Régulièrement, on peut lire (avec regret) que Kawasaki ne reviendra pas dans la catégorie reine des Grands Prix. La marque japonaise y a pourtant été active à deux reprises, et vous connaissez le proverbe…

Cependant, son parcours en GP500 puis en MotoGP ne plaide pas en faveur d’un retour, malgré des éléments vraiment très intéressants.

Après le premier chapitre sur la KR500, puis celui sur la genèse de la Kawasaki Ninja ZX-RR, et celui sur la Kawasaki Ninja ZX-RR MotoGP 1000cc, nous vous proposons donc de revisiter les dernières années vertes en MotoGP.


4/ La Kawasaki Ninja ZX-RR MotoGP 800cc en compétition

Avec le passage de 1000 à 800cc, cette saison 2007 débute sous le signe de l’incertitude totale.

Prenons donc le temps d’écouter la parole à Ichiro Yoda, qui a rejoint le projet MotoGP de Kawasaki pour la saison 2005 en apportant avec lui plus de 20 ans d’expérience en ingénierie de Grand Prix après avoir débuté sa carrière chez Yamaha.

L’ingénieur japonais a été lié à 3 titres mondiaux pour Iwata (celui de Kenny Roberts Senior obtenu avec la 0W61 et ceux en 250cc de Carlos Lavado et Olivier Jacque) mais a été licencié au profit de Masao Furusawa pour avoir conçu le moteur de la M1 4-temps 5 soupapes de Max Biaggi avec une cylindrée de seulement 890cc alors que la Honda RC211V utilisait logiquement un moteur V5 de 990cc.

 

 

 

Pendant les années 2005-2006, l’ingénieur japonais a donc été le moteur du développement du 990cc Ninja ZX-RR de Kawasaki, une période qui a culminé avec les podiums d’Olivier Jacque et Shinya Nakano respectivement à Shanghai et Assen.

Pour la saison 2007, Ichiro Yoda prend un nouveau rôle dans une équipe Kawasaki Racing Team réorganisée entièrement au Japon (y compris la fabrication des châssis). Ayant été chargé en 2006 de gérer le développement de la Ninja ZX-RR 800cc que Randy de Puniet et Olivier Jacque utiliseront pour la première fois cette saison, une promotion au poste de directeur de course signifie que, cette année, Ichiro Yoda sera responsable de tous les aspects des activités de course de Kawasaki en MotoGP.

 

 

Il y a eu de grands changements pour le Kawasaki Racing Team depuis que Kawasaki a pris la décision de ramener l’équipe « en interne » pour la saison 2007. Dans le cadre de cette réorganisation, vous avez été promu au poste de directeur de course, mais comment cela a-t-il changé votre rôle pour la saison à venir ?

« Maintenant que Kawasaki a intégré son équipe MotoGP, mon rôle a considérablement changé. Notre responsable technique, Naoya Kaneko, sera désormais responsable des problèmes techniques, tandis que je m’occuperai davantage des aspects commerciaux de la gestion d’une équipe MotoGP, tels que le contrôle budgétaire. Je travaillerai également en étroite collaboration avec notre directeur de la compétition, Michael Bartholemy, dans d’autres domaines, tels que les ressources humaines et la logistique. C’est un grand changement pour moi, mais j’attends avec impatience mon nouveau rôle avec l’équipe. Ma plus grande tâche cette saison sera de mettre en place la nouvelle façon de fonctionner en tant qu’équipe interne de l’usine, car ce sera différent de l’année dernière. Cette année, nous nous concentrons uniquement sur les résultats et le développement. »

Serez-vous basé au Japon cette saison à venir, ou allez-vous déménager en Europe pour être plus proche de la base de l’équipe aux Pays-Bas ?

«Je serai basé au siège de Kawasaki Motors Europe à Amsterdam, à environ deux heures de route des bureaux de l’équipe à Heerlen. »

Votre nouveau rôle vous permettra-t-il toujours de jouer un rôle actif dans le développement du Ninja ZX-RR ?

« Le développement se poursuivra au Japon, mais cela ne signifie pas que nous n’utiliserons pas de fournisseurs externes en Europe pour certains composants. Parce que je serai basé en Europe, je serai beaucoup mieux placé pour nous assurer que nous choisissons le meilleur fournisseur pour le travail, et que les composants répondent à nos exigences, tant en termes de qualité que de délai de livraison. Alors oui, je serai toujours impliqué dans le processus de développement. »

Quel que soit votre rôle, vous avez dirigé le développement de la nouvelle machine 800cc de Kawasaki la saison dernière. Au début du processus de développement, vous devez avoir eu une liste d’objectifs de conception, mais qu’est-ce qui était en haut de cette liste ?

