Nous avons connu une excellente saison, pleine de
suspens, et ponctuée de nombreuses courses d’anthologie.
Mais laquelle était la meilleure ? Celle que l’on regardera
avec nostalgie dans quelques années ? Comme d’habitude dans
cette rubrique, penchons-nous sur la question, en établissant
plusieurs points distincts. Bien entendu, la réponse est
tout à fait subjective. Ainsi, nous vous invitons à commenter en
nous précisant votre choix.
Phillip Island n’est-elle pas la réponse
évidente ? Pas pour nous. Alors, oui, nous comprenons
l’engouement qu’a suscité cette course, une bataille en paquet pour
la victoire sur un circuit magnifique (ce détail a son importance),
et un vainqueur surprise en la personne d’Álex
Rins. Cependant, la course de Misano, selon nous,
était bien plus belle, grande, importante et haletante.
Voici pourquoi.
I) Un duel au sommet
La symbolique de ce Grand Prix est peut-être plus grande que le
déroulé de la course. En effet, nous avons assisté à une vraie
bataille tendue, similaire à celles que nous avions dans les années
1980, entre les deux plus véloces du plateau. Bien sûr, nous
n’omettons pas les efforts de Maverick Viñales en
début de course, mais nous allons nous concentrer sur les
performances de Pecco Bagnaia et d’Enea
Bastianini en particulier. La différence avec Phillip
Island est la suivante. Les deux ne se dépassaient pas à tout bout
de champ, et nous avions là une véritable joute à distance, où
chaque dixième de seconde comptait. C’est très différent des
courses à plusieurs comme en Moto3, où quatre pilotes peuvent jouer
la gagne et ne cessent de se dépasser, donnant la plupart du temps
un résultat finalement assez inexplicable.
À Misano, c’était plus simple. Bagnaia contre
Bastianini. Deux motos très similaires. Deux italiens, en Italie,
et plus précisément à Misano, temple de la VR46 ; les deux
protagonistes ont une histoire bien différente vis à vis de
l’académie. Tout était réuni pour produire un grand moment de
sport.
II) Un contexte à ne pas négliger
Bagnaia jouait gros sur ses terres. Moins d’un an auparavant, il chutait en tête, laissant le championnat à Fabio Quartararo. À l’époque, nous avions mentionné sa résistance à la pression en course, parfois discutable. Mais là, pas de doute, le nouveau Bagnaia a émergé. Bastianini, lui, était déjà fort mais n’avait jamais eu l’occasion de se battre jusqu’au drapeau à damier pour une victoire. Ses trois succès précédents avaient été acquis au profit de courses intelligentes et assez dominantes. À Misano, « Bestia » devait révéler une autre carte, l’attaque à outrance contre un adversaire sensiblement meilleur le jour J. De plus, il s’agissait du premier Grand Prix disputé après la promotion du pilote Gresini au sein de la structure officielle pour 2023.
III) Tension
La position d’électron libre occupée par Bastianini conféra à
cette manche une tension particulière, palpable même devant nos
écrans. À quelques tours de la fin, Bastianini semblait avoir la
vitesse nécessaire afin d’attaquer Bagnaia, pourtant extrêmement
fort aux freins. La réalisation internationale ne se focalisait
plus que sur cet affrontement au sommet. L’énergie dégagée
par ces quelques instants suspendait le temps.
Qui allait s’imposer ? Le suspens était entier à moins d’un tour du
terme. Malgré la pression insoutenable maintenue par Bastianini,
Bagnaia ne craqua pas et franchit la ligne en tête pour seulement
34 millièmes de seconde. Cette course, c’est à la fois le
un-contre-un classique en MotoGP, mettant en valeur deux des trois
meilleurs pilotes du monde (Laguna Seca 2008), un
finish serré (Mugello
2016) et la tension particulière liée à l’enjeu,
typique de la fin des années 1980 (Hockenheim
1989).
IV) Bis repetita ?
Nous avons aussi sélectionné cette course car le scénario pourrait
bien se reproduire dans un futur proche. Il est donc
représentatif de ce que la MotoGP offrira de plus beau.
Enea Bastianini et Pecco Bagnaia
incarnent tous deux l’archétype du « pilote du futur
». Jeunes, toujours rapides, sur le fil, réguliers en
course, proactifs, et qui n’ont pas peur de chuter quatre à cinq
fois dans une saison. L’année prochaine, nous pourrions bien avoir
le remake à Misano, un tracé que les deux larrons apprécient.
Selon vous, quelle course a été la plus marquante en 2022 ?
Dites-le nous en commentaires !
Photo de couverture : Michelin Motorsport