Qui dit nouvelle saison de MotoGP, dit aussi nouvel exercice en petites catégories. Depuis toujours, ces classes inférieures sont essentielles à la pérennité de notre championnat favori. Le Moto2 est redevenu intéressant après des années de courses assez ennuyeuses, il faut l’avouer ; cette saison s’annonce folle. À Jerez, de nouveau, les jeunes loups ont fait mouche avec une manche tout à fait passionnante. Analyse en plusieurs points.
Le retour du crack
Enfin ! Fermin Aldeguer, victorieux des quatre derniers Grands Prix de la saison 2023, remporte une course en 2024. Déjà signé pour aller chez Ducati en MotoGP, il est particulièrement bluffant au guidon. D’une régularité rare, il est capable de s’affranchir de n’importe quel concurrent, si et seulement s’il ne part pas largement en tête au premier virage – une stratégie que même Pedro Acosta n’avait pu contenir en 2023.
À Jerez, il a été flamboyant, et l’un des seuls à n’avoir pas subi de réelle baisse de rythme au fil des tours. À la troisième place du championnat, il rôde, et maintient en vie son rôle de favori dans cette course au titre. Quel talent.
Un nouveau Roberts
Joe Roberts n’a rien à voir avec la famille Roberts ! Photo : American Racing
Pour la première fois depuis Nicky Hayden, un Américain mène un championnat du monde. Impressionnant le dimanche, Joe Roberts s’est joué de ses adversaires pour remonter les places une à une, de sa onzième position au départ jusqu’à la deuxième une fois le drapeau à damier présenté.
Même si j’aimerais, pour mon plaisir personnel, qu’il s’affirme et embrasse pleinement sa culture américaine déjà bien incarnée par son équipe au sponsor osé, il n’en reste pas moins un très bon pilote. Sans doute intrinsèquement moins rapide qu’Aldeguer, Lopez ou Garcia, mais pas moins courageux et régulier. Et surtout, doté d’une excellente capacité d’élimination, supplée par une bonne gestion des pneumatiques Pirelli. Franchement, ce pilote ne paye pas de mine mais pourrait bien incarner l’outsider de cette saison 2024.
Je n’en fais pas mon favori pour l’instant car je ne le pense pas – encore – capable d’écraser une épreuve comme Aldeguer ou Acosta avant lui. Son team, plus modeste que les autres, pourrait aussi le retenir quelque peu. Mais en tout cas, le voilà leader !
Sergio Garcia réussit enfin la transition !
Hormis Pedro Acosta, cela faisait longtemps que l’on avait plus vu un pilote fort en Moto2 qui était une tête d’affiche en Moto3. À croire que l’écart entre les deux classes était trop important. Augusto Fernandez, Remy Gardner, Raul Fernandez, Fermin Aldeguer, Alonso Lopez ou Ai Ogura ne s’étaient jamais illustrés durablement dans la plus petite des classes ; pour certains, ils n’y ont pas posé les roues.
Sergio Garcia fait briller l’équipe MT Helmets MSi, bien plus qu’Ai Ogura. Photo : MT Helmets MSi
Sergio Garcia, concurrent de Pedro Acosta puis d’Izan Guevara pour le titre mondial Moto3, perce enfin. Après une saison rookie en demi-teinte pour ne pas dire décevante, Garcia s’est illustré grâce à une science de la course assez impressionnante. Il gère très bien ses pneus, et reste une menace constante tard dans la course.
Suite à sa belle victoire au pays de l’Oncle Sam, il en profite pour scorer un nouveau podium, et s’affirmer dans la course au titre mondial. On ne l’attendait pas spécialement, mais cet archétype de pilote conditionné depuis la naissance s’avère souvent extrêmement fort. À suivre avec attention.
La diversité fait son grand retour
Bon d’accord : j’exagère un peu quand j’évoque la diversité des constructeurs engagés, étant donné que trois marques seulement proposent un châssis en Moto2. Mais au moins, cette année, Kalex ne domine pas outrageusement comme ce fut le cas sur les dix dernières années ! On a tendance à l’oublier, mais le Moto2 n’est pas une catégorie monotype comme la Formule 2 par exemple. Sa richesse, à sa création en 2010, était justement la diversité des marques engagées.
Grâce à Speed Up/Boscoscuro, la classe a regagné de l’intérêt sur ce point. Pour rappel, l’écurie « officielle » Speed Up, constituée de Fermin Aldeguer et Alonso Lopez, ainsi que l’équipe MT Helmets MSi (Ai Ogura et Sergio Garcia) usent ces châssis, ce qui en fait l’une des machines de pointe.
Pourrait-on avoir un champion qui roule autre chose que Kalex pour la première fois depuis Marc Marquez en 2012 ? Trop tôt pour le dire, mais cela ne serait pas pour me déplaire.
De grandes déceptions
Forcément, ce début d’année vient avec son lot de déceptions. Celle de ne plus voir Aron Canet sur une moto, déjà. Blessé à Jerez, il a dû s’absenter le temps d’une course au moins, mais on espère qu’il sera vite remis sur pied.
Après plusieurs années de galère, Aron Canet a enfin tenu sa première victoire au Portugal. Espérons qu’il revienne bientôt. Photo : Fantic Racing
Alonso Lopez, l’un des plus grands talents tous plateaux réunis, a chuté alors qu’il n’était pas en bonne posture. C’est son deuxième résultat blanc en quatre courses, ce qui se traduit par une septième position au classement général. Si son coéquipier Aldeguer se relance sans s’arrêter comme sur la fin 2023, ce retard accumulé pourrait bien lui coûter la couronne.
Que dire de Celestino Vietti, qui était mon favori au titre 2024 ! Il ne m’impressionne guère. Depuis sa 7e place à Portimao, il n’a jamais fait mieux. Red Bull KTM Ajo, qui est sur une série de trois championnats du monde consécutifs, ne doit pas être des plus heureux.
Mais il y a pire, en la personne de Tony Arbolino. Rendez-vous compte qu’il y a peu, on pensait qu’il pouvait rivaliser avec Pedro Acosta. C’est comme si depuis un peu moins d’un an – en excluant volontairement sa victoire en Australie l’an dernier, acquise dans des conditions plus que particulières, il n’était plus le même homme. Impossible de savoir à quoi cela est dû, mais il faut que ça change s’il souhaite un jour joindre la catégorie reine. À la 13e place du classement, Tony est loin de ce rêve.
Qu’avez-vous pensé de cette saison jusqu’à maintenant ? Dites-le moi en commentaires !
Photo : Speed Up Racing
