.
En 1958, il prend d’assaut le championnat du monde en espérant
attirer l’attention de l’écurie MZ en 125cc et
250cc. Sur Norton, il dispute quelques courses en wildcard et se
fait remarquer par un tout autre constructeur :
Honda. La firme ailée vient juste de débarquer, et
n’a pas encore connu le succès. En 1960, le pilote titulaire et
pierre angulaire du projet, Tom Phillis, est
blessé. Voici le début d’une grande histoire d’amour.
En 125cc comme en 250cc, il se révèle aux guidon des machines
japonaises. Dans une ère totalement dominée par MV Agusta,
difficile d’exister mais pourtant, il n’est pas ridicule en 500cc
où il roule toujours sa fameuse Norton. Grâce à de beaux
résultats, il abandonne la plus prestigieuse des catégories pour se
consacrer totalement aux bébés de Soichiro Honda.
En 1961, les Honda sont de plus en plus performantes. Phillis,
remis sur pied, s’impose d’entrée en Espagne en 125cc, alors que
Carlo Ubbiali n’est plus là pour terroriser les
petites classes. Hailwood, lui aussi, se fait remarquer au guidon
des Japonaises. Redman est dans le coup, et il prend même deux
victoires en quart-de-litre. Dès lors, on le pressent comme
un futur grand. En 1962, c’est l’explosion. Il court dans
trois catégories simultanément, ayant ajouté la 350cc à son
programme, à chaque fois pour l’usine Honda. S’il peine face à
Luigi Taveri en 125cc, il remporte haut la main
les titres 250cc et 350cc. Il faut se rendre compte de
l’exploit : Redman n’est pas passé loin d’être sacré
trois fois en une saison.
Jim devient l’un des monstres du championnat, tout
simplement. Il se permet même de battre Mike « The
Bike » en 350cc lors de la saison 1963. Bien qu’il soit
également titré en 250cc puis en 350cc en 1964 (en remportant
toutes les courses de la saison), cette couronne 125cc lui résiste.
D’ailleurs, à Assen, il devient le premier à remporter trois
courses le même jour. À la fin de saison, il est l’un des meilleurs
pilotes ayant touché une moto de toute l’histoire, c’est une
certitude. Ses aptitudes en tant que metteur au point en
font un redoutable adversaire.
Il remporte encore un énième titre 350cc en 1965, mais bute sur les
pilotes Yamaha, constructeur japonais rival. Pour l’exercice 1966,
il se lance un nouveau défi : aller chercher la couronne en 500cc,
la seule catégorie dans laquelle il ne s’était pas imposé. La
nouvelle quatre cylindres Honda est affûtée et Redman écrit
l’histoire à Hockenheim. Il triomphe de
Giacomo Agostini, et il s’agit de la première victoire
d’un constructeur non-européen en 500cc, comme la première défaite
d’une MV Agusta à la régulière depuis 1957 !
Ce jour marque un tournant dans le sport moto. Suzuki et Honda ont
remporté toutes les courses de la journée (sauf les side-cars), une
première pour l’archipel nippon.
À Assen, le Rhodésien récidive. Il bat de nouveau Agostini, alors
que Hailwood chute. Jim est assurément dans la course au
titre. Mais en Belgique, le sort en décide autrement. Sous
les trombes d’eau wallonnes, Jim chute dès le premier tour et se
casse le bras. Cette blessure devait l’éclipser des paddocks
pendant quelques temps, mais en réalité, jamais Jim Redman ne
reposa ses roues sur une piste du mondial. Il décida de
prendre sa retraite et de retourner en Rhodésie vivre des jours
heureux.
Difficile de lui reprocher quoi que ce soit. Redman avait tout
gagné. Nous sommes en présence d’un grand Homme titré à six
reprises, et vainqueur de courses dans quatre catégories
différentes (45 au total). MotoGP Legend légitime,
il est actuellement l’un des plus vieux champions du monde encore
en vie, à 91 ans. Difficile d’imaginer Honda sans lui; la
marque ailée n’aurait sans doute pas le même palmarès et surtout,
la même aura.
Connaissiez-vous l’histoire de Jim Redman ? Dites-le
nous en commentaires !
Photo de couverture : ANEFO