Cela n’aura échappé à personne ; Depuis trois courses
maintenant, Marc Márquez a fait son grand retour parmi
l’élite. Des apparitions remarquées mais finalement peu
discutées. Ensemble, essayons d’en déterminer les
enseignements.
I) La Márquez – dépendance
Nous n’allons pas nous éterniser sur ce point, car vous avez tous
déjà vu les statistiques passées. Cependant, il est nécessaire des
les rappeler pour comprendre à quel point le phénomène est fou.
Márquez, neuf résultats blancs cette saison, est toujours le
meilleur pilote Honda au classement général, loin devant son frère.
Il a marqué, depuis son retour, 19,3 % des
points de la firme ailée cette saison en seulement deux manches
terminées.
Honda dépend de son génie. Cette information, si
elle est souvent relayée, était déjà connue de longue date.
Cela fait désormais des années qu’il est l’arbre cachant la
forêt.
II) Un retour qui dépasse les statistiques.
En vérité, il est bien plus intéressant de se pencher sur la piste
et les réponses qu’elle nous fournit. Ce deuxième come-back nous en
apprend beaucoup. Premièrement, Márquez est
rapide. Cela peut paraître bête ou simple dit comme ça,
mais les questionnements autour de sa performance au sein d’un
championnat plus compétitif que jamais pouvaient soulever des
questions.
Marc n’a rien perdu de sa vitesse
quasi-légendaire, rivalisant avec les autres grands de ce
sport.
La MotoGP moderne privilégie largement la vélocité par rapport à la
régularité, mais force est de constater que les
pilotes performants n’ont jamais mis aussi peu de points pour être
champions. Cela est dû à l’ECU
unique, toujours lui, mais aussi au manque de
régularité dans la performance, une donnée que l’on prenait pour
acquis en voyant les Rossi,
Stoner ou Lorenzo rouler.
Les années 2020 à 2022 nous apprennent que non, il n’est
définitivement pas « normal » de voir des pilotes
à 19,5 points de moyenne sur 21
courses. Encore cette année, et cela va peut-être vous
surprendre, mais le champion, quel qu’il sera, aura sans doute
l’une des moyennes les plus basses de tous les temps. Joan
Mir, en 2020, mit 12,2 points par course, contre 12,8 pour
Quartararo à l’heure où ces lignes sont écrites.
Sauf que Márquez n’est pas normal. De 2013 à 2022,
il est le plus vite, tout en étant le plus régulier dans la
performance, capable de ne terminer que premier ou deuxième toute
l’année. La vitesse montrée à Motegi avec une majestueuse pole
position nous prouve qu’il n’a rien perdu dans ce domaine malgré
les mois d’absence. Son engagement en séances d’essais et ses
sauvetages confirment qu’il est toujours aussi aiguisé. Si les
blessures n’ont pas restreint son arme la plus létale, reste à
savoir s’il peut retrouver sa constance sur une saison entière.
III) Un Márquez terrifiant ?
Mettez Márquez sur une moto, peu importe laquelle, il sera
rapide. C’est une certitude. Il est né pour aller vite. En
revanche, cette qualité est liée à un défaut majeur, qui coûta
beaucoup à l’octuple champion espagnol : l’excès
d’engagement. Chez lui, l’engagement est un défaut. Notons
tout de même que s’il s’agit de votre seule faille, c’est que vous
n’avez pas grand-chose à vous reprocher. Mais tout de même.
Le développement de course reste son point faible.
Márquez met beaucoup, voire trop d’engagement pour peu de
résultats.
Il existe beaucoup d’exemples. Sa saison 2015, sans doute sa pire
en carrière, est truffée de moments incompréhensibles
(Barcelone en particulier). Par ailleurs, si vous
mettez un pilote expérimenté et doté d’un bon sens de la course
contre lui en duel dans les derniers tours, Marc a une plus grande
chance de perdre que de gagner. Cela est peut-être contre intuitif,
mais Jorge Lorenzo et Andrea
Dovizioso ont des bilans positifs contre Márquez en un
contre un. Ils disposaient tous deux d’une excellente réflexion et
d’un grand sens de l’attaque, bien que différent dans le
détail : Ils savaient quand placer un excès d’engagement
(Mugello
2016, Spielberg 2018,
Spielberg 2019). Márquez est bien plus
imprévisible et instinctif, ce qui le rend vulnérable lors ces
situations tendues.
Quel est le rapport avec son retour ? En Thaïlande, un détail
est passé inaperçu ; Márquez n’a pas préparé d’attaque
sérieuse sur Bagnaia. Bien sûr, les conditions étaient
dantesques mais l’Espagnol n’excelle-t-il pas dans ces
circonstances ? Dans tous les cas, il usa de sagesse. «
[…] Je dois faire des courses comme celle-ci maintenant, même si
j’aurais pu prendre plus de risques dans les cinq premiers tours.
J’ai donc trouvé mon rythme et j’ai progressivement accéléré.
».
Maintenant, un peu de science-fiction. Imaginez,
en 2023, un Márquez globalement plus sage, qui est capable de se
contenter d’une troisième voire d’une quatrième place, le tout
couplé à sa vitesse pure. Cet homme pourrait prétendre à un titre
mondial et à celui du meilleur pilote de tous les temps. Imaginez
un instant le génie et l’explosivité de Marc pondérée avec la
sagesse et le sang froid d’un Rossi. Cette version du n°93
ferait peur, et l’on pourrait imaginer assez aisément une moyenne
autour de 16 points par course sans trop forcer au vu de son niveau
depuis Aragón.
Certes, c’est moins qu’en 2019 (22,1 !) mais plus
sûr, et sans doute suffisant pour s’attribuer le titre ; À moins
que
Quartararo et Bagnaia n’évoluent drastiquement
l’an prochain et gomment tous leurs défauts. Tout cela laisse
rêveur ; ce ne sont là que des suppositions mais ces
dernières pourraient bien se réaliser s’il parvient à modifier son
approche.
Voyez-vous en Márquez un candidat au titre pour 2023, voire
un agitateur surprise pour la fin de saison ?
Dites-le-nous en commentaires, tous seront lus et débattus.
Photo : Michelin Motorsport