L’année prochaine, Enea Bastianini évoluera avec KTM Tech3 en MotoGP, si, bien sûr, les difficultés financières n’empêchent pas la firme autrichienne de s’engager pleinement et durablement. Aujourd’hui, nous n’allons pas évoquer cette période de trouble, mais plutôt, les deux années de « Bestia » en rouge. Finalement, que retenir de ces saisons en tant que pilote d’usine Ducati, soit la meilleure place disponible sur le plateau ? Analyse.
De grandes attentes
J’ai l’impression que beaucoup ne se souviennent pas de qui était Enea Bastianini. En 2022, il nous a ébloui de son talent, grâce à sa capacité à tuer les courses en rôdant proche du leader à quelques tours de la fin, son intelligence de course, mais aussi sa personnalité fraîche et un peu arrogante. Il disputait la victoire à Pecco Bagnaia, et l’a d’ailleurs battu sur le fil à Aragon, cette année-là. Assez logiquement, il fut sélectionné pour remplacer Jack Miller au sein de l’équipe d’usine, une place en or.
À l’époque, et je ne l’ai pas oublié, beaucoup souhaitaient et voyaient Bastianini ne faire qu’une bouchée de Bagnaia. La réalité fut tout autre. Dès la première course de la saison 2023 au Portgual, « Bestia » fut mis par terre par la moto de Luca Marini, qui, lui-même, était tombé. Il ne revint qu’à l’occasion du Grand Prix d’Italie, et fut relativement discret jusqu’en Catalogne. Au départ, il commit une énorme erreur, un vrai strike, qui lui coûta sa deuxième partie de saison. « Bestia » fit son deuxième grand retour en Indonésie, quatre courses plus tard, et là encore, il peinait avec son matériel.
Finalement, il manqua plus ou moins la moitié de sa première saison avec Ducati. Il a remporté un Grand Prix en Malaisie, à la surprise générale d’ailleurs, mais n’avait, bien sûr, rien joué. Disons qu’il n’a pas confirmé son excellente saison 2022, mais qu’il avait de larges circonstances atténuantes au vu de ses absences, qui ont, en partie, été causées par sa propre erreur à Barcelone. Le problème, c’est qu’entre l’Indonésie et la Malaisie, il n’y arrivait pas, alors qu’il certifiait être à 100 % de son potentiel physique. Il ne parvenait pas à faire fonctionner la Desmosedici GP23, mais là encore, ça pouvait se comprendre car il avait manqué le début d’année, là où est donné une direction à suivre. Pour le juger honnêtement, il fallait attendre 2024.
Une belle année, mais sans plus
Et c’est cet exercice passé qui me fait dire que c’est un échec. Cette fois, il avait la Ducati d’usine, aussi mise au point par ses soins, sans doute la même que Pecco Bagnaia et Jorge Martin. Les cartes étaient dans sa main. Avant l’ouverture au Qatar, il avait déclaré qu’il visait des victoires et la couronne de champion du monde. Après tout, on ne pouvait lui donner tort au vu de sa saison 2022, qui le plaçait, avec la différence de matériel, assez proche d’un Bagnaia dans la hiérarchie.
Mais pourtant, en 2024, il ne fut jamais en position de se hisser ne serait-ce que dans la course au titre. Je ne vais pas revenir sur sa saison en détail, car ça fera l’objet d’un autre article. Ici, je veux dézoomer, voir plus loin, et revenir sur son passage par l’équipe d’usine Ducati. Et après avoir perdu la troisième place du général face à Marc Marquez sur une bien meilleure moto, comment ne pas qualifier cette période de deux ans comme un échec ?
Le plus frappant, ce ne sont pas les résultats, car les siens sont somme toute corrects quand on regarde les statistiques uniquement. Non, ce qui choque, c’est l’écart avec Pecco Bagnaia en termes de pilotage. Parfois, « Bestia » lui était supérieur, comme à Silverstone. Mais dans l’ensemble, les deux ne jouaient pas dans la même ligue. Avec onze victoires contre deux, le bilan est assez clair. Je ne parle même pas de la différence de vitesse en qualifications, un domaine où Bastianini a réussi à corriger le tir, mais tard, et pas de manière aussi significative que souhaitée.
Conclusion
Pour moi, c’est l’histoire qui détermine l’échec de Bastianini chez Ducati. Il est arrivé en tant que potentiel rival de Bagnaia avec pour ambition de remporter le titre mondial, il repart battu par ce dernier, en plus de Martin et Marquez avec une moto un an plus vieille. Surtout, il s’en va chez KTM Tech3, une équipe satellite aux résultats en demi-teinte sur ces dernières années. Cela signifie que Ducati a préféré un autre, mais qu’il n’a pas pu se dégoter un meilleur guidon, et surtout pas de guidon d’usine.
Cela ne veut pas dire qu’il ne performera plus jamais, ou qu’il n’est plus un bon pilote. J’aime beaucoup Bastianini, à vrai dire, mais force est de constater que ce rendez-vous manqué laissera une trace dans sa carrière. Il quitte Ducati avec une cote bien moins importante qu’à l’arrivée, d’où le terme employé dans le titre. Ces deux années auraient pu le faire passer dans la caste des très grands, et au lieu de ça, il repart avec trois victoires en trente-et-un Grands Prix… soit moins que sur sa seule saison 2022 avec Gresini Racing.
Je suis curieux de savoir ce que vous en pensez. Selon vous, était-ce un échec, une réussite, ou ni l’un, ni l’autre ? Dites-le moi en commentaires !
Pour rappel, cet article ne reflète que la pensée de son auteur, et pas de l’entièreté de la rédaction.
Photo de couverture : Michelin Motorsport