Aujourd’hui, penchons nous sur l’un des principaux
artisans de l’époque dorée
des side-cars, à savoir le Néerlandais Egbert Streuer.
Son son look unique tout droit sorti des seventies a marqué toute
une époque, aujourd’hui trop souvent oubliée.
Né en 1954, sa carrière sur trois roue débute en 1975 sur les
fameux attelages BMW. La firme bavaroise dominait le championnat du
monde depuis les années 1950, mais doucement, les habitudes
changeaient tout comme les forces en présence. L’ère Deubel
était terminée en Grands Prix, mais les Allemands conservaient la
mainmise sur le championnat. Ainsi, Streuer et son
coéquipier Johan van der Kaap gravissent les
échelons au niveau national et sont titrés en 1978 sur un
Schmid–Yamaha. En cette même année, il réalisent leurs début en
mondial. La catégorie est très respectée dans le paddock, et
nombreux sont les fans à attendre la fin des courses deux-roues
pour voir évoluer ces engins un peu étranges.
Contrairement à Alain Michel, par exemple, l’apprentissage est plus
long pour Egbert Streuer. Pendant plusieurs
années, il monte en puissance avec van der Kaap mais ce dernier
prend sa retraite à la fin de l’année 1980. L’équipe était
désormais dotée d’un LCR (pour Louis
Christen Racing), la référence suisse ultime dans le monde
du side-car.
Streuer embarque différents singes au cours de l’année 1981, et
c’est un an plus tard que se présente Bernard
Schnieders à ce poste. À Silverstone, la sauce prend enfin
; la paire de Néerlandais s’impose pour la première fois. À
l’époque, il faut faire face à Rolf Biland. Le Suisse, peut-être le
meilleur pilote de side-car de tous les temps, est un adversaire
coriace. En 1983, ce dernier est titré devant nos deux larrons.
Puis, l’ère de domination débute. En 1984, Streuer et Schnieders
sont intouchables et profitent de l’absence du binôme
Biland/Waltisperg sur la majorité des courses de
l’année. Werner Schwärzel, champion du monde 1982,
ne peut rien faire. Désormais couronnés, ils repartent pour
un tour.
Cette fois, c’est beaucoup plus serré. Biland
décroché, Schwärzel pousse et contient Streuer. Au
fil de la saison, les deux tandems n’arrivent pas à se départager.
Tout se joue en Suède, du côté de Anderstorp. Si l’attention est
focalisée sur l’exploit de
Freddie Spencer, qui valide ici son mythique doublé
250cc/500cc avec une nouvelle victoire, personne n’en
oublie le dénouement insoutenable en side-car. Streuer est plus
rapide, c’est certain, et bénéficie de la meilleure dynamique… mais
pointe derrière au classement. Seul objectif : la
victoire. Heureusement, il réalisent une course sans
anicroche et s’imposent, tandis que Schwärzel/Buck
sont deuxièmes. Égalité parfaite, 73 points partout. Mais grâce à
une meilleure vitesse intrinsèque, les Néerlandais sont de nouveaux
champions du monde.
En 1986, nouveau défi.
Alain Michel et Jean-Marc
Fresc, le duo français qui va bien, monte encore en
puissance. Là encore, impossible de départager les deux équipages
sur toute une saison. La finale se profile à
Hockenheim.
Coup de théâtre : le casque d’Alain Michel, alors en tête du
championnat, a mal été rattaché après une interview donnée avant le
départ pour TF1 ! Se démenant comme un beau diable,
les français terminent 5e mais ne peuvent rien faire contre la
tornade Egbert Streuer, qui n’en demande pas tant.
De nouveau a égalité, les deux formations sont départagées au
nombre de victoires et une fois de plus, les Néerlandais en
profitent.
Mais les bonnes choses ne durent qu’un temps.
Désormais, il y a un nouveau shérif en ville, Steve Webster. Le
Britannique éteint la saison 1987, mais laisse une seule victoire
au duo Streuer/Schnieders, la plus belle de toute, au TT
Assen. Malgré qu’il soit le meilleur pilote
« moto » de l’histoire du pays, il ne s’était encore
jamais imposé dans la «
cathédrale ».
Les saisons se ressemblent, et nouveau coup dur fin 1988, quand
Bernard Schnieders décide de quitter le navire.
Geral de Haas le remplace. Jusqu’en 1991, Egbert Streuer reste fort
et candidat à la victoire mais il lui manque toujours un poil de
vitesse pour prendre les rennes du mondial. Même avec un moteur
Krauser en 1991, il fait toujours figure d’épouvantail sur le
podium du général, à 37 ans passé.
Puis, en 1992, il raccroche le cuir… sur une victoire, ce
qui n’est pas si courant. Désormais accompagné par
Peter Brown, il remporte un 22e succès en Afrique
du Sud même si la situation n’est plus viable. Les side-cars
n’intéressent plus le public comme avant dans cette nouvelle ère
des Grands Prix, et les sponsors se font rares. D’ailleurs, quatre
ans plus tard, la disparition de la catégorie dans le cadre du
championnat du monde moto est actée.
Même s’il n’a pas le palmarès d’un Biland, Egbert Streuer était une
grande figure du paddock, connu pour ses qualités de metteur au
point et son pilotage soigné. Rendez-vous compte, il n’a connu que
deux abandons dans toute sa carrière au plus haut niveau. Personne
n’a oublié le fameux sponsor « Lucky
Streuer », en référence au cigarettier. Comme souvent
dans la discipline, il transmit la passion à son fils
Bennie, qui réussit à décrocher le titre mondial
en 2015 accompagné par Geert Koerts.
Connaissiez-vous ce pilote ? Dites-le nous en
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Photo de couverture : ANEFO, avec Streuer à droite.