Le Grand Prix de Thaïlande a fait couler beaucoup
d’encre. Nous aurons l’occasion de revenir en détail sur
la majestueuse prestation de Miguel Oliveira ainsi que les autres
moments marquants de la course, mais nous devons d’abord nous
pencher, pour le grand retour de cette rubrique, sur ce qui fait le
plus parler depuis deux jours.
Avant de débuter, il est important de noter que cet article ne
reflète que la pensée de son auteur. Tous les commentaires seront
lus et débattus s’ils sont pertinents. Tous ces Hommes qui ont
enfilé le casque dimanche sont des héros, et aucun mépris, aucun
manque de respect envers quelconque constructeur ou pilote n’est
justifiable.
Pour ce faire, nous allons, comme d’habitude, présenter deux points
précis afin d’appréhender la situation. Avant cela, étudions
d’abord la situation avec la plus grande objectivité. Que s’est-il
passé ? Sur la piste détrempée de Buriram, Pecco
Bagnaia se maintient en troisième position et contient
Marc Márquez, mais semble distancé de Jack Miller et Miguel
Oliveira.
Sur la fin de course, Johann Zarco rentre fort sur
la tête. Il est alors dans un excellent rythme, qui lui permet de
dépasser Márquez. Avec Bagnaia en vue, la troisième place lui
semble promise mais malgré une grande différence de rythme au
moment T, Zarco ne porte jamais l’estocade. Dans le dernier
tour, il perd quelques mètres sur le pilote italien, scellant ainsi
sa quatrième position. Qu’en penser ? Éléments de
réponse.
I) La MotoGP comme la Formule 1 ?
Le double champion du monde Moto2 2015-2016 avoua, en interview,
que les pilotes Ducati respectaient des « consignes de
course » depuis Misano. Ici, les mots sont importants. En
effet, les sports mécaniques, souvent pratiqués par des équipes de
deux ou plus, ont toujours été imprégnés par des consignes
d’équipe. Cela donne au spectateur l’impression d’une course
tronquée, qui ne reflète pas le vrai niveau des pilotes.
Cependant, il est essentiel de ne pas généraliser. En
Formule 1, les consignes sont explicites, car la
radio permet la communication en direct avec le pilotes. Ainsi, il
n’est pas rare de voir le second se ranger pour laisser passer son
coéquipier mieux placé au championnat. Cette philosophie ne s’est
jamais appliquée à la MotoGP, hormis quelques exceptions et le
« mapping 8 » de Jorge Lorenzo à Valence
en 2017. Sur deux roues, c’est un sujet bien plus tabou sur deux
roues.
Zarco avoua que des consignes furent données après la course de
Misano, mais il ne faut pas s’imaginer qu’il
s’agissait d’ordres similaires à la Formule 1. Après les franches
attaques d’Enea Bastianini à Misano, Ducati a
(apparemment) précisé qu’il fallait éviter toute manœuvre trop osée
sur le rival de Quartararo. Mais n’est-ce pas
compréhensible ?
Sans remettre en question les propos de Zarco, il suffit d’observer
les courses pour s’apercevoir que Bagnaia ne bénéficie pas d’un
véritable traitement de faveur comparable aux champions de
Formule 1 des années 2000, 2010 et 2020 pour ne citer
personne. Si Zarco lui a laissé la troisième place, il
faut garder à l’esprit que Bastianini n’a pas hésiter à le doubler
pour une victoire à Aragón, et que Miller a terminé ici devant lui
alors qu’il aurait été aisé, pour Ducati, de lui faire passer un
message quand la victoire était définitivement hors d’atteinte.
II) Pourquoi Zarco aurait-il dû tenter le
diable ?
Imaginez un instant que Zarco emporte Bagnaia, alors que
l’équipe Pramac Racing est considérée comme l’équipe sœur de
l’usine Ducati, et qui bénéficie d’ailleurs de machines de l’année
en cours. Les équipes officielles jouent un grand rôle
dans les structures privées, et ce n’est pas uniquement le cas chez
Ducati. Étant donné qu’ils disposent de huit machines, le phénomène
est simplement plus visible.
Cette saison Cal Crutchlow, Darryn
Binder et Franco Morbidelli ne se sont
jamais montrés au niveau de Quartararo (excepté en
Thaïlande) , mais ne pensez-vous pas que Yamaha demanderait la même
chose s’ils jouaient aux avant-postes ? Le facteur risque, à
Buriram, était à prendre en compte. Dans l’interview d’après
course, Zarco confia un autre élément, moins mis en valeur par les
médias : « Mais dès qu’on sortait de cette ligne,
ça devenait risqué, et ça aurait été dommage de faire une grosse
erreur ».
Pourquoi donc Zarco aurait-il dû risquer une double
chute ? Une situation similaire sur le sec aurait été
bien plus difficile à avaler. Nous avons vu nombre de pilotes
évoluer délicatement, et manquer de partir à la faute. Johann Zarco
a pensé à la marque, qui, d’ailleurs, lui a donné l’occasion de se
refaire un nom en MotoGP et continue de lui donner une machine
capable de jouer le titre ou au moins des victoires.
Peut-on lui jeter la pierre ?
Comme le dit le célèbre dicton anglophone, « ne vous en prenez
pas aux joueurs, mais au jeu ». Bagnaia,
Bastianini, Zarco,
Miller et tous les autres pilotes évoluent dans un
environnement extrêmement compétitif ou, parfois, le simple esprit
de la course passe au second plan, mais tout en restant dans les
règles, et les individualités n’y sont pour rien. Au final, Ducati
se bat avec de meilleures armes, mais sur le même champ de bataille
que tout le monde. Personne n’empêche aux autres constructeurs de
faire de même.
Que pensez-vous de cette question épineuse ? Dites le
nous dans les commentaires !
Photo de couverture : Michelin Motorsport