Si l’on vous parle des plus beaux tracés du monde,
auxquels pensez-vous ? Spa-Francorchamps,
Suzuka, Le Mans, le Mugello et peut-être même Suzuka. Vous
arriverez vite à la constatation suivante ; en Grands Prix
motos, les très grands circuits se font rares. Bien que la beauté
soit un critère totalement subjectif, nous avons perdu pas mal de
circuits mythiques au calendrier sur ces 25 dernières années, de
Suzuka à Estoril en passant par
Laguna Seca. Certes, nous gardons toujours une base
solide avec le Mugello précédemment évoqué,
Assen ou encore Jerez, soit des
tracés vraiment sympas, qui offrent beaucoup de spectacle et dotés
d’une riche histoire.
Aujourd’hui, penchons-nous sur un bijou, qui reste très méconnu en
Europe. Pour ce faire, il faut se rendre au Japon, dans la
préfecture de Miyagi et plus précisément au Sud de la métropole de
Sendai, au Sportsland Sugo.
Ouvert au public en 1975, Sugo est souvent sous-côté quand l’on
évoque les grands complexes mondiaux dédiés au sports mécaniques.
En plus du circuit principal, on y trouve des zones de trial, un
circuit de motocross, ainsi qu’une piste de karting. Ce tracé,
parlons-en. Dessiné en plein milieu d’une forêt, il rappelle ces
circuits anciens, sans dégagements asphaltés aux longues courbes
plaisantes au possible. Long de 3,7 km, il est relativement court,
mais offre une variété de virages rare en si peu d’espace
(voir carte du circuit).
Embarquez pour un tour en cliquant sur cette phrase en
surbrillance.
Comme tous les grands circuits, il est marqué par un dénivelé
naturel (contrairement au COTA d’Austin) qui lui confère un charme
sans pareil. Le virage phare n’est autre que le
« 110R », une longue courbe à droite qui
termine le tour, et dont le nom fait référence à son ouverture,
exactement comme le mythique « 130R » à
Suzuka.
Tout ça, c’est bien beau, mais alors pourquoi n’est il pas
au calendrier ? On pourrait légitimement penser qu’il
est trop étriqué, mais pourtant, la piste n’est pas moins large que
celle du Sachsenring. D’ailleurs, de nombreuses
catégories y passent chaque année, à commencer par le championnat
Super Formula, les monoplaces japonaises. Côté
moto, il n’est pas en reste : Le Superbike Japonais y fait
escale, comme l’Asian Road Racing
Championship.
Même le WSBK y est passé de 1988 à 2003 !
Makoto
Tamada, double vainqueur en MotoGP, y détenait le
record jusqu’en 2022 où il fut détrôné par Kasma Daniel Kasmayudin
sur Yamaha R1M en ARRC. Au début des années 2010, le
HRC venait y essayer ses dernières
trouvailles ; c’est ici, en 2013, que Casey
stoner aida au développement de la RC213V pilotée par
Dani Pedrosa et le rookie Marc
Márquez. Certes, les tribunes sont maigres, et seulement
50 000 spectateurs pourraient venir y acclamer nos pilotes favoris.
Mais c’est le lot de nombreux autres circuits japonais (à
l’exception de Suzuka), qui, par essence, n’accueillent jamais
beaucoup de monde. Pour vous faire une idée, Motegi a comptabilisé
57 000 spectateurs en 2022, soit le cinquième plus bas total de la
saison.
L’intérêt pour les sports motos au Japon est
décroissant. C’est criant en Grands Prix
motos : Yamaha n’a plus d’équipe satellite, et Honda
manque cruellement d’ambition, de volonté pour aller chercher
Ducati. C’est évident à l’écoute des retours de Marc
Márquez en ce début de saison 2023, sentiment partagé par
son frère l’an passé. Il y a quelques années, les Honda en Moto3
rivalisaient avec les KTM, mais aujourd’hui, la firme autrichienne
est confortablement devant. Pour Suzuki, le troisième
constructeur historique, inutile de vous rappeler qu’il ne fait
plus partie de l’aventure. Globalement, on voit moins de
Japonais sur les grilles, et la comparaison avec la fin des années
1990 et le début de la décennie 2000 est flagrante. Ainsi, un seul
Grand Prix pour l’archipel est largement suffisant, et
pourvu qu’il dure.
Ensuite, il est important de mentionner que Motegi
est la propriété de Honda, comme Sugo appartient à
Yamaha. Mais il existe une différence
notable ; Le Twin Ring Motegi est aussi exploité par la firme
ailée via son entreprise Honda
Mobilityland, qui s’occupe également de Suzuka. Le
Sportsland Sugo, lui, est géré par une entité indépendante, ce qui
complique sans doute l’apport de fonds nécessaire à la
réhabilitation de certaines infrastructures. Finalement,
DORNA elle-même n’aurait pas d’intérêt à ajouter
une deuxième manche japonaise sous le nom de « Grand
Prix du Pacifique », comme ce fut le cas de 2000 à
2002. Carmelo Ezpeleta et ses équipes préfèrent se
tourner vers les gros marchés en expansion que représentent
l’Inde, l’Indonésie ou la
Thaïlande ; à raison.
Toujours est-il que nous rêvons d’une manche à
Sugo. L’idée de voir Bagnaia et Quartararo batailler sur
ce joyau caché dans les bois nous fait frissonner. Connaissiez-vous
ce somptueux tracé ? Dites-le nous en commentaires
!
Photo de couverture : redlegsfan21