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MotoGP ennuyeux

On ne va pas se mentir : le spectacle n’était pas au rendez-vous lors du Grand Prix d’Autriche. Que ce soit en Sprint ou pendant la course principale, personne n’a pu résister à Bagnaia ; et au-delà de ça, les écarts faramineux dans le top 10 empêchaient toute action secondaire. Dès lors, une question se pose, car la critique revient de plus en plus souvent : Le MotoGP devient-il ennuyeux ? Deux jours durant, nous allons tenter d’y répondre, ensemble.

Comme tous les volets de Parlons MotoGP, il s’agit d’un point de vue subjectif argumenté, mon avis ne vaut pas plus que le vôtre. Dès lors, je vous invite à vous exprimer en commentaires, précieux témoignages que je lis assidûment même si je ne peux parfois pas répondre à tous. Pour mener à bien ma mission, j’ai établi un plan en plusieurs parties distinctes, clairement énoncées, pour que ça reste lisible et compréhensible, tout en allant droit au but.

 

Les faits – Un plateau hétérogène et divisé

 

Présentons d’abord les faits. En Autriche, l’absence de spectacle était criante, mais toujours moins que la distance qui séparait les pilotes à l’arrivée. Jorge Martin, deuxième, a passé la ligne plus de trois secondes après un exceptionnel Pecco Bagnaia. Enea Bastianini, troisième, était à sept secondes de son coéquipier. Marc Marquez, quatrième, à treize secondes. Ainsi de suite, jusqu’à la barre symbolique des vingt-neuf secondes, qui représentent donc plus d’une seconde de perdue par tour – cette fois par Aleix Espargaro, neuvième. Il est vrai que le phénomène était accentué au Red Bull Ring, mais c’était guère différent à Silverstone, où Franco Morbidelli, 10e, terminait à 23 secondes du vainqueur Enea Bastianini. En Allemagne, Raul Fernandez, 10e également, pointait à 16 secondes. Vous l’aurez compris, il y a de grands écarts dans le peloton.

 

MotoGP ennuyeux

Un boulevard. Photo : Michelin Motorsport

 

À quoi comparer ces constatations ? Selon moi, à l’ère la plus serrée de l’histoire, à savoir la période 2016-2018, soit l’introduction du fameux ECU unique. Finalement, le peloton n’était pas forcément plus resserré car les dixièmes terminaient fréquemment à plus de 15 secondes du leader. La première réflexion est donc à relativiser. En revanche, un autre paramètre ne peut être nié : le nombre de vainqueurs. En 2016 comme en 2020, neuf pilotes différents se sont imposés sur la saison. Cette année, il ne sont que quatre. Et encore, deux en ont gagné une, un autre deux et le dernier sept. D’accord, mais cela n’explique toujours pas pourquoi les écarts au niveau du podium, eux bien différents des années 2016 à 2020, sont si grands. Après tout, Marquez s’est imposé 12 fois en 2019, mais les courses étaient globalement plus disputées que ce GP d’Autriche.

Mais alors, à quand remonte ce phénomène, qui, si l’on se base sur les premières conclusions susdites, s’apparente plus à un ressenti qu’à une vérité mathématique ? Selon moi, très personnellement, je pense qu’un cap a été franchi cette année. En 2023, comme en 2022, de nombreux pilotes différents ont triomphé, ont fait la pole ou plus globalement, se sont illustrés. Mais qu’est ce qui a changé, donc, pour qu’on arrive à cette sensation d’écrasement total du championnat en si peu de temps ?

 

 

Les raisons – Deux extraterrestres sur une fusée

 

Je vois deux raisons principales à cette physionomie changeante, et aucune n’est négative. Je m’explique. La première est simple, et je crois, assez facilement remarquable. Ducati est juste trop fort. Jamais une marque n’avait autant dominé à l’ère moderne. Il faut remonter à MV Agusta à la fin des années 1960 pour retrouver une telle domination. Pour référence, Ducati est sur une série de huit Grands Prix consécutifs avec trois machines sur le podium, et ce n’est pas rare qu’on en retrouve cinq aux cinq premières places. La Desmosedici GP24 se démarque largement, même devant sa sœur aînée, la GP23, seulement domptée avec succès par Marc Marquez. Même s’il est impossible de nier la puissance de Ducati, il serait injuste de leur tirer dans les pattes pour autant. Les autres constructeurs n’ont qu’à se mettre au diapason (sans mauvais – ou très bon – jeu de mot). Je n’aime guère le nivellement par le bas, et après tout, le MotoGP est un sport d’ingénieurs. Il faut les féliciter, d’autant plus qu’ils mettent huit Desmosedici dont quatre GP24 sur la grille, c’est plutôt juste et laisse la porte ouverte aux batailles.