« Nous savions depuis le début que nous devrions faire tourner le moteur 800cc plus fort et plus haut si nous devions libérer suffisamment de puissance pour être compétitifs. Nous avons calculé que nous aurions besoin de faire tourner la première évolution du nouveau moteur à 18 000 tr/min pour atteindre notre objectif de puissance et, à ce régime, un train de soupapes conventionnel, avec des ressorts de rappel, est inefficace. Notre première décision majeure a donc été de faire fonctionner un système de soupape pneumatique sur le nouveau moteur. Cela nous a permis non seulement d’atteindre notre objectif initial, mais nous donne également plus d’options pour l’avenir. »

Le système de rappel de soupapes pneumatique a-t-il été développé en interne par Kawasaki, ou la technologie a-t-elle été achetée à un fournisseur extérieur ?

« Cette technologie n’est pas largement utilisée dans l’industrie de la moto, nous avons donc dû faire appel à cette technologie d’un fournisseur extérieur (ndlr : Del West). Mais, comme beaucoup de gens l’ont découvert à leurs dépens par le passé, la technologie ne se transfère pas directement. De nombreuses modifications sont nécessaires pour prendre ce qui est effectivement une technologie automobile et l’appliquer aux caractéristiques très particulières d’une moto de course. »

Le système pneumatique a donc été identifié comme présentant un avantage significatif pour les performances de la moto, mais quels effets cela a-t-il eu sur la conception et la mise en œuvre du reste de la moto ?

« Bien sûr, nous n’avons pas seulement conçu la culasse en premier, puis réfléchi au reste de la moto par la suite, car le tout doit fonctionner ensemble comme un ensemble, et chaque composant majeur a un effet direct sur les autres composants qui composent ce package. Par exemple, nous avons décidé d’utiliser une culasse pneumatique en raison de l’augmentation du régime, mais cela a eu un effet sur le reste de la moto. La culasse pneumatique est plus légère qu’une culasse conventionnelle, et elle est également physiquement plus petite. Cela signifie que le moteur est plus compact, mais il modifie également le centre de gravité par rapport à un moteur qui utilise une culasse conventionnelle. C’est un grand changement, et cela se reflète dans d’autres domaines de la moto, qui ont dû être conçus spécifiquement pour compléter le nouveau moteur. »

Il semble que la centralisation des masses soit actuellement un objectif de développement commun, mais qu’obtenez-vous en centralisant la masse de la moto ?

« La centralisation de masses est le processus de centrage de la masse de la moto en un seul endroit. En centralisant la masse, puis en positionnant cette masse au bon endroit dans le cadre, vous produisez une moto plus agile et plus facile à faire tourner pour le pilote, surtout à grande vitesse. Un virage rapide et précis est essentiel à un bon temps au tour, en particulier avec les nouvelles machines 800cc. L’autre avantage de la centralisation des masses est la stabilité au freinage, ce qui est également important en termes de temps au tour. »

Le support d’amortisseur arrière est peu orthodoxe sur la nouvelle Kawasaki 800cc. A-t-il également été conçu pour améliorer la centralisation des masses ?

« Bien sûr, l’une des raisons pour lesquelles nous utilisons un support peu orthodoxe pour l’amortisseur arrière, en le faisant fonctionner à l’envers dans le châssis, est qu’il place la majorité du poids plus près de la masse centrale du moteur, mais la principale raison d’utiliser cette méthode de montage de l’amortisseur arrière était destiné à faciliter l’entretien. Faire fonctionner l’amortisseur inversé rend les changements de ressort et de réglages beaucoup plus faciles et plus rapides à faire lorsque la pression est là, pendant les essais et les qualifications. »

Combien de pièces la nouvelle Ninja ZX-RR 800cc a-t-elle en commun avec l’ancienne version 990cc ?

