Dans cette série d’articles, nous sommes déjà revenus
sur le débat concernant le plus grand pilote français.
Beaucoup peuvent prétendre à ce titre : Fabio
Quartararo, Christian Sarron ou encore
Alain Michel, auquel nous avons dédié une
rétrospective il y a quelques jours. Ainsi, pour le 500e
article, nous étudions une autre légende, qui est peut-être
l’élu. Accrochez-vous, car l’histoire de Jacques
Collot risque de vous surprendre. Aujourd’hui oublié de la
mémoire collective, sa carrière sportive – et plus largement sa vie
– est empreinte de grandeur.
À la découverte de son profil, nous n’y croyons pas tant son
histoire est invraisemblable. Tout débute en 1923, à Vesoul,
préfecture de la Haute-Saône en Franche-Comté. Nous sommes dans
l’une des régions les moins animées par les sports mécaniques. Elle
reste imperméable à la multiplication des évènements majeurs sur le
territoire français. Alors qu’il fait ses armes en tant que
mécanicien, aidé par le garage Terrot de ses
parents, la Seconde Guerre mondiale éclate. Son frère Jean, 22 ans,
est mobilisé. Malheureusement, un terrible accident de
side-car lui coûte la vie dans le Nord de la France en
1940.
La Haute-Saône, et plus largement la
Franche-Comté, ont été le berceau de grands
mouvements de résistance, et Collot, après la mort de son frère,
n’hésite pas à s’y engager. Son action devient rapidement très
importante. Il passe d’affiches de propagande arrachées au
renseignement puis, à l’établissement d’un maquis autour de Vesoul.
Sous la direction de l’état major des Forces françaises de
l’intérieur, son rôle grandit. Présent au défilé dans
Vesoul pour célébrer la fin du conflit, il est décoré de la croix
de guerre avec étoile de vermeil pour son rôle déterminant au
niveau local.
Entre temps, il avait ajouté une autre capacité à son arsenal.
Spéléologue hors-pair, il découvre même une chambre funéraire
jonchée de vases datant de l’âge du bronze. Ses rapports
archéologiques, très pertinents, sont repris et publiés dans une
revue spécialisée.
Et la moto dans tout ça ? Il est vrai que sa
biographie est tellement dense que nous en oublions presque la
compétition. Son expérience débuta à l’adolescence, où il fut
envoyé par ses parents du côté de Dijon pour travailler à l’usine
Terrot. Revenu au domicile familial après la libération, il s’offre
sa première machine prête à écumer les circuits ; une
Magnat-Debon 500cc. Ses premières sorties sont
marquées par la malchance. Mais sur les grilles, il retrouve
fréquemment Jean Behra, avant que le niçois débute
sa carrière automobile avec le succès qu’on lui connaît (pilote
officiel Maserati en Formule 1 dans les années 1950, entre
autres).
Toujours en 1947, il se présente au départ de sa première grande
course, du côté de Montlhéry. Encore victime d’une panne mécanique,
il est cependant salué par la presse. En 1948, il s’affirme comme
l’un des pilotes du moment, avec une magnifique victoire au Grand
Prix de Nice, aussi couru par
Fergus Anderson (double champion du monde 350cc) ainsi
qu’Enrico Lorenzetti (champion du monde 250cc
1951), tous deux pilotes officiels Moto Guzzi.
Cette fois, Collot avait réussi à se doter d’une
Norton auprès de l’importateur français, qu’il
avait impressionné une année plus tôt. Par la suite, il ne fait que
confirmer son grand talent, à savoir celui d’un des meilleurs
pilotes européens en catégorie 500cc, avant même la création du
mondial.
En 1949 et 1950, il joue toujours devant, et triomphe à Vesoul pour
la première course organisée aux abords de la ville.
Jacques court où bon lui semble, ce qui lui permet
d’engranger des victoires d’importance en France. Mais en
cette même année 1950, sa vie manque de basculer. Le 11
novembre, sept spéléologues sont pris au piège dans le Trou de la
Creuse, à Blamont, une petite bourgade du Doubs située à la
frontière Suisse. L’eau monte, et Jacques Collot, alerté
et heureusement dans le coin, se rend immédiatement sur les lieux.
Sans se poser de question, notre champion se jette à l’eau et se
débat comme un beau diable pour faire remonter les prisonniers de
l’intempérie. Malheureusement, la crue a raison de son courage, et
six d’entre eux périssent dans des conditions atroces. Jusqu’à
aujourd’hui, il s’agit de la pire catastrophe spéléologique de
toute l’histoire de France. C’est à la suite de l’incident que le
plan ORSEC (Organisation de la Réponse de Sécurité
Civile) fut mis en place. Bien qu’il n’ait pu sauver personne de
ses mains, sa grandeur dans la débâcle fut largement remarquée par
les observateurs présents en ce triste jour.
Puis, sa carrière continue dans une toute autre dimension, mais rassurez-vous, de manière toujours aussi abracadabrantesque. Alors rendez-vous demain, même heure, pour la découvrir. Dites-nous ce que vous avez pensé de cette rétrospective en commentaires !
Photo de couverture : Larcher