Nous avons tous entendu son nom au moins une fois, sans
trop savoir de qui il s’agissait. Aujourd’hui,
penchons-nous sur ce pilote légendaire à plus d’un titre.
Né en 1949 en Bavière, Anton n’attend pas les circuits du mondial
pour évoluer sous le feu des projecteurs. En effet, il est l’un de
ces enfants acteurs que vous pouvez apercevoir dans les films. De
1956 à 1959, Mang joue dans quatre productions, et tient même le
premier rôle dans Les musiciens de Brême (Rainer Geis,
1959), un long-métrage inspiré d’un comte des frères Grimm.
À seulement 11 ans, il décide d’abandonner les tournages pour…
les skibikes ; Il s’agit de ces
« vélos » dont les roues ont été remplacées par des
planches pour dévaler les pentes enneigées. Toujours est-il que dès
son plus jeune âge, Anton ne plaisante pas ! Champion
d’Allemagne et d’Europe en junior dans cette discipline pour le
moins atypique. Ce n’est qu’à 18 ans qu’il daigne s’essayer aux
courses motos, sur une
50cc Kreidler.
Anton, à 21 ans, est attiré par l’aspect mécanique de la course.
Ainsi, afin de se faire un nom, il rejoint l’équipe de
Dieter Braun, autre grand pilote allemand, en tant
que mécanicien talentueux. Il développe des contacts ainsi que de
l’expérience, et ceci l’amène à engager une 350cc
Yamaha en championnat national quelques temps plus
tard.
C’est en cette même année 1975 qu’il effectue ses débuts en
mondial, sur une SMZ 350cc (machine qu’il avait
aidé à concevoir). Il dispute en 1976 sa première année à temps
complet, sur une
Morbidelli 125cc privée. Si le début de saison est
honorable, la consécration arrive plus tôt que prévu, sur son sol.
Le terrible Nürburgring, détrempé (comme souvent), profite au jeune
« Toni ».
Ángel Nieto, Pier Paolo Bianchi –
bientôt champion du monde – et Gerd Bender chutent
dans ces conditions dantesques. Mang prend l’affaire à son compte
et s’impose magistralement. C’est la première d’une immense
carrière. Grâce à ce succès et à une année 1977 correcte (où il
s’essayera même à la 500cc sur une Suzuki privée),
Kawasaki le débauche pour leur programme 250cc et
350ccc.
Il remporte sa première course sur la Kawa’
KR250 à Silverstone et joue le titre dès sa troisième
année chez les verts, en 1980. Malgré une victoire de moins que
Kork Ballington (Kawasaki), Anton sécurise son premier
titre 250cc avec une avance confortable. En 350cc, il bute sur un
autre Sud-Africain, en la personne de
Jon Ekerold.
Sa meilleure année est sans aucun doute 1981. Toujours sur
Kawasaki, il ne fait qu’une bouchée de son coéquipier
Jean-François Baldé et s’adjuge le titre 250cc en
remportant la large majorité des victoires. Sur le même exercice,
il triomphe en 350cc, devenant l’un des rares pilotes à réaliser un
doublé.
La saison 1982 donne lieu à deux affrontement mythiques. Tout
d’abord, « Toni » contre Jean-Louis
Tournadre en quart-de-litre. Si le français s’impose
d’entrée sur le circuit de Nogaro, l’allemand décide, à l’instar de
nombreux autres pilotes, à ne pas disputer la course sur ce circuit
trop dangereux. Hélas pour lui, il s’agissait de la manche à ne pas
manquer.
Durant toute la saison, Anton domine, enchaînant les victoires
comme les perles. Cependant, Tournadre, sur Yamaha, affiche une
régularité impressionnante et termine rarement au-delà de la
troisième place. Le
Grand Prix de Yougoslavie est le tournant de la
saison. Mang, contraint à l’abandon, laisse la porte du championnat
grande ouverte. Malgré deux nouvelles victoires sur le
Mugello et à Hockenheim (cinq
succès contre un seul pour le français), Toni perd le titre pour un
point. Cruel.
C’est exactement l’inverse en 350cc. Il s’agit alors de l’une des
saisons les plus disputées de tous les temps. Mang
(Kawasaki), Didier de Radiguès (Chevallier),
Eric Saul (Chevallier), Carlos
Lavado (Yamaha), Christian Sarron
(Yamaha), Jean-François Baldé (Kawasaki) ou même
Alan North et Jacques Cornu
pouvaient espérer remporter des courses.
Mais en raison d’une grande constance – et une seule victoire
– c’est bien Mang qui s’impose devant de
Radiguès, pour la dernière édition du championnat 350cc.
La fin de la catégorie marque le début des problèmes.
Toni se blesse en ski avant le début de saison 1983, qu’il devait
effectuer en 500cc, machines très physiques. Après avoir écourté la
saison, il décide de se rabattre sur la 250cc, sa catégorie de
prédilection. Malheureusement, les résultats ne reviennent pas tout
de suite. Désormais sur Honda en 1985, il reprend
du poil de la bête mais échoue à la course au titre contre un
Freddie Spencer en mission.
Il est alors l’un des favoris de la saison 1986, mais tout ne se
passe pas comme prévu. Il rompt la collaboration avec Sepp
Schloegel, son ami et chef mécanicien, et échoue à la
quatrième place. Pourtant, la légende est
éternelle.
En 1987, âgé de 38 ans et douze saisons au compteur, Anton fait un
début de saison explosif et s’en va remporter son ultime titre, le
cinquième au total. Il cumule plus de victoires à lui seul
(huit) que tous les autres pilotes de la grille
réunis. Le pire, c’est que le bougre ne veut pas s’arrêter
là !
Il remet le couvert un an plus tard mais est stoppé net par un
énorme accident sur le circuit maudit de Rijeka.
42 victoires plus tard, Toni prend sa retraite, quelque peu forcée.
Souvent comparé à Nieto en tant que « spécialiste des petites
catégories », Anton Mang était assurément un virtuose, très
apprécié outre-Rhin. Rendons hommage à un grand pilote,
doublé d’un grand homme.