La semaine dernière, je suis revenu en long, en large et en travers sur l’énorme performance de Fabio Di Giannantonio au Grand Prix MotoGP d’Indonésie. J’étais bien loin de me douter de ce qui allait suivre ! En effet, j’y voyais là un dernier baroud d’honneur avant de quitter la catégorie, n’imaginant aucune autre issue pour le jeune Italien. Mais est-ce la fin pour lui ? Est-ce que deux performances peuvent sauver le rêve d’une vie ? Analyse.
Une situation de plus en plus complexe
Dell Curry, basketteur et père du fameux Stephen Curry, disait que « l’on est jamais aussi bon que ce que sa dernière performance laisse imaginer. » En clair, c’est la forme récente qui définit la valeur d’un athlète, car les sports de haut niveau reposent sur des moments marquants, des exploits, plus que sur la construction d’une dynamique. C’est peut-être triste à dire, mais c’est la stricte vérité.
La semaine passée, je n’osais me pencher sur les résultats de Fabio Di Giannantonio car je savais qu’il ne légitimaient pas une place parmi l’élite. Maintenant que c’est le sujet, allons-y. À la 12e position au championnat, il est dernier des pilotes Ducati si l’on exclut Enea Bastianini, blessé cette année. En plus de cela, il est décroché par son coéquipier Álex Márquez, alors que ce dernier a manqué trois épreuves en raison d’un problème physique. Dans l’absolu, il n’a « qu’un » podium, deux entrées dans les points lors des Sprints, et quatre résultats blancs. Au delà de l’aspect comptable, il restait anecdotique ; un peu comme Iker Lecuona en son temps, il traversait son expérience en MotoGP.
Oui mais voilà. En un mois, tout a changé. Tenez vous bien ; il a marqué autant de points en trois manches (43) que sur tout le reste de la saison avant l’Inde ! C’est bluffant, mais à la fois, problématique. De plus, il a gagné en personnalité après son craquage dans le parc fermé, un moment très émouvant qui m’avait inspiré le papier de la semaine dernière. Fabio Di Giannantonio s’est épaissi, bien plus qu’après sa pole position surprise réalisée au Mugello en 2022.
Et puis, son Grand Prix d’Australie, parlons-en. Pas le plus flamboyant du groupe de tête, on sentait sa retenue mais à la fois, son engagement résolument nouveau. C’est presque dommage qu’il se prenne le plus beau dépassement du week-end par Pecco Bagnaia dans le pif-paf entre Siberia et Hayshed, mais une troisième place, sur la ligne, reste un résultat exceptionnel. L’absence d’attaque suicide dans la cuvette du virage n°10 « MG » montre que ce podium lui convenait, qu’il ne voulait pas non plus trop en faire quitte à chuter. Cela témoigne d’un pilote mesuré, qui connaît l’impact d’une telle place à l’arrivée sur le futur de sa carrière.
C’est toute la question. Cette troisième place, couplée à son excellent week-end de Mandalika, suffira-t-elle ?
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— Fabio Di Giannantonio (@FabioDiggia49) October 22, 2023
Fabio Di Giannantonio doit-il continuer en MotoGP ?
Pour moi, il a sa place car son éviction de l’équipe Gresini Racing arrive au bon moment. Rarement le contexte des transferts avait autant joué en la faveur d’un pilote. Déjà, il a montré qu’il pouvait, au maximum de ses capacités, aller disputer la victoire face aux meilleurs pilotes du monde. Il suffit d’une fois pour le prouver, les recruteurs savent très bien que Fabio Di Giannantonio n’ira rien chercher au classement général, il seraient bête de le faire venir pour cela.
Je pense qu’il remplacera le remplaçant de Marc Márquez, excusez la répétition. Peu importe qui, ça n’a pas grande importance. J’imagine qu’il a trop peu montré pour prétendre au guidon officiel Honda, surtout pendant une telle phase de restructuration. En revanche, pourquoi pas remplacer un Miguel Oliveira chez Aprilia RNF. À vrai dire, il faut prendre le problème de l’autre bout : quel pilote les autres équipes peuvent-elles appeler ? Je pense que la grille Moto2 actuelle est l’une des meilleures depuis 2010, mais elle est trop jeune d’un an. Aucun autre que Pedro Acosta ne devrait faire son apparition en catégorie reine, ou alors, ça serait trop tôt. Je pense, entre autres, aux Tony Arbolino, Alonso López et Arón Canet. De ce fait, les possibilités sont grandement réduites. Tous les cadors du championnat WSBK occupent de nouveaux postes importants, et, d’une manière générale, on imagine de moins en moins des ponts se construire entre les deux classes.
Fabio Di Giannantonio devient le candidat idéal par défaut. Je ne pense pas qu’il soit un excellent pilote pour autant, car il a très peu prouvé en deux ans hormis ce podium, un fait relativement commun depuis 2016 (déjà 14 pilotes différents sont montés sur la boîte en 2023). Mais il n’y a personne d’autre à aller chercher. C’est exactement en cela qu’il représente un problème moderne, une équation à résoudre. Il a performé juste assez pour semer le doute, mais pas trop pour s’affirmer totalement. Lui doit prier pour que la signature du remplaçant de Marc Márquez se fasse au plus vite, histoire de ne pas avoir à faire des podiums tous les week-ends pour garder espoir.
Je serais très content de le voir poursuivre au plus haut niveau, car sa fin de saison, aussi incertaine soit-elle, est très excitante à suivre. Peut-être se révèle-t-il seulement maintenant, et que la machine est enfin lancée ? Reste à trouver une place en 2024 pour le découvrir.
Photo de couverture : Michelin Motorsport