« La machine 800cc est une évolution de la moto 990cc, en ce sens que nous avons pris ce que nous avons appris au cours des quatre dernières années et avons intégré ces leçons dans la conception de la nouvelle machine. Oui, il reste quelques pièces de la machine 990cc, comme les trains roulants et la carrosserie, mais les principaux composants comme le moteur et le châssis sont tous nouveaux. Parce que le moteur a tellement changé avec l’utilisation de la culasse pneumatique, il n’aurait pas été possible de changer simplement les supports du moteur et d’utiliser l’ancien cadre. La moto doit fonctionner comme un ensemble, et pour y parvenir, nous avons essentiellement dû concevoir la nouvelle moto à partir de zéro. »

Beaucoup d’efforts ont été consacrés au contrôle de la puissance des machines ultra-puissantes de 990cc. Est-ce toujours le cas avec la machine de 800cc ou rencontrez-vous actuellement des problèmes différents ?

« Les motos 990 cm3 avaient tellement de puissance que beaucoup de notre temps de développement a été consacré à essayer de contrer la tendance à perdre l’adhérence à l’arrière en accélération. Une moto plus grosse pouvait apparaître assez nerveuse à l’accélération pour le pilote, et quand il perdait la traction arrière, il le faisait d’un coup. Les caractéristiques de la machine de 800cc sont telles qu’elle est plus facile à contrôler à l’accélérateur, et la transition entre l’adhérence et l’absence d’adhérence est à la fois plus douce et plus prévisible. Le moteur est la clé pour l’ensemble du système. Parce que le moteur est plus fluide avec la moto 800cc, cela signifie que l’ensemble du système est plus stable. Il est intéressant de noter que, malgré moins de puissance, Randy a été plus rapide qu’il ne l’a jamais été à Sepang lors de notre premier test là-bas. C’est parce qu’il a maintenant plus de contrôle sur la moto; peut-être qu’il sent qu’il a plus de marge de manœuvre à cause de ce contrôle, et cela lui permet de piloter la moto comme il veut le faire, plutôt que d’avoir son style de pilotage dicté par la puissance du moteur. »

Ce changement de style a également des implications sur la conception et la construction des pneus. Y aura-t-il un changement important de la part des fabricants de pneus cette saison ?

« Les motos de 800cc imposent des exigences différentes au pneu arrière par rapport aux machines de 990cc, ce qui signifie que nous verrons un changement dans les caractéristiques des pneus à mesure que les fabricants de pneus acquièrent une meilleure compréhension des nouvelles motos. Nous avons beaucoup confiance en Bridgestone. Cette année, ils soutiennent plus d’équipes que jamais, ce qui signifie qu’ils collectent beaucoup de données pendant les tests, et à partir de ces données, nous sommes convaincus qu’ils développeront rapidement des pneus spécialement conçus pour répondre aux caractéristiques des machines 800cc. Pour aider à accélérer le programme de développement de Bridgestone au cours de cette première année, nous avons de nombreux tests de pneus prévus pendant la saison après les week-ends de course. »

Les tests de pré-saison ont été très positifs, mais les tests et les courses peuvent être très différents. Quelles sont vos attentes pour Kawasaki pour la saison à venir et, plus important encore, quels sont vos objectifs en termes de résultats ?

« La Ninja ZX-RR 800cc que nous allons piloter cette saison est très nouvelle, donc notre première priorité doit être le développement continu de la moto. Mais nous avons également des objectifs spécifiques en termes de résultats. Je m’attends à ce que les deux coureurs disputent la pole position lors des qualifications et les podiums en course cette saison. Je pense qu’une première victoire dans la catégorie MotoGP pour Kawasaki est également un objectif réaliste pour nous cette année. Au championnat, je pense qu’une place dans le top 7 à la fin de la saison est une attente raisonnable pour nous. »

 

 

On le voit, comme à l’époque de la KR500, Kawasaki innove en utilisant pour la première fois un rappel pneumatique de soupapes, en même temps que Suzuki. Extérieurement, la ZX-RR 800cc arbore maintenant un splendide vert métallisé et dispose d’un échappement 4 dans 1.

 

 

 

 

 

Disons-le tout de suite, avec 108 points marqués au championnat, Randy de Puniet sera le leader incontestable de cette année 2007 pour Kawasaki, le pilote français offrant même une 2e place en qualification à Barcelone et une nouvelle 2e place en course au Grand Prix du Japon à la firme d’Akashi.

Mais revenons au début de la saison…

Malgré les 92 points inscrits par Shinya Nakano au terme de sa troisième année chez les verts, le natif de Chiba et résident de Barcelone décide de quitter Kawasaki qui est en pleine restructuration.

