Garelli figure au panthéon des marques
oubliées. Pourtant, cette dernière connut de grands moments de
gloire et plusieurs titres mondiaux d’envergure. De la fondation à
nos jours, voici la riche histoire de la firme italienne.
Le récit commence en 1911, il y a plus de cent ans. Alberto
Garelli, ingénieur spécialisé dans le deux-temps, ne
trouve plus son compte chez Fiat. En effet, ce
dernier travaillait pour le compte de la mythique entreprise, qui,
au bout du compte, n’était pas tant séduite par le deux-temps.
À 25 ans seulement, ce dernier ne baissa pas les bras, loin de là.
Pendant plusieurs années, il continua le développement de son
propre moteur, persuadé que son idée irait loin. Comme quoi, la
détermination aide grandement le génie d’un
homme.
Ces travaux le poussèrent à créer la première 350cc de l’histoire.
Une véritable prouesse, qui fut récompensée par de nombreux prix;
l’armée royale elle-même fut impressionnée à l’occasion d’un
concours dédié à l’innovation.
Garelli s’inscrit dans cette lignée des surdoués,
sorciers de la mécanique. En 1919, il lance officiellement sa
propre marque, à son nom. Durant l’entre-deux-guerres, plusieurs
mythes italiens pilotèrent ses créations, d’Achille
Varzi à Tazio Nuvolari.
Après la Seconde Guerre mondiale, les ambitions de l’entreprise
s’amenuisèrent. Conscient du contexte difficile en Italie et en
Europe, Garelli se concentra sur les petites
cylindrées (125cc maximum) afin de devenir populaire. Le scooter
Capri, on ne peut plus italien, illustre ce virement de bord.
L’âme de la compétition ne quitte pas une marque. Jamais.
Garelli décida de se lancer dans la course moto,
et pas n’importe comment. Le mondial, s’il vous plaît. Le décès du
fondateur de Minarelli (champion du monde 125cc
1981) incita Garelli à racheter le service course,
s’assurant une bonne organisation et gestion d’entrée en 1982.
La réputation de la marque n’était plus à faire. Cerise sur le
gâteau, Ángel Nieto, ex-officiel Minarelli, est
récupéré par la même occasion. Le titre 125cc est, par conséquent,
acquis sans la moindre difficulté.
L’empire s’étendit puisque Garelli racheta
Kreidler en cette même année, autre force majeure
du championnat en petites catégories. Avec du matériel de pointe et
un service course au top de sa forme, Nieto
réalise le doublé en 1983, puis le triplé en 1984. Ces trois sacres
consécutifs font entrer l’entreprise de Sesto San Giovanni
dans la légende.
C’est Fausto Gresini, qui reprit le flambeau en
1985. Nouveau titre, empoché avec une large avance sur la
concurrence. L’année suivante, il termina deuxième, derrière son
coéquipier Luca Cadalora, lui
aussi sur Garelli. En 1987, c’est l’apothéose.
Gresini, avide de vengeance, remporta dix
courses sur onze (dix d’affilé) et s’adjugea le titre
125cc avec 62 points d’avance sur son dauphin.
Six titres pilotes de rang en catégorie 125cc, et même un titre constructeur 50cc en passant. Un véritable règne. Après ce brillant épisode, la marque cessera lentement son implication en Grands Prix. Une bien triste nouvelle, qui profita cependant au spectacle.
Garelli fut rachetée par Paolo
Berlusconi à la fin des années 1990, jusqu’à ne plus avoir
de rapport à la compétition. En 2019, le centenaire fut célébré en
collaboration avec Paolo Simoncelli, et des
modèles limités « Sic58 » furent
produits. Cinq modèles sont encore en production, avec une identité
portée sur l’électrique et le déplacement urbain.
Comme quoi, un banal scooter électrique croisé dans la rue peut
être porteur de cent ans d’histoire et de trophées mondiaux. Dans
les années 1980, nul ne pouvait les toucher. Une hégémonie parfaite
qui n’a malheureusement pu être admirée par son fondateur,
décédé en 1968.
Photo de couverture : Mike Schinkel