Pilote marquant des années 1970, Patrick Pons était un pilote aussi talentueux qu’énigmatique. Retour sur la vie d’un pionnier de son sport.
La carrière du parisien débute réellement en 1972. Kawasaki et Moto Revue organisaient alors une formule de promotion, surnomée « Coupe Kawa » et c’est parmi ces grilles remplies de jeunes au dents longues qu’il fit son trou.
Ce pilote agressif à souhait, rapide et irrégulier parvient tout de même à remporter la coupe en plus de se faire repérer par Jean Claude Olivier, importateur Yamaha dans l’hexagone et personnalité influente pour le sport moto français. Ses débuts en Grand prix sont très bons : après une année 1973 timide, il se classe déjà troisième en 250cc et en 350cc pour sa deuxième année sur le circuit mondial, derrière des clients comme Walter Villa et Giacomo Agostini et à seulement 21 ans.
Pons, c’était un style de pilotage. Et pour le coup assez explicite : en catastrophe. Partout. Dans tous les virages. Un vrai passionné de difficulté. C’était un de ces pilotes toujours à l’attaque, sans cesse à la limite de ce que le matériel peut donner et animé par une détermination exceptionnelle. Forcément, un style de ce genre laisse peu de place à l’erreur. Ainsi, des blessures minèrent sa carrière, le forçant à ne faire que quelques apparitions, parfois sur des années complètes.
Homme réfléchi, il n’hésitait pas à donner de sa personne pour ceux qu’il considérait comme ses successeurs. Il savait que la relève poussait, et il était prêt à l’aider, même si elle pouvait le battre en piste. Entre amitiés, conseils et prêt de matériel, il donna son maximum pour le bien de ces jeunes loups talentueux. Parmi eux, Christian Sarron.
Le champion du monde 250cc 1984 eut l’appui de Pons au début de sa carrière et à su tirer le meilleur de leur étroite relation. C’est lui même qui, pendant ces périodes de blessures, forçait pour que Yamaha prête ses motos au jeune Christian qui crevait l’écran à son tour.
C’est là que l’énigme prend tout son sens : comment l’homme si réfléchi, calme, si dur avec lui même peut se transformer en affamé une fois le casque enfilé, ne pensant qu’à la plus haute marche du podium ? Son ambition était claire : jouer la gagne peu importe la course à laquelle il prenait part. Peu importe la moto. Il existe des scènes où l’on aperçoit Pons dans un autre monde après une victoire, transcendé par l’exploit, par cette sensation qu’il le faisait vivre. Un esprit de compétition développé depuis son plus jeune âge, lui qui se dirigeait vers le ski de haut niveau.
Après deux ans de disette, les cieux s’éclaircissent pour Patrick. Et pour le Bol d’Or 1978, l’équipage Pons/Sarron est engagé par Yamaha sur une TZ750 et survole littéralement l’épreuve avant de casser, tard dans la course. L’année 1979 se poursuit avec une victoire impressionnante en championnat du monde 750cc (appelé Formula 750) : une catégorie qui n’est pas inclue dans les Grand Prix motos, mais dans laquelle participent des pointures de l’époque, notamment Johnny Cecotto. C’est le premier titre français de l’histoire des sports mécaniques. Ni plus ni moins. Oui, oui, autos et motos confondues.
Par ailleurs, L’argent n’a jamais été l’une de ses motivations. La gloire non plus. Il considérait ces choses comme des à côtés, des sortes de bonus. Ce qu’il voulait, c’était piloter, se dépasser. Dans l’histoire, il y eu peu de pilotes autant transcendés par l’exercice de la course, changeant radicalement de face lorsque le départ est lancé. Il vivait pour ça. Il se nourrissait de compétition. Mais malheureusement, les pilotes dans son genre, bien que rares, ne durent généralement pas.
Alors que l’année 1980 débutait parfaitement avec une victoires aux prestigieux 200 miles de Daytona, il se tua au Grand Prix de Grande Bretagne dans un accident, alors en pleine remontée pour compenser une qualification difficile. Michel Rougerie, qui le suivait, disait d’ailleurs qu’il voyait derrière sa bulle que Pons poussait énormément, sans doute trop pour essayer de grappiller du terrain.
Un sale jour pour la France, qui venait de perdre l’un de ses sportifs les plus spéciaux et attachants. À la fois timide et drogué de vitesse, il n’en reste pas moins l’un de nos représentant les plus marquants qui ait foulé les circuits. Il parlait peu, frappait fort, baignant dans le charme du Continental Circus. Tout ce qu’on aime en somme …