En effet, en novembre 2006, Kawasaki se sépare de Harald Eckl qui dirigeait son équipe MotoGP depuis 2002, en raison de sa « participation sérieuse aux activités MotoGP d’un concurrent ».  Il s’agissait alors de Ilmor, entreprise fondée en 1984, par le Suisse Mario Illien et le Britannique Paul Morgan, deux anciens ingénieurs de chez Cosworth, qui aligneront en 2007 la X3 en collaboration avec Eskil Suter… Mais avaient déjà fait rouler la moto au Portugal et à Valence.

Du coup, Kawasaki rompt également toute relation avec ce dernier et les cadres de la ZX-RR 2007 seront produits en interne alors que Michael Bartholemy est embauché pour remplacer Harald Eckl.

 

 

 

Directeur de course : Ichiro Yoda
Responsable compétition : Michael Bartholemy
Responsable technique : Naoya Kaneko
MotoGP Project Leader : Yoshimoto Matsuda
Ingénieur EFI : Danilo Casonato
Technicien EFI : Andrea Dosoli

 

 

Techniquement, la grosse nouveauté est la réduction de la catégorie MotoGP à 800cc. 

 

 

Entre toute nouvelle machine et équipe en restructuration, on ne se presse donc pas au portillon pour rouler pour les verts et, du coup, Olivier Jacque se voit promu du rôle de pilote d’essais à celui de pilote officiel aux côtés de Randy de Puniet.

 Malgré cette naissance troublée, la Kawasaki 800cc montre du potentiel entre les mains de Randy de Puniet, qui obtient son premier départ depuis la première ligne dès la 7e manche, à Barcelone.

 

 

 

En revanche, Olivier Jacque subit un début de saison difficile et accidenté, marquant des points dans une seule course, au Qatar, et revient au rôle de pilote de développement après avoir raté la course de Catalunya en raison d’une blessure.

Olivier Jacque : « Dès les premiers Grands Prix cette année, j’ai été victime de plusieurs chutes qui se sont souvent soldées par de graves blessures au dos, aux cervicales et à l’avant-bras droit. Je suis fatigué et diminué physiquement : j’ai beaucoup de mal à récupérer de mes blessures et je ne me sens plus assez performant pour rouler à haut niveau. J’ai beaucoup donné de moi-même dans ce sport, mais mon corps tire la sonnette d’alarme et il est peut-être temps de tourner la page. Évidemment, c’est une décision qui a été difficile à prendre, mais Kawasaki s’est montré compréhensif et nous sommes parvenus à des accords pour le futur qui vont me permettre de rester dans ce milieu que j’aime et exercer ma passion de l’autre côté de la barrière. »

 

 

 

Fonsi Nieto, ex-pilote de Grand Prix 250 et actuel coéquipier de Régis Laconi chez Kawasaki en superbike mondial, est tout d’abord désigné pour  remplacer Olivier Jacque pour le Grand Prix de France, blessé à l’avant-bras droit après une chute lors des essais libres du Grand Prix de Chine.

 

 

 

Anthony West, vainqueur du Grand Prix britannique 250cc 2003, est embauché pour remplacer définitivement Olivier Jacque à partir de Donington Park. L’Australien marque cinq points lors de ses débuts en course avec la ZX-RR sur le mouillé, même s’il revient au box derrière Sylvain Guintoli.

 

 

 

Dès Juillet 2007, le responsable de la compétition, Michael Bartholemy, confirme que Kawasaki a signé avec John Hopkins pour 2008 et 2009. En attendant, ce dernier terminera quatrième du championnat du monde 2007 pour Suzuki avec quatre podiums.

Entre Assen et Misano, les Kawasaki ZX-RR perdent leur magnifique vert métallisé pour reprendre une couleur plus proche de celle des années précédentes…

 

 

Lors du Grand Prix du Japon, Randy de Puniet obtient le 4e podium pour Kawasaki en MotoGP, avec la deuxième place lors de cette 15e manche à Motegi derrière Loris Capirossi.

A l’issue de l’une des courses les plus mouvementées du Championnat du Monde MotoGP 2007, le team Kawasaki Racing célébrait ainsi le superbe podium décroché par Randy de Puniet, la 7e place d’Anthony West et le ralliement de l’arrivée du wildcard Akira Yanagawa.

