297 471. C’est l’affluence du Grand Prix de France MotoGP sur trois jours, un nouveau record. Aujourd’hui, dans Parlons MotoGP, nous allons nous pencher sur les enjeux et les leçons à tirer concernant ce GP particulier à plus d’un titre. Sans plus attendre, commençons l’analyse de ce chiffre, en plusieurs parties distinctes.
Le plus grand GP du monde ?
Le fait que ce record tombe maintenant n’est pas anodin. J’aurais dit, il y a quelques années, que le Grand Prix d’Italie organisé au Mugello était l’épreuve reine de ce calendrier. On y voyait une ferveur rare, mais aussi, de belles courses, des célébrations, des décorations spéciales… mais depuis quelques années, il s’est essoufflé. L’absence de Valentino Rossi couplée au prix des billets a, selon moi et quelques autres observateurs, relégué cette manche historique dans la hiérarchie.
Maintenant, vient la question qui tue : Pourquoi le Grand Prix de France ne pourrait-il pas devenir l’épreuve-phare à son tour ? Je vois deux concurrents sérieux. Assen, d’une part, un lieu absolument historique, et Jerez. Les Pays-Bas ont toujours des bonnes courses, le cadre est grandiose, et les fans au rendez-vous. Mais les infrastructures sont beaucoup plus petites qu’au Mans, c’est à n’en pas douter. Grâce aux 24 Heures du Mans automobiles, l’ACO peut largement développer ses stands, ses entrées, son organisation, pour permettre à Claude Michy d’accueillir autant de monde. Assen, qui n’a jamais, par exemple, reçu la Formule 1, n’est pas aussi grand, fait plus « circuit de moto ». C’est très bien, en un sens, mais le lieu est beaucoup plus confidentiel à l’échelle mondiale que Le Mans.
Idem pour Jerez, mais différemment. Je pense que s’il n’y avait qu’un seul Grand Prix en Espagne et que celui-ci se tenait à Jerez, le record se ferait là-bas chaque année. La ferveur espagnole est difficilement égalable, et de toute manière, il est inutile de nier l’influence hispanique sur notre championnat. Mais contrairement au Mans, le circuit n’a pas la même renommée. Quel tracé peut se targuer d’avoir la même réputation que Le Mans, en même temps ? C’est trop difficile à battre.
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Et forcément, les quatre autres GP organisés en péninsule ibérique (en comptant le retour d’Aragon cette année) entament la légitimité de Jerez. Pas beaucoup, mais suffisamment pour qu’on en donne un peu à Valence par exemple.
La réputation est importante, car avec le rachat de Liberty Media, il y a de grandes chances pour que le sport s’américanise, comme j’avais pu l’évoquer dans cette longue rétrospective. Le Mans est connu de tous aux USA, bien plus que Jerez, Assen, ou Phillip Island. Ainsi, ce record tombe à point nommé, puisque Le Mans pourrait servir de base à l’entreprise américaine pour intéresser un nouveau public.
Pourquoi un seul ?
Après ce long premier point, venons-en à un autre tout aussi important. Au vu de la ferveur française, encore démontrée le week-end dernier, pourquoi l’hexagone n’aurait-il pas droit à un deuxième, voire, un troisième Grand Prix sur son territoire ? Cette questions éminemment politiques nécessitent des tuyaux et des contacts que je n’ai pas pour y répondre. Mais en tout cas, je pense parler au nom de tous en disant que nous sommes légitimes à en avoir un autre, au moins.
Seulement voilà : le manque d’infrastructures joue en notre défaveur. Auparavant, la France était le pays des grands circuits, réputés partout dans le monde. Rouen-les-Essarts était un modèle, alors que Charade faisait le bonheur de tous les pilotes et passionnés. Désormais, l’activité se concentre en trois endroits bien identifiés : Le Mans, donc, avec tous les plus gros événements (ce n’est pas pour rien que le plus gros influenceur français Squeezie a choisi ce circuit pour son GP Explorer) automobiles, motocyclistes, et même, pour les camions. En deuxième place, nous avons le Paul Ricard, suivi par Magny-Cours. Voilà les seuls grands circuits français au XXIe siècle.
Cependant, bien que la réputation des deux derniers ne soit plus à prouver, je pense qu’aucun ne garantirait un tel spectacle. Le Castellet est bon, certes, mais a été déclassé suite à l’abandon de la F1. Finalement, seul le Bol d’Or et quelques manches d’endurance automobile s’y courent encore, sans enlever de prestige à ces événements. Mais pour le MotoGP, c’est un peu timide, un peu limite, surtout si on doit y caser plus de 100 000 personnes en simultané. De plus, il faudrait le remettre aux normes car il s’est considérablement orienté « voitures » ces dernières années.
Magny-Cours a perdu son attrait, c’est indéniable. Hormis le WSBK, les rencontres majeures qui s’y déroulent se comptent sur les doigts d’une main. Là encore, une remise aux normes est sans doute nécessaire, mais moi-même, n’habitant pas loin, je ne vois pas le MotoGP y poser ses valises une seule seconde. Ce n’est là que mon avis je le rappelle.
En somme, il faudrait faire sortir un nouveau circuit de terre. Et inutile d’être un grand analyste pour voir que ce n’est pas au goût du jour. Pourtant, il y a de magnifiques cadres en France, qui pourraient être réadaptés. Je pense à Lédenon, Alès, ou même, l’Anneau du Rhin, parfaitement méconnu. Mais les travaux nécessaires seraient juste trop importants sans un colossal apport étatique. Je pense que la France n’est pas boycottée par les instances motocyclistes, non, mais par la France elle-même.
Merci Fabio et Johann
Dernier point, rapidement. Oui, ce record est impressionnant, à n’en pas douter. Il montre que la France est un pays passionné, comme c’est effectivement le cas depuis longtemps. Mais on peut chaleureusement remercier Fabio Quartararo et Johann Zarco, véritables stars du week-end. Car si on enlève les deux pilotes de l’équation, que reste-t-il ?
Depuis le retrait de Lorenzo Fellon du Moto3 fin 2023, nous n’avons plus aucun autre Français en mondial. On peut penser que cet intérêt des fans est aussi lié à la forme d’« El Diablo » d’il y a quelques années. Il y a toujours un décalage temporel entre le moment où un phénomène explose, et celui où la foule se déplace pour le voir. Mais sans eux, que ferait-on ? C’est assez alarmant, surtout en comparaison de la génération espagnole qui arrive. Une toute nouvelle vague, plus importante encore que celle des années 2000 est prête à frapper la côte.
Notre pays ne compte qu’un seul Français en FIM JuniorGP et en MotoGP Red Bull Rookies Cup, le talentueux Guillem Planques. À qui la faute ? Difficile à dire, mais le constat est sans appel. Espérons simplement que cela n’influencera pas trop sur les affluences du GP de France dans cinq, dix ans.
Que pensez-vous de toutes ces questions ? Dites-le moi en commentaires !
Pour rappel, cet article ne reflète que la pensée de son auteur, et pas de l’entièreté de la rédaction.
Photo de couverture : Michelin Motorsport