Malgré dix-huit victoires cette saison, dont onze le dimanche, Pecco Bagnaia a perdu le titre mondial MotoGP. Deux ans plus tard, il doit passer le n°1 à son rival Jorge Martin, non sans l’avoir âprement défendu. Après s’être intéressés, justement, au cas du « Martinator », nous allons désormais nous pencher sur Pecco Bagnaia car des questions sont à poser, des moments sont à analyser, et des leçons sont à tirer. Pendant deux jours, l’Italien sera notre sujet principal et ça commence tout de suite.
Un week-end à l’image de sa saison
Premièrement, je tenais à le féliciter, lui-aussi, pour son incroyable campagne. Il s’agit de l’une des meilleures de tous les temps, chiffres à l’appui. Son total de onze victoires dominicales succède aux huit de Jorge Lorenzo en 2013, ce qui en fait le plus grand nombre de succès remportés sur une saison sans titre au bout. Ça pique. Mais d’abord, la grandeur ; après, la douleur.
La grandeur, car son week-end de Barcelone, que tout le monde aura oublié dans une semaine, était juste sensationnel. Il ne pouvait pas faire mieux. Sur un circuit qui lui a parfois résisté (rappelez-vous de cette chute, seul en tête, dans l’ultime tour du Sprint plus tôt dans la saison), même, blessé, il s’est démarqué et n’a pas hésité à rappeler qu’il est sans doute le meilleur pilote du monde.
Oui, vous avez bien lu. Je considère toujours Bagnaia comme le meilleur pilote du monde, et je vais m’expliquer. Premièrement, jamais, dans l’histoire, être sacré champion n’a fait de quelqu’un le meilleur. Il s’agit de deux choses totalement différentes, qui, souvent, se recoupent, mais pas toujours. Il existe des dizaines d’exemples rien qu’en sport motocyclistes, de Wayne Rainey à Nicky Hayden en passant par Joan Mir. C’est aussi le cas en Formule 1 avec John Surtees, Phil Hill ou Keke Rosberg, entre autres. Ensuite, parce que cette saison, Martin n’a pas été capable de contenir Bagnaia. Exactement comme à Barcelone, Jorge n’a rien pu faire, sur la large majorité des courses – et même, de nombreux Sprints. Je ne dis pas que Martin ne mérite pas, ni qu’il ne fait pas un beau champion ! Il faut simplement savoir accepter ce fait pourtant largement vérifié à l’échelle de l’histoire.
D’où le titre de cet article, qui suit un week-end à l’image de sa saison. Selon moi, c’est Bagnaia qui a perdu ce championnat, et non pas Martin qui l’a gagné. À vrai dire, peu importe que ce fut Martin, Marquez ou un autre, Bagnaia l’aurait perdu quand même face à n’importe quel adversaire un tant soit peu régulier et rapide. Peut-on me jeter la pierre pour ces propos, alors qu’un pilote compte 18 victoires contre 10 pour l’autre ? Peut-on me reprocher de penser que le meilleur pilote n’est pas celui qui compte 16 deuxièmes places dans l’année ? Peut-on m’accabler, alors que, lorsque les deux franchissaient la ligne le dimanche, Bagnaia a terminé dix fois devant Martin, alors que le scénario inverse ne s’est produit qu’à quatre reprises ?
👌 @PeccoBagnaia's last masterclass of 2024 👏
The Italian immediately congratulated @88jorgemartin for his well-deserved #MotoGP title! 🤝#SolidarityGP 🏁 pic.twitter.com/2bgSXoirv0
— MotoGP™🏁 (@MotoGP) November 17, 2024
Ce Grand Prix de la Solidarité était l’exemple parfait de ce phénomène. Martin a fini champion, mais Bagnaia était meilleur. Seul lui pouvait se saborder, et lui seul s’est sabordé. Ce qui devait arriver arriva, même si je ne l’avais pas vu venir. Je dois reconnaître que je me suis trompé dans mes pronostics.
Un héritage différent ?
Pour ce Grand Prix où la mission principale était d’être digne afin de rendre hommage à la Communauté Valencienne, Bagnaia a été à la hauteur de l’événement. Hormis le fait qu’il soit l’élève de Valentino Rossi, je ne comprends pas comment on peut en arriver à détester un tel pilote, certainement pas aidé par son employeur (mais j’aurai l’occasion d’en reparler).
Après la course, il s’effaça pour laisser la place à Jorge Martin, et ne manqua pas de le congratuler dans le parc fermé. C’est classe, c’est Bagnaia. On ne peut pas dire que son caractère aura permis à cette fin de saison de s’enflammer, malgré la promotion abondante et disproportionnée de la DORNA, mais au moins, on a célébré deux grands champions.
Pourtant, il y avait des raisons d’être dégoûté surtout que Bagnaia n’aime pas perdre, c’était assez visible au Mans par exemple. Force est de constater que céder le n°1 à un pilote satellite, « ça la fout mal ». Il a gardé la face, mais je pense que Pecco sait pertinemment que cette saison 2024 n’aidera pas son héritage, la trace qu’il va laisser en Grands Prix. Après, il fait quand même une belle année, mais comme on dit aux États-Unis, le deuxième n’est jamais que le premier des perdants.
Je suis curieux de savoir ce que vous pensez, justement, de son héritage s’il venait à quitter le mondial aujourd’hui. La deuxième partie de cette analyse est désormais parue. Cliquez ici pour la retrouver. Dites-moi ce que vous en pensez en commentaires !
Pour rappel, cet article ne reflète que la pensée de son auteur, et pas de l’entièreté de la rédaction.
Photo de couverture : Michelin Motorsport