Cet épisode de Parlons MotoGP fait directement suite à celui publié hier, à la même heure, et que je vous encourage à lire en cliquant ici. Pendant deux jours, nous analysons la saison de Jorge Martin, afin d’en tirer des enseignements peu discutés ailleurs, comme ces moments où il a fait la différence. Continuons cette petite rétrospective avec de nouveaux points importants à traiter.
Mais où a-t-il fait la différence ?
Chaque année, la dynamique suit son cours, mais elle est parfois interrompue à des moments précis. Ainsi, avec un peu de recul, on peut identifier des instants qui ont fait pencher le momentum d’un côté ou de l’autre. Sa saison était un peu particulière, car il n’a jamais cessé d’être fort. Il a été très régulier, toute l’année durant, et, malheureusement, son sacre est surtout dû aux erreurs de Bagnaia qui s’est sabordé tout seul. Nous allons revenir, à partir de demain, sur le sort de l’Italien. Ceci rend difficile l’identification de moments qui ont fait basculer l’exercice de Jorge Martin, mais il y a quand même de quoi faire.
Le premier se trouve en France, au Mans. En Sarthe, le « Martinator » n’a rien laissé à la concurrence, et surtout, s’est imposé pour pas grand-chose sur deux de ses plus féroces adversaires, à savoir, Marc Marquez et Pecco Bagnaia. Le Mans est ce que Martin est capable de faire de mieux : pole, victoire en Sprint et en GP. Avec le recul, il s’agit de la seule course « serrée » où il devança Bagnaia de toute l’année, ce qui est assez incroyable quand on y pense. Ce n’était pas une bagarre pour autant, Martin a longtemps mené.
J’identifie un deuxième moment important en Australie, et c’est sans doute celui qui fait basculer la saison. En plein milieu d’une tournée outre-mer habituellement clémente à Pecco Bagnaia, Martin a accéléré, jouant dans une dimension supérieure à celle de l’Italien. C’est rare, mais Bagnaia n’a pas trouvé la réponse face à Martin – et encore moins face à Marquez –, à un moment pourtant critique. Cette troisième place de l’officiel fut suivie de trois victoires dominicales consécutives, mais qui ne suffirent pas à renverser la vapeur. Martin, à l’aise en Australie, y gardait pourtant un mauvais souvenir, car c’était assurément l’un des moments décisifs, mais contre lui, cette fois, de la saison 2023.
Était-il meilleur ou moins bon qu’en 2023 ?
En étudiant avec attention les résultats de cette saison me vient une pensée : Martin était-il meilleur cette saison ou l’année dernière ? Avant que vous ne me rétorquiez que la réponse est évidente parce qu’il est champion du monde, prenez un petit instant pour y réfléchir.
The numbers that made @88jorgemartin the #MART1NATOR 🦾
Consistency has been key for the Champion throughout 2024! 🏆#MotoGP pic.twitter.com/0PSezmWqVk
— MotoGP™🏁 (@MotoGP) November 18, 2024
En comparaison avec Pecco Bagnaia, car c’est le seul élément fiable que nous avons, je pense aussi qu’il fut un ton au-dessus en 2024 mais parce qu’il a mieux géré ses temps faibles ; ou plutôt, il n’a pas eu de temps faible. Rendez-vous compte : si l’on exclut son erreur de Misano où il rentre au stand pour mettre des pneus pluie, il n’a jamais fini une course au-delà de la quatrième place. C’est fou. Aussi, il a moins chuté, cela va de soi.
Par contre, si l’on parle de la vitesse uniquement, je pense que Martin était meilleur en 2023. Je l’ai trouvé beaucoup moins foudroyant, toujours en comparaison avec Bagnaia, car ils étaient tous deux seuls au monde. Certes, il a plus de poles, car il avait mis longtemps à trouver son rythme sur un tour en 2023 (huit contre quatre). Cependant, il a gagné deux Sprints en moins alors qu’il y en avait un de plus à prendre cette année, et une victoire dominicale en moins. Sur le format court, Bagnaia compte autant de succès, ce qui me fait dire qu’il a perdu cet avantage qui lui était propre auparavant.
Il faut prendre en considération plusieurs facteurs pour apprécier cette statistique : les motos de Martin et Bagnaia étaient largement supérieures à celles de la concurrence. Comprenez-le ainsi : malgré l’absence des Binder, Bezzecchi, Di Giannantonio, Alex Marquez, Aleix Espargaro, Maverick Vinales – passé le premier tiers de la saison – et Acosta aux avant-postes, Martin s’est moins imposé. L’année passée, il avait réussi à venir à bout de Bagnaia en bataille rapprochée, et à deux reprises s’il vous plaît (Allemagne et Thaïlande) ! Cette saison, ça ne s’est jamais produit.
En clair, même si tout porte à croire que Martin fut un pilote plus complet et régulier en 2024, il m’impressionna davantage en 2023, où, souvent, il arrivait à être plus fort sur la piste que Bagnaia. Cela ne lui enlève rien en tant que champion, mais il me paraissait intéressant de soulever ce point.
Ceci reste mon avis, et je suis curieux de connaître le votre ! Dites-le moi en commentaires !
Par Nicolas Pascual. Jorge Martin a fait la différence cette saison, mais c’est assez subtil. Voici comment il fut couronné.
Photo de couverture : Michelin Motorsport