Qualifié en quatrième, le pilote français rate son départ et ne pointe qu’à la dixième place au premier virage. Il effectue ensuite deux sorties de piste et s’arrête aux stands pour changer de machine, mais cela ne l’empêche de décrocher son premier podium dans la catégorie reine. Si le départ est donné sur une piste mouillée, le revêtement ne tarde pas à sécher et bientôt l’agitation redouble dans la pit-lane, les pilotes s’arrêtant aux stands pour changer de machine et passer en pneus slicks. De Puniet change de monture dès la fin du septième tour et rétrograde alors de la huitième à la treizième place. Dès lors, il entame une époustouflante remontée et se retrouve dans le sillage de Loris Capirossi, qui remportera la course. Le Français avait pourtant vu son moteur légèrement dégonflé, suite à un problème rencontré à Estoril.

 

 

 

Randy de Puniet : « Je suis très content car la course fut particulièrement éprouvante. J’avais choisi un pneu pluie dur mais je suis sorti deux fois de la piste dans les premiers tours, perdant alors beaucoup de temps. Quand j’ai changé de machine pour passer en slicks, je pensais que ma course était fichue mais j’ai continué d´attaquer. J’ai été très surpris quand j’ai vu sur mon pitboard que j’étais deuxième. Faire un podium au Japon avec Kawasaki et Bridgestone, c’est un résultat idéal. Je dois dire un grand merci à toute mon équipe car ils ont travaillé dur pour décrocher ce résultat. »

Michael Bartholemy, responsable compétition chez Kawasaki Racing : « Ce fut une course formidable et un très bon week-end. C’est notre premier podium depuis la restructuration du team et c’est un grand moment pour nous, surtout que c’est notre Grand Prix à domicile, chez nos collègues japonais qui ont fait tant d’efforts afin de rendre la Ninja ZX-RR aussi compétitive. Nous avons mené la course avec Anthony puis il y a eu cette pénalité, mais il est bien revenu par la suite et a fait une superbe course. Je dois aussi féliciter Akira, qui a finalement terminé son Grand Prix national après cinq ans d’attente. Nous sommes sur le podium avec Randy, on n’aurait pas pu faire mieux , à moins de gagner la course ! »

En août 2007, avec John Hopkins déjà confirmé pour 2008, Anthony West et Randy de Puniet semblent prêts à se battre pour la place restante pour 2008, mais le Français surprend le paddock  et Kawasaki en signant chez LCR Honda pour la saison prochaine avant que toute décision finale ne soit prise. Anthony West est donc dûment confirmé cinq jours plus tard comme étant le futur coéquipier de John Hopkins chez Kawasaki.

Au terme du Grand Prix de Valence 2007, Randy de Puniet termine onzième du championnat du monde avec 108 points et Anthony West marque des points dans 10 courses sur 11. Kawasaki prend la cinquième place au championnat des constructeurs (144 points) et la septième place au championnat par équipes.

 

 


 

2008 : John Hopkins et Anthony West ont pour rôle de défendre les couleurs de Kawasaki, Olivier Jacque se chargeant du développement avec Tamaki Serizawa.

 

 

Sous l’impulsion de John Hopkins, la marque d’Akashi fait tout d’abord sensation en lançant un prototype de moteur «screamer» censé être bien plus puissant lors des tests à Sepang puis à Jerez, une solution abandonnée par les verts en 2005 mais remise au goût du jour par Ducati sur sa très véloce GP7.

Blessé lors du test de Phillip Island, l’Américain ne découvre la bête qu’en Espagne mais se déclare satisfait : « Le développement n’en est qu’à ses débuts, mais c’est déjà un bon moteur. C’est comme piloter une 500 deux temps, avec beaucoup moins de vibrations qu’une mécanique « big-bang ». J’espère pouvoir en bénéficier assez vite en course. »

Naoya Kaneko, directeur technique : « Nous ne faisons qu’entamer le développement du screamer et il faudra un peu de temps avant que John et Anthony puissent le tester. L’ordre d’allumage du screamer présente certains avantages par rapport à la version big-bang du même moteur. Il est plus puissant à haut régime et l’ordre d’allumage régulier suppose moins de contraintes physiques. Toutefois, il a aussi des désavantages, notamment en terme de souplesse. L’an dernier le passage de la 990cc à la 800cc s’est traduit par une réduction de la puissance. Depuis les pneus ont progressé, et gérer la puissance est devenu plus facile grâce à l’électronique. Ces facteurs devraient donc favoriser le moteur screamer, on devrait pouvoir profiter du surcroît de puissance tout en gérant ses inconvénients grâce à l’électronique. »

Toutefois, souffrant déjà chroniquement d’un manque de motricité, Kawasaki opte finalement pour ne pas introduire cette nouvelle version 2008 plus brutale de la ZX-RR, choisissant plutôt de développer le modèle 2007.

