Depuis 2016, DORNA fait en sorte de resserrer les écarts
au sein du MotoGP. C’est un fait ; les arrivées n’ont jamais été
aussi regroupées, et l’époque de l’ultra-domination des pilotes
officiels est loin derrière nous. Cette nouvelle ère du spectacle
total est encore accentuée par l’apparition des Sprints, destinés à
proposer toujours plus de show ; sans doute afin de redynamiser une
catégorie qui avait perdu de son impact après l’arrêt de ses
anciennes gloires. Cette saison 2023 est-elle celle de tous les
possibles ? Analyse.
I) Une statistique impressionnante, ou le tour de force de
DORNA
Douze. C’est le nombre de pilotes qui ont déjà fini dans les trois
premiers à l’issue d’une course, quelle qu’elle soit. Pour rappel,
nous n’avons assisté qu’à cinq manches pour l’instant ; c’est
tout à fait considérable. De toute évidence, ce chiffre va
continuer à croître.
En 2015, dernière année avant l’introduction de l’ECU unique,
« seulement » dix pilotes avaient eu accès au podium en
18 manches. Est-ce une bonne chose ?
À vrai dire, nous avons déjà tenté de répondre à la question dans
un précédent article que nous vous invitons à retrouver en cliquant
sur cette phrase en surbrillance.
Toujours est-il que nous apprécions ce qui nous est proposé en ce
début d’année. Il faut dire la vérité ; nous étions sceptiques
quant aux
Sprints et avons toujours des réserves, mais
globalement, le spectacle est de qualité. Que ce soit à travers les
dépassements osés, l’engagement, les surprises, et même, les chutes
– une dimension spectaculaire inhérente aux sports
mécaniques, qu’on le veuille ou non.
DORNA a réussi son pari, et le chiffre présenté plus tôt le
prouve. Tous peuvent jouer le top 3, ou presque. En effet,
nombreux sont les pilotes qui n’ont pas eu la chance de s’exprimer
ou même, qui attendent simplement leur heure. S’ils reviennent à
100 %, on imagine assez facilement Miguel
Oliveira et Enea Bastianini monter sur la
boîte, mais aussi, Aleix Espargaró.
Quant aux autres, pourquoi pas voir un Franco
Morbidelli le temps d’un Grand Prix comme ce fut le cas en
Argentine, ou même,
Augusto Fernández qui continue à prendre la mesure de sa
GASGAS. Dans le meilleur des cas, cela porterait le
total à 17, soit plus que les 14 de 2022. Sur 20 pilotes
titulaires, c’est absolument impressionnant.
Aucun autre sport mécanique ne permet à une aussi grande proportion
de pilotes de pouvoir bien figurer, à l’exception de la
NASCAR. Même les formules monomarques ou monotypes ne font
pas mieux, alors que l’on compte cinq constructeurs
différents !
II) Un niveau d’engagement à peine croyable
Autre statistique qui illustre l’imprévisibilité du championnat.
Alors que nous avons disputé cinq épreuves, seulement trois pilotes
ont marqué des points à tous les Grands Prix, soit le dimanche
uniquement. Il s’agit des deux officiels Yamaha et du
rookie Augusto Fernández.
Cela signifie qu’il faut en demander plus afin d’être véloce, ou,
globalement, que le niveau d’intensité a augmenté. D’ailleurs, des
pilotes auparavant conservateurs comme Brad Binder
(le changement est réellement impressionnant) ou Luca
Marini jouent maintenant aux avant-postes jusqu’à la
chute.
Pourtant, nous avons fait une autre remarque assez amusante. Alors
que les Sprints pourraient favoriser ceux qui ont le moins à
perdre, il n’y a quasiment aucune différence avec les résultats des
Grands Prix. Pour preuve, seul Marc Márquez a terminé aux
trois premières places de l’une de ces courses (Portugal, 3e) sans
monter sur le podium le dimanche.
Cela signifie donc qu’il est difficile de se spécialiser et que
l’exercice n’est pas si différent, il est juste moins
long. Par le fait, nous pouvons en conclure qu’il ne
contribue pas à l’imprévisibilité caractéristique du MotoGP new age.
D’ailleurs, et contrairement à ce que nous craignions, les pilotes
ne sont pas plus excités sur le format court que pendant le Grand
Prix ; beaucoup de polémiques sont nées le dimanche
(Marc Márquez sur Oliveira au Portugal, Martín sur Álex
Márquez aux États-Unis, Bagnaia et Viñales au Mans…).
En revanche, la vitesse sur un tour ne semble plus donner
d’avantage stratégique, même si elle est toujours recherchée par
les pilotes afin de se faciliter la tâche au départ. Finalement, on
assiste bientôt à une « course aux meilleures
places » plutôt qu’une « course à la
pole » à proprement parler : la dernière pole
position convertie en victoire date d’Assen 2022 grâce au coup de
maître de Pecco Bagnaia. Cela fait donc 14 manches sans
conversion alors qu’on en comptait neuf sur la seule saison
2015.
Que pensez-vous de ce changement auquel nous sommes en train
d’assister ? DORNA présente-t-elle, en 2023, son
MotoGP « parfait » telle qu’elle l’avait imaginé en introduisant
l’ECU unique en 2016 ? Dites-le nous en
commentaires !
Photo de couverture : Michelin Motorsport MotoGP