Quinze ans après Hiroshi Aoyama en 250cc, le Japon a un nouveau champion de Grands Prix motos. Grâce à une nouvelle deuxième place, Ai Ogura remporte cette campagne Moto2 2024, ce qui légitime d’autant plus son accession à la catégorie MotoGP. Chez Aprilia Trackhouse Racing, il défendra fièrement les couleurs de son pays. Cependant, la tâche s’annonce difficile. Analyse.
Un beau champion
Désormais, vous le savez : tous les champions ne se valent pas, comme toutes les victoires ne se valent pas. Ai Ogura est-il un beau champion ? Selon moi, oui, pour plusieurs raisons. Premièrement, car il a su triompher d’une compétition extrêmement relevée en Moto2. Étant donné que le taux de remplacement en catégorie reine est très faible (deux rookies sur les deux dernières saisons), le talent s’accumule en classe intermédiaire. De fait, nous assistons à l’éclosion de pilotes très rapides, forts en toutes circonstances, et surtout, qui ont de l’expérience. Pour preuve, neuf pilotes différents ont remporté au moins une course. Et parmi eux, Ogura.
Alors, il n’est peut-être pas le plus rapide, je vous l’accorde. Mais ses trois victoires étaient valeureuses, sans compter qu’il n’a pas pu prendre le départ du Grand Prix d’Autriche. Derrière lui, les Aron Canet, Fermin Aldeguer et autres Sergio Garcia poussaient fort… mais pour l’instant, personne n’a plus de trois victoires, comme lui ! En plus, personne n’a réussi à maintenir sa régularité dans la performance. Il n’a fini hors du top 8 qu’une seule fois, ce qui est assez remarquable dans une catégorie quasi-monotype comme le Moto2. Sa grandeur n’a été que soulignée par l’âpreté de la concurrence.
Deuxièmement, il revient de loin. Rappelez-vous : Ogura jouait