 

 

 

4e en 2007 avec Suzuki, l’année 2008 se révélera beaucoup plus chaotique pour John Hopkins avec la Kawasaki…

Tout d’abord blessé lors de la pré-saison, « Hopper » démarre bien l’année avec une 7e place à Jerez puis une 5e place lors du 3e Grand Prix, au Portugal. Ce sera malheureusement son meilleur résultat, l’Américain se fracturant les vertèbres le vendredi à l’entraînement à Barcelone avant de participer à la course, puis subissant des fractures aux jambes à 230 km/h lors d’une chute en qualification à Assen, le forçant à rater le TT néerlandais et les deux manches suivantes.

 

 

 

Au final, la déception est bien là, avec seulement 57 points inscrits au championnat et la 16e place.

Mais c’est encore mieux que Anthony West qui ne marque que 50 points et termine à la 18e place du championnat. Ce dernier, à l’inverse de son infortuné coéquipier, connaît son point d’orgue à Brno, en y terminant 5e.

 

 

 

Avec les 5 points ramenés par Jamie Hacking lors de sa wildcard aux USA, Kawasaki conclu modestement cette saison 2008 à la 5e  et dernière place des constructeurs, et à la 9e position en ce qui concerne les teams.

Dès septembre 2008 Kawasaki confirme la signature de Marco Melandri, ancien vice-champion du monde de MotoGP, pour les saisons 2009 et 2010.

Michael Bartholemy : « Je suis convaincu que Marco s’adaptera rapidement à la Ninja ZX-RR de Kawasaki et qu’avec John, il être en mesure de nous amener au niveau supérieur grâce au développement de la toute nouvelle moto 2009.  Ce qui est certain, c’est qu’avec Marco et John, nous entrerons en 2009 avec notre équipe de pilotes la plus solide depuis que Kawasaki a fait son retour à temps plein dans la catégorie reine en 2002. »

En octobre 2008, un accord pour que Jorge Martinez exploite une troisième ZX-RR en 2009 est évoqué mais n’aboutit pas, Aspar ayant besoin d’un Espagnol pour faire plaisir à ses sponsors tandis que Kawasaki souhaite que Shinya Nakano revienne.

A l’inverse, Marco Melandri découvre bien la ZX-RR lors des tests de fin de saison à Valence et en Australie.

 

 

 

Tout paraît donc sur orbite pour la saison 2009 mais, en quelques semaines, la décision est prise : Kawasaki veut se retirer du championnat du monde MotoGP !

D’un côté, la planète est en proie à une crise financière mondiale et, de l’autre, Kawasaki lutte toujours à la fois avec une machine au moteur parfois fragile et dotée d’un manque de motricité chronique ainsi que d’un fonctionnement du team très dispendieux aux yeux des Japonais…

Entre le 30 décembre 2008 et le 9 janvier 2009, Kawasaki Heavy Industries (KHI) annonce donc qu’ils ne mettront finalement pas en place une équipe d’usine en 2009, et le bras de fer s’amorce aussitôt avec Dorna Sports qui entend faire appliquer les engagements passés des hommes d’Akashi.

Un compromis est finalement trouvé pour la saison à venir, avec une Kawasaki rebaptisée Hayate (ce qui en japonais signifie « Ouragan ») fournie pour le seul Marco Melandri, dans une structure toujours dirigée par Ichiro Yoda et un Andrea Dosoli promu au rôle de team manager en remplacement de Michael Bartholemy. L’annonce est faite quelques heures avant le premier test qui se déroule au Qatar le 1er mars.

Les hommes en noir du Hayate Racing Team y sont bien présents et Marco Melandri retrouve la machine avec laquelle il n’avait fait que quelques tours en fin d’année dernière.

 

 

 

Marco Melandri : « C’était dur de se retrouver sur une MotoGP après plusieurs mois, mais l’essentiel est que j’ai déjà un bon feeling sur la Kawasaki. Il me faut beaucoup plus de temps. Je n’ai fait que quelques tours et mes chronos étaient assez lents à cause de la boue sur la piste. La moto est très différente de celle de 2008 que j’ai pilotée en novembre; j’ai besoin de quelques heures en plus pour vraiment m’adapter mais mes premières impressions sont assez bonnes. Les trois journées d’essais ont été bonnes. Il nous reste beaucoup de travail pour trouver l’adhérence à l’arrière et plus de traction, nous devrons donc continuer à progresser et faire d’importants changements pour trouver notre vrai potentiel. Pour l’instant nous ne sommes pas à 100%, alors nous devrons travailler dur pour savoir où nous nous situons par rapport aux autres pilotes. »

