Le Sprint fut très mouvementé au Red Bull Ring. Pourtant, il ne fallait pas manquer une performance absolument incroyable au vu du contexte ; la sixième place de Pol Espargaró ! Revenu seulement à Silverstone, l’Espagnol fit preuve d’un courage énorme. Aussi fou que cela puisse paraître, cette percée à l’avant du peloton pose d’autant plus de problèmes à KTM. Analyse.
La résilience de Pol Espargaró
Quand le drapeau à damier s’est abattu sur le groupe Q1, personne ne pouvait imaginer tel scénario. Certes, Pol Espargaró avait réalisé une bonne séance, jusqu’à se transformer en un potentiel client à la Q2. Si Luca Marini et Jack Miller ne se sont pas laissés faire, il se classait tout de même devant Marc Márquez, Enea Bastianini, et, surtout, son coéquipier Augusto Fernández. Cependant, la 13e position s’est transformée en 16e place suite à une pénalité, essuyée car il avait gêné Marc Márquez durant les essais libres. Sur un tracé aussi court que le Red Bull Ring, difficile d’en attendre beaucoup. Rappelons aussi qu’il est particulièrement risqué de doubler ici, et que l’ajout de la nouvelle chicane réduit les possibilités de dépassement dans le virage n°3.
Et pourtant. Bien aidé par l’accrochage du premier virage, Pol Espargaró remonta, et surtout, se stabilisa très haut dans le classement. Il franchit la ligne d’arrivée du Sprint en sixième position sans être esseulé ! Dans les échappements de Jack Miller, certes, mais devant son frère Aleix sur l’Aprilia officielle que l’on pensait capable de rivaliser avec les KTM et Ducati en course.
Il faut se rendre compte de l’exploit mental que cela représente. Nous avons souvent tendance à l’oublier car il perça jeune, mais Pol Espargaró a déjà 32 ans. Il était légitime de penser qu’une blessure comme celle qu’il a subi au Portugal pouvait mettre fin à sa carrière. Après tout, qu’a-t-il de plus à prouver ? C’est un champion du monde Moto2, qui a réalisé de nombreux podiums, des poles ; pas de victoires, certes, mais il savait que cela serait impossible en rejoignant GasGas Tech3. Aussi, il sortait d’une mauvaise expérience chez Repsol Honda, et, sauf miracle, ne retrouvera jamais de guidon d’usine. Mais pourtant, il ne lâcha rien. Partiellement défiguré, il conserva cette envie de courir, de rivaliser avec les meilleurs de la planète, jusqu’à les titiller seulement deux courses après son retour. C’est extrêmement fort, exactement comme les mots d’Hervé Poncharal à son égard une fois la ligne d’arrivée franchie.
"You're a hero!" 🗣 Herve Poncharal
Hats off to @polespargaro and his remarkable recovery from 13th to 6th in the #TissotSprint! 👏
Never give up! 💪#AustrianGP 🇦🇹 pic.twitter.com/F4lWXB4XXy
— MotoGP™🏁 (@MotoGP) August 19, 2023
Un problème de plus
Sa performance héroïque ajoute une inconnue dans l’équation que KTM est contraint de résoudre. Déjà, car il a largement surclassé Augusto Fernández, qui connut un week-end particulièrement difficile, l’un des pires cette saison. Pourtant, le champion du monde Moto2 2022 affirme qu’il fera partie de l’aventure Tech3 en 2024, une place tout à fait méritée d’ailleurs.
Oui mais voilà ; il faut encore caser Pedro Acosta qui désire rejoindre la catégorie reine dès l’an prochain. De ce fait, on voyait en Pol Espargaró un fusible assez évident ; lui est plus vieux, et surtout, n’était pas là. En sports mécaniques plus qu’ailleurs, les absents ont toujours tort. Mais sa 12e place lors du Grand Prix de Grande Bretagne et son Sprint en Autriche sont des arguments plus que convaincants. S’il poursuit sur cette lancée et parvient à régulièrement dominer son coéquipier, pourquoi ne pourrait-il pas continuer l’aventure en MotoGP ? De plus, on sait qu’il entretient une relation privilégiée avec la firme de Mattighofen. Bref, c’est un vrai casse-tête.
Dernier élément ; nous avons beaucoup loué la saison d’Augusto Fernández jusqu’à maintenant. Nous trouvons que c’est un rookie exemplaire, qui travaille dans le bon sens, et qui a été capable de réaliser une véritable percée au Mans. L’absence de coéquipier, pour un débutant, est à double-tranchant. D’un côté, il dut s’acclimater tout seul à sa machine, sans pouvoir s’appuyer sur un collègue expérimenté comme « Pollycio ». En revanche, peut-être que la GasGas est meilleure qu’on ne le pense. Si Pol parvient à réitérer, à son âge et au vu du retard accumulé sur la saison (demandez à Enea Bastianini), alors cela soulèvera des questions quant au niveau d’Augusto Fernández, ce n’est pas faire offense que de dire ceci ; nous-mêmes étions pour son renouvellement.
Qu’on les aime ou non, il faut reconnaître aux frères Espargaró la résilience, cette capacité à exploser quand personne ne s’y attend. Qu’avez-vous pensé de son Sprint, et, plus largement, de son week-end ? Dites-le nous en commentaires !
Photo de couverture : Michelin Motorsport