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Fabio Quartararo moto

La saison 2019 ne fut pas la plus passionnante. La domination outrancière de Marc Márquez empêcha tout spectateur de rêver d’une course au titre, mais pourtant, l’éclosion d’un nouveau prodige fit souffler un vent de fraîcheur sur notre championnat favori, surtout en France. La première année de Fabio Quartararo, pourtant sur une moto satellite, est dans toutes les mémoires ; alors aujourd’hui, penchons-nous sur son quasi-exploit de Misano.

 

Marc Márquez, le génie en action

 

En arrivant en Émilie-Romagne, le suspense pour le titre n’est plus. Certes, Marc Márquez avait chuté lors du Grand Prix des Amériques, pourtant l’un de ses rendez-vous fétiches, mais même pas par sa faute. Hormis cette déconvenue, il n’avait jamais terminé au-delà de la deuxième position, une statistique affolante. Plus qu’en 2014, l’Espagnol roule sur la discipline. Comme s’il ne pouvait rien lui arriver, il multipliait les sauvetages en catastrophe ; du vrai MotoGP champagne, avec des chutes lors des essais, mais des coups de maître le dimanche. Avant de poser ses roue sur le tracé de Misano, il compte déjà six victoires, huit poles et sept meilleurs tours en course en seulement douze manches.

 

Marc Márquez, réellement intouchable ? Photo : Michelin Motorsport

 

Cependant, on note un « point faible » dans son jeu. Entre guillemets, bien sûr, car à 20,8 points de moyenne par course, tout est relatif. Il s’agit de sa capacité à vaincre en duel, un défaut qu’il traîne depuis ses années Moto2. Les plus sages d’entre vous se rappelleront de ce duel magique entre lui et Scott Redding lors du Grand Prix de Grande-Bretagne 2012. Par le fait, les deux GP précédents se sont terminés de la plus cruelle des manières ; battu sur la ligne. D’abord, par Andrea Dovizioso en Autriche. L’Italien, pas connu pour son incisivité, avait effectué une manœuvre d’un autre temps dans le tout dernier virage pour s’imposer. Puis, Álex Rins lui fit la leçon à Silverstone, grâce à un bijou de dépassement qui sentait le QI course à plein nez. Pas la meilleure des dynamiques pour courir à Misano, mais ça reste Marc Márquez.

 

Rookie de l’année

 

Le cas de Fabio est différent. Pour sa première année en MotoGP, Petronas SRT mise sur deux talents bruts malheureusement plus dans l’ère du temps. Franco Morbidelli, champion du monde Moto2 2017 mais qui sortait d’une saison difficile avec Honda MarcVDS aux côtés de Tom Lüthi (l’aviez vous en tête?), et de l’autre, Fabio Quartararo. Le Français, annoncé comme un prodige depuis son plus jeune âge, avait connu des débuts fracassants en Moto3 lors de la saison 2014. Le tout après avoir dominé le championnat espagnol. Puis, le soufflé est retombé. Peu importe l’équipe, en Moto3 comme en Moto2, le niçois n’arrivait pas à faire la différence. Chez Speed Up en 2018, c’était mieux. Il prit une victoire avec l’équipe (la deuxième au Japon lui fut retirée pour pression non conforme), mais cela restait maigre pour une montée en MotoGP. La formation malaisienne prend un risque certain, et peu de gens, au sein du public français, l’imaginent jouer ne serait-ce qu’un podium, notamment pour sa première année.

Sur une Yamaha YZR-M1 datée et bridée, « El Diablo » se révèle. Tour le plus rapide en course dès le Qatar, et première pole à Jerez, la plus jeune de toute l’histoire de la catégorie, à 20 ans et 14 jours. Dès lors, la victoire n’est plus qu’une question de temps. Deuxième en Catalogne, troisième aux Pays-Bas, puis troisième en Autriche ; après un abandon à Silverstone, l’heure est à la revanche du côté de Misano.
Le week-end commence fort

Première place en FP1, d’entrée. Fabio Quartararo l’avoua plus tard : lors de sa première année, il voulait être en tête de toutes les séances, et ça n’a pas manqué. Outre un excellent pilote avec l’image de « petit poucet » au vu de son matériel, on découvre aussi une grosse personnalité, dans l’ère du temps, presque arrogante. Ça n’est pas là un reproche ; d’abord, il était jeune, et puis, cela ne fait jamais de mal au plus haut niveau.

 

Fabio Quartararo moto

El Diablo en vrai diablotin. Photo : Michelin Motorsport

 

Il faut faire attention à Maverick Viñales, officiel Yamaha toujours très à l’aise ici, mais aussi à son coéquipier Valentino Rossi, dont il est inutile de rappeler les exploits en Italie. Certes, il a plus de mal, mais gravite toujours autour du top 5 à 40 ans. Et bien sûr, Marc Márquez.