Andrea Dosoli : « Ce test est important pour nous afin d’évaluer notre potentiel. Le châssis et le moteur sont entièrement neufs. La pluie ne nous aide pas, parce que nous avons besoin de savoir où nous en sommes dans de bonnes conditions. Nous sommes heureux d’avoir Marco sur la moto, c’est un pilote talentueux qui a beaucoup d’expérience. »

Une semaine plus tard, l’Italien apporte quelques précisions au micro du site officiel MotoGP.com : « Le contrat avec Kawasaki a été annulé. J’ai dû faire un gros sacrifice financier, mais ce que je voulais le plus était reprendre confiance. Je n’ai rien à perdre. Il y a un mois, j’avais un pied en dehors du Championnat du Monde, et j’ai désormais un team qui ne travaille que pour moi. C’est ma motivation, et je veux montrer à Kawasaki qu’ils se sont trompés en choisissant d’arrêter le développement. Nous n’étions pas rapides au Qatar, c’est un fait. Mais la moto m’a fait bonne impression. Je ne sais pas à quel point nous pourrons progresser d’ici le début de la saison, mais le team m’a assuré qu’ils allaient travailler dur jusqu’à la fin mars. Je sais bien que nous n’aurons pas le soutien du constructeur, mais il faut considérer tout le travail effectué jusqu’à aujourd’hui. Si nous parvenons à améliorer la moto, je pense que ça ira. Évidemment ce sera beaucoup plus dur si je termine dernier tous les dimanches, mais je ne veux pas penser à ça maintenant. »

Lors du test à Jerez, auquel Oliver Jacque est présent en tant que conseiller, l’optimisme reste perceptible…

 

 

 

Olivier Jacque : « Peut-être que je piloterai, mais notre objectif ce week-end est d’obtenir un maximum d’informations avec Marco, afin d’étudier les performances de la moto par rapport aux autres. Ma mission est de conseiller Hayate pour régler la machine, et d’aider Marco à tirer le meilleur de la moto. Nous verrons si je continue à travailler durant le saison 2009. Tant que le budget le permet, nous pourrons faire d’autres tests. Pour le moment nous commencerons comme ça. Le développement de la moto est arrêté pour l’instant. Marco doit la régler pour son propre style de pilotage et nous devrons travailler à partir de ses commentaires après les courses. En ce qui concerne le châssis, nous avions découvert un problème à l’arrière que nous avons résolu après le premier test, et j’avais tout de suite aimé son comportement de l’avant. J’espère l’aider à garder sa motivation parce que travailler tout seul dans un team n’a rien de facile, surtout dans la situation de ce team, alors il a besoin d’avoir du soutien et de faire confiance à son équipe. Il sait que tout le monde fera de son mieux pour lui, et j’essayerai aussi de l’aider autant que possible. Je pense que cette moto à un bon potentiel. Marco est intelligent et s’il veut courir aux avant-postes, il y arrivera. Il a le potentiel. »

Marco Melandri : « Le test s’est bien passé pour moi, surtout après le Qatar où nous avions beaucoup peiné. Nous avons continué à travailler depuis, et ici nous nous sommes concentrés sur les réglages. Nous ne sommes pas loin du milieu de la grille, et c’est plutôt bien. J’ai perdu beaucoup de temps cette pré-saison et la moto est toute neuve, alors c’était important de piloter sur le mouillé. »

Andrea Dosoli : « Nous sommes venus ici avec de nouvelles pièces et elles nous ont permis de progresser. Nous avons résolu quelques problèmes que nous avions avec l’arrière de la moto. A partir de maintenant, l’usine continuera de produire des pièces et nous aidera à entretenir le moteur pour la saison. Ils nous aiderons en cas de problème. Je leur fais confiance. »

Et effectivement, 14e au Qatar, 6e au Japon, 5e à Jerez et 2e au Mans lors d’une course commencée sur le mouillé et terminée sur le sec, l’année 2009 commence en pleine progression pour Hayate et Marco Melandri

 

 

 

Marco Melandri : « C’est génial d’être de retour sur le podium. Il y a un mois et demi, je pouvais difficilement m’imaginer boire le champagne de nouveau, alors c’est l’un des meilleurs moments de ma vie. La saison 2008 a été très difficile pour moi, et maintenant je travaille pour retrouver ma vitesse. C’était dur parce que mes pneus pluie étaient un peu trop tendres pour ces conditions au début et je voulais changer de moto à chaque tour, mais il était trop tôt. J’aurais peut-être dû changer de moto un tour plus tard, alors j’ai essayé de ne pas faire d’erreur et de garder le rythme. Au final j’ai vraiment fait une bonne course. Je sais que ce sera dur au Mugello mais je vais profiter d’aujourd’hui. Je tiens à remercier mon team et Carmelo Ezpeleta (CEO de Dorna) qui m’a aidé à rester après le départ de Kawasaki. »

Andrea Dosoli : « C’est un résultat fantastique. Marco a été rapide sur le mouillé et sur le sec. Nous n’étions pas confiants à 100% pour les réglages pour la pluie, mais je suppose que c’était le cas pour tout le monde puisque nous n’avions pas de donnée pour nous préparer. Marco a pris un bon départ et a gardé un bon rythme sur le mouillé. Il a peut-être changé de moto un peu trop tôt, mais Lorenzo a été incroyablement rapide et il était impossible de le suivre. Le team est très motivé. Tout le monde veut obtenir de bons résultats et pour l’instant c’est le cas alors nous sommes contents. Ce podium est un peu un rêve mais nous devons être réalistes et nous pensons que nous avons le potentiel d’être dans le top huit. »

Hélas, la suite sera un peu plus chaotique, avec du bon en Allemagne, au Royaume-Uni, en Malaisie et en Australie, mais aussi quelques bonnes chutes et des place hors du Top 10 lors des autres courses.

Au final, Marco Melandri est loin de démériter et se classe 10e du championnat avec 108 points, soit un résultat aussi bon que celui des pilotes Kawasaki au temps où il s’agissait d’une équipe d’usine !

 

 

 

Malheureusement, comme cela était prévu, le couperet tombe en fin d’année et 2010 verra Marco Melandri de retour chez San Carlo Honda Gresini, chez qui il avait passé trois saisons marquées par cinq victoires et le titre de vice-Champion du Monde MotoGP en 2005, tandis qu’on retrouvera le nom de Hayate Racing Team uniquement en tout début de la nouvelle catégorie Moto2, dans une structure ensuite rebaptisée Forward Racing.

L’aventure de Kawasaki dans la catégorie reine des Grands Prix ne s’arrête cependant pas tout à fait là, puisque l’équipe Forward Racing, née d’une association entre Giovanni Cuzari et Andrea Dosoli  en 2010, d’où le nom Hayate, aligne des FTR–Kawasaki pour Colin Edwards et Claudio Corti en 2013 après avoir fait rouler des Suter en Moto2 durant 3 ans.

 

 

 

Hélas, avec ces CRT Open, on est bien loin des MotoGP de la marque d’Akashi, aucune pièce n’étant identique avec les ZX-RR officielles ou pas, et le moteur bien préparé par la société française Akira étant issue de la série.

L’année suivante, le team Avintia Blusens présente ses BQR–FTR Kawasaki CRT aux mains de Mike di Meglio et Hector Barbera, avec une carrosserie vraiment très proche de celle des ZX-RR 2009…

 

 

 

Au fil de l’année, ces machines reçoivent un cadre dérivé du Superbike et Akira va même jusqu’à mettre en piste une culasse dotée d’un rappel de soupapes pneumatique, mais l’aventure s’arrêtera là, sans doute par manque de moyens financiers.

 

 

 

Fin de l’histoire.


Pourquoi Kawasaki ne reviendra pas en Grand Prix ? Car son expérience s’y limite à quelques années, tout d’abord avec l’originale mais intéressante KR500, un exercice d’ingénieurs vite abandonné au bout de 3 ans, puis, 20 ans plus tard, après à nouveau avoir voulu défricher quelques domaines (aérodynamiques), les expériences assez brèves en 1000cc et 800cc, à chaque fois très mal vécues au Japon, aussi bien techniquement qu’humainement et financièrement…

La crise financière de 2008 ayant déjà mis fin aux activités d’Akashi en MotoGP, celle sanitaire et économique de 2020 éradique, s’il le fallait, toute chance de revoir les verts dans notre sport favori à moyen terme, ces derniers préférant dominer une catégorie Superbike pourtant rachetée par Dorna Sports depuis leur départ des Grands Prix.

Nous poursuivrons prochainement cet éclairage du passé avec le feu follet Ilmor X3

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