Mais alors, pourquoi ne se déroulent-elles jamais ? Voici la deuxième raison, et elle est un poil plus subtile. Selon moi, Pecco Bagnaia et Jorge Martin, sans les distinguer, sont en état de grâce depuis le début de cet exercice. Ça fait longtemps que l’on est plus habitué à voir deux pilotes aussi forts, et c’est particulièrement visible sur un tour. La plupart du temps, ils ne sont que les deux à chasser le meilleur chrono, tout le monde essaie de prendre leur roue. Sans évoquer le cas Morbidelli, Bastianini aussi jouit d’une GP24 d’usine, et il était redoutable en 2022 chez Gresini. Malgré une victoire à Silverstone, il n’est pas au niveau des deux autres. Martin et a fortiori Bagnaia se détachent, avec la même approche, la même philosophie de la course. Cet écrasement du championnat est aussi à mettre à leur compte.

 

MotoGP ennuyeux

Deux monstres indissociables. Photo : Michelin Motorsport

 

Est-ce que c’est grave ?

 

Vient le moment de conclure. Bien sûr, cette partie sera plus subjective encore que les deux autres. Personnellement, je ne m’ennuie pas devant le MotoGP. Premièrement, parce que j’ai toujours trouvé que la bataille au général primait sur les batailles en course. Je préfère un championnat accroché jusqu’au bout, avec deux pilotes qui sur-dominent les épreuves, que dix hommes différents s’imposent mais qu’un épicier remporte facilement le titre. D’ailleurs, c’était le cas en 2015 et 2013, deux de mes exercices préférés. L’atmosphère était irrespirable parce qu’un championnat se jouait à chaque manche, mais dans les faits, les courses n’étaient pas très disputées sauf exceptions. Parfois, on a les deux, comme en 2023, mais bon, on ne contrôle pas toujours ce que l’histoire nous envoie à la figure.

Deuxièmement, et finalement, car je pense que c’est un ressenti biaisé par le profil de ceux qui dominent. Pecco Bagnaia et Jorge Martin sont des attaquants, qui sont toujours sur le fil. Ils tombent beaucoup, ont des moyennes de points assez basses en fin de saison, mais misent tout sur leur vitesse intrinsèque, ne calculent rien. En revanche, quand ils gagnent, ils sont à des lieues devant leurs petits camarades car leur jeu est ainsi fait. L’un comme l’autre sont des champions assez « plats », seulement différenciés par l’attitude un poil plus « jeune » du Martinator – pour ne pas dire arrogante. Bagnaia n’est que peu apprécié et n’est guère « très vendeur », il faut le dire. Tout cela combiné entraîne un sentiment pas vraiment représentatif de la réalité, selon moi. Cette année, nous avons eu beaucoup d’action, et une ou deux mauvaises courses ne doivent pas faire oublier la merveilleuse joute de Jerez, ainsi que celle du Mans.

Cependant, à chaque fois, dans les exemples cités ci-dessus, un élément était venu jouer les trouble-fête… son nom ? Marc Marquez. Quel rapport a-t-il avec le spectacle en MotoGP actuellement ? Pour le savoir, n’attendez pas plus longtemps ! La deuxième partie de cette analyse est sortie, vous pouvez la retrouver en cliquant ici.

En attendant, si vous voulez un autre son de cloche – doublé d’un article très intéressant –, cliquez ici.

Que pensez-vous de cette question ? Dites-le moi en commentaires !

 

Bagnaia a déjà autant de victoires qu’en 2022 et 2023, et ce n’est pas fini… Photo : Michelin Motorsport

Photo de couverture : Michelin Motorsport

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