Depuis hier, nous nous penchons sur l’arrivée d’un nouvel homme dans le paysage MotoGP ; Dan Rossomondo, nouveau directeur commercial (ou CCO) de Dorna Sports, après 13 ans passés en NBA. Retrouvez le premier volet de cette analyse en cliquant ici. Étudions désormais les limites de son travail.
Il n’y a plus qu’à espérer
On arrive au point clé de cette analyse, à savoir, ce qui me fait peur avec Dan Rossomondo. Je ne nie pas son talent, et encore moins son travail acharné après toutes ces années passées dans l’une des plus grandes entreprises sportives du monde. Mais sa vision est-elle en accord avec notre discipline ? Après tout, le MotoGP est aux antipodes de la NBA.
Sous l’ère Adam Silver, le basket américain s’est démocratisé, mais il existe, aux USA comme en France, cette sensation de « trop plein ». Quand on regarde un match, on comprend exactement pourquoi. Show gênant à la mi-temps, abondance de contenus inutiles sur les réseaux sociaux, publicités à tout va (une spécialité américaine), statistiques dans tous les sens, à toutes les sauces et pour les accomplissements les plus oubliables, présence de « stars » mises en lumière que personne ne connaît… Bref, tout le côté « américano-détestable » de la chose. Déjà qu’une saison est extrêmement longue (82 matchs par équipe sans compter les phases finales ni le nouveau tournoi de mi-saison), c’est indigeste.
Mais pourrait-il faire de même en MotoGP ? Deux éléments me poussent à dire que oui, malheureusement.
La Formule 1, l’exemple à suivre ?
Premièrement, ça a déjà été fait en Formule 1. On croyait la discipline à l’arrêt au milieu des années 2010, mais l’arrivée d’une société américaine, Liberty Media, a tout changé. Depuis 2018-2019, la F1 est de nouveau « à la mode », dans toutes les bouches, avec de grands spectacles. On compte trois Grands Prix aux USA (Las Vegas, Austin et Miami), c’est dire à quel point l’organisation autrefois très européenne dans l’esprit n’a pas hésité à se travestir pour plaire à ce pays. Aujourd’hui, les avis sont unanimes ; il y a trop de courses en F1, cette volonté de proposer du show à tout va déplaît les passionnés plus qu’elle ne convainc. Ainsi, c’est pourquoi cela me fait un peu peur, car la Formule 1 est devenue bien insipide à mon goût.
Deuxièmement, le discours de Dan Rossomondo. Finalement, voici le point le plus important. Trois phrases m’ont interpellé à son arrivée : « Nous devons divertir les fans et divertir le public avec le spectacle avant et après l’événement, comme cela se passe en NBA ». Cela signifie qu’il n’hésitera pas à tendre vers ce qu’il faisait auparavant. C’est une bonne chose pour la popularisation de la discipline, mais appliquer la même formule qu’en NBA ne nous donnerait pas l’impression de regarder un sport unique. Attention à la linéarisation du spectaculaire.
Suivante. « Il sera important de planifier une stratégie pour améliorer la popularité du MotoGP aux États-Unis, car c’est un marché clé ». Aïe. Il est vrai que les États-Unis incarnent un immense marché, et qu’il serait bien d’y avoir plus d’importance. Mais par pitié, ne prenez pas le même chemin que la Formule 1. Cette demande est vaine, car il est vrai que la F1 a vu ses revenus augmenter de manière exponentielle. Qu’est ce qu’une demande d’un passionné face aux millions de dollars américains. En tout cas, cette déclaration n’est pas pour me rassurer.
Et pour finir : « l’événement sportif fait partie d’un plus grand spectacle, nous devons impliquer les nouvelles générations ». Coup dur supplémentaire. Si cela signifie qu’il faut augmenter la présence sur les réseaux sociaux, alors, pourquoi pas. D’ailleurs, j’en profite pour dire que Dorna Sports fait un très bon job dans ce domaine. Mais si c’est pour diluer l’essence du sport pour le rendre encore plus accessible aux plus jeunes – comprenez, ceux qui sont sur Tiktok, alors cela me pose problème. J’y trouve des similitudes avec le discours ridicule de Florentino Perez, président du Real Madrid, qui voulait réduire la durée d’un match de foot car 90 minutes représentaient trop de temps pour les nouvelles générations. Ne nous abaissons pas à cela.
Conclusion
L’arrivée de Dan Rossomondo est une bonne chose, car le MotoGP s’enrichit d’un élément fort. Sur ce point, il n’y a pas de débat. En revanche, il faut faire extrêmement attention à son impact, car je n’ai pas envie que le MotoGP devienne un spectacle avec un peu de sport dedans, comme c’est le cas en NBA. C’est toute la différence ; Aux États-Unis, les gens viennent au stade comme au cinéma, la passion et l’engagement sont moindres. Oui, ils consomment, mais c’est bien tout. Et par dessus le marché, n’essayons pas de coller à un pays, qui, aussi grand qu’il soit, a déjà largement modifié l’ADN d’une discipline autrefois légendaire, à savoir la Formule 1.
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Photo de couverture : MotoGP