Maverick Viñales est devant en FP2, mais Quarta’ reprend son bien en FP3. Les séances qui comptent s’annoncent explosives. Juste après l’élimination de Pecco Bagnaia en Q1 (que c’est loin!) au profit de Johann Zarco et Joan Mir, la Q2 prend place. À vrai dire, ça n’est presque pas disputé ; un Maverick Viñales des grands jours établit un temps canon, en 1’32.265, soit 0,3 s plus rapide que le deuxième… Pol Espargaró ! Fabio Quartararo est troisième, Marc Márquez, cinquième. Pas de Sprint ; le dimanche, à 14 heures précises, l’heure est au règlement de compte.

 

Fabio Quartararo choque la planète moto

 

L’on peut légitimement s’attendre à une envolée de « Top Gun » ; il a l’habitude de gagner de cette manière. D’autant plus que pour une fois, il prend un bon départ. Mais c’est sans compter sur Fabio. Le Français ne fait qu’une bouchée du petit frère Espargaró à l’extinction des feux, et met tout de suite la pression sur Maverick. Derrière, Andrea Dovizioso, pourtant acteur du championnat, est en perdition. Pas besoin de s’en préoccuper. Márquez ne connaît pas le meilleur départ de sa vie, mais rattrape rapidement Franco Morbidelli, dans le top 3 en début de course.

Au bout de trois tours seulement, Quartararo passe à l’offensive. Le circuit offre pas mal de possibilités de dépassement, mais le n°20 choisit l’une des plus complexes ; les cassures sur la section de retour. Ces trois virages à droite, très rapides, ne pardonnent pas. Pourtant, Fabio s’engouffre dans le premier et mange son vis-à-vis. Objectif : creuser l’écart. Marc Márquez observe attentivement. Il sait qu’il ne faut pas laisser le rookie s’échapper. Quelques virages plus tard, il passe en force sur l’officiel Yamaha dans la fameuse Curva del Carro, le dernier tournant arrêté du circuit qui offre une franche possibilité de doubler. Immédiatement, il part chasser le Français.

La situation reste stable un long moment. À distance, Marc attend. Lui peut aller chercher cette demi-seconde en un tour, comme il l’a fait au Grand Prix d’Australie 2015. Dans le même temps, on note la chute de Bagnaia, puis d’Álex Rins, ainsi que celles de Michele Pirro et Cal Crutchlow. Valentino Rossi et Franco Morbidelli se livrent une belle passe d’armes sur leurs terres, mais revenons devant. La fin de course approche à grands pas.

À l’entame du dernier tour, Fabio Quartararo est toujours en tête. Marc Márquez est revenu dans ses échappements, et doit maintenant vaincre les démons de Spielberg et Silverstone. Il tente un freinage tardif dans le premier virage ; ça passe. Dans le n°4, « El Diablo » réplique, une manœuvre intelligente. Ce tournant conditionne les deux prochaines courbes, une à droite, une à gauche, et aussi, la ligne droite suivante.

Mais la puissance de la Honda RC213V lui offre un avantage non négligeable dans ce petit bout droit ; au freinage suivant, l’un des plus difficiles du calendrier, Márquez reprend le dessus. Fabio peut-il refaire le même coup qu’à Viñales dans les cassures ? Non. L’Espagnol voit venir, et défend. Tout se jouera à Carro, ce fameux virage à droite, à l’angle, qui passe très lentement.

Fabio a deux solutions ; opter pour le blockpass, ou privilégier la sortie. Voyant que Marc entre très intérieur dans la courbe, il élargit, pour enrouler au maximum et ressortir comme une balle, en espérant recroiser avant le prochain tournant. Mais son plan s’enraye ; en choisissant sa trajectoire défensive, Márquez devient trop lent au point de corde. Quand le pilote Yamaha veut recouper, il le trouve sur son passage. Quarta’ doit redresser pour éviter le contact, et perd sa chance.

Plus que deux virages à gauche relativement rapides, et c’est l’arrivée. Marc Márquez triomphe, et notre Fabio national se prend la tête à deux mains. Certes, il n’avait pas fait le choix le plus osé, mais il n’était qu’un rookie qui venait de croiser le fer avec l’un des plus grands pilotes de tous les temps. Il n’avait pas à rougir.

 

Marc Marquez en revanchard. Photo : Michelin Motorsport

 

La fin de saison donne raison à Marc Márquez. En continuant sa série de premières et deuxièmes places, il s’adjuge du titre mondial, son huitième – et le dernier à l’heure où ces lignes sont écrites. Fabio Quartararo, lui, connaît trois autres deuxièmes places, dont une particulièrement douloureuse en Thaïlande ; un autre duel perdu contre sa majesté.

Quel souvenir gardez-vous de cette course ? Dites-le nous en commentaires !

Photo de couverture : Michelin Motorsport

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