Aujourd’hui tombé en désuétude, le Daytona 200
était autrefois l’une des épreuves majeures du monde motocycliste.
Coup de projecteur sur cette épreuve mythique, disputée sous le
plein soleil de Floride.
Nous voilà en 1937. Les courses sur terre sont légion aux
États-Unis et se développent un peu partout sur le territoire.
Bill France Sr, promoteur, est très intéressé par
l’idée. C’est en voyant une course de 200 miles (321,5 km) disputée
à Savannah en Géorgie que lui vient l’idée de rapatrier le concept
en Floride
Il faut dire que l’homme est un businessman visionnaire. C’est lui,
qui, en 1948, fonde la NASCAR, catégorie la plus
populaire outre-atlantique. « Big Bill » veut
redonner à Daytona ses lettres de noblesse : Au début du XXe
siècle, la ville était un lieu important pour les records de
vitesse, mais se faisait rapidement rattraper par Bonneville et son
lac salé, de l’autre côté du pays.
Le Savannah 200 se déroule donc, pour la première fois, sur les
plages de Daytona. Le succès est immédiat, ce qui pousse France à
penser plus grand. Pour l’anecdote, c’est Ed
Kretz, sur Indian Scout, qui triomphe de
la toute première édition.
En 1941 – dernière édition avant une coupure de cinq ans en
raison de la Seconde Guerre mondiale -, le canadien Billy
Mathews remporte le premier de ses deux succès, détrônant
pour la première fois les américains.
Bill France change le tracé mais prend la décision de rester sur le
sable jusqu’à la fin des années 1950. Après avoir racheté un
terrain non loin de l’aéroport du coin, il fait débuter la
construction d’un ovale de quatre kilomètres, avec de larges
virages relevés. En 1959, le Daytona Superspeedway
sort de terre.
Sentant le vent tourner, il décide de déplacer le Daytona 200 sur
le nouveau circuit, pavé. Ce dernier compte également un circuit
interne, l’infield (sur lequel est disputé les 24 Heures de
Daytona chaque année), afin de ne pas offrir un pauvre
spectacle. La décision est prise en 1961, non sans controverse.
Les fans ne se précipitent pas au portillon, eux qui étaient
habitués au bon vieux dirt track à l’américaine. Roger
Raiman, sur Harley-Davidson, devient
ainsi le premier vainqueur du Daytona 200 moderne.
Les années passent, et l’affluence n’est toujours pas au
rendez-vous. Cependant, le début des années 1970 donne raison à Big
Bill. L’homme d’affaire multiplie les démarches commerciales et
crée la Daytona Beach Bike Week en 1971, événement
annuel rassemblant plus de 500 000 motards. Il y
ajoute également un circuit de motocross, monté de toute pièce sur
le plat; ce sont les début du Supercross. Par ailleurs, le
championnat US de SX passe toujours à Daytona chaque année, la
manche étant considérée comme la plus mythique du championnat.
Les tribunes se remplissent progressivement. En 1973, un vent glacé
s’abat sur la Floride. Jarno
Saarinen, jeune finlandais bourré de talent, écrase
les américains sur leur territoire en imposant son nouveau style de
pilotage. Il devient le premier européen à remporter la course, un
an avant le grand Giacomo Agostini. La venue de superstars fait
exploser l’évènement, qui devient par le fait international.
C’est ici même que Johnny
Cecotto se révéla aux yeux du monde en 1976. Le Vénézuélien,
parti dernier, remonta jusqu’en troisième position en écrasant le
gratin du sport moto. Quelle ne fut pas la réaction du roi Ago,
quand il vit une simple Yamaha TZ750 le déposer ! Un grand moment
d’histoire, qui propulsa Johnny en mondial.
Par la suite, l’évènement fut monopolisé par les cadors américains,
Kenny Roberts, Wayne Rainey,
Kevin Schwantz et Steve Baker en
tête. La seule victoire française est signée Patrick Pons, qui, en
plein milieu du règne, s’offrit une magnifique victoire.
Malheureusement, la dangerosité du circuit grandissante avec le
progrès technique (mis en évidence par l’accident de Barry
Sheene en 1975) força les pilotes de renom à s’éloigner de
l’épreuve au début des années 1990. Scott Russell, champion du
monde WSBK, en fit un affaire personnelle. Avec cinq succès (1992,
1994, 1995, 1997 et 1998), « Mr. Daytona » en est
le recordman.
L’introduction de la catégorie « Formula
Xtreme » en lieu et place des Superbike pour 2005
finit d’achever la course légendaire. Il s’agit désormais de
Supersport, et donc de pilotes moins connu. La victoire de
Chaz Davies en 2008 marque la dernière d’un
Européen, avant que l’épreuve ne redevienne américaine, comme au
début.
Non organisée en 2020 pour cause de Covid-19, Brandon
Paasch remporta la course en ce début d’année dans
l’anonymat le plus total. Il est vraiment dommage que les courses
annexes n’aient plus lieu, quand les pilotes de Grands Prix
antérieurs aux années 1990 devaient courir sur tous les tableaux.
De nos jours, seules les 8 Heures de Suzuka
subsistent – grâce au marché japonais – en mettant en scène des
pilotes mondialement connus.
Photo de couverture : Randy_Cleek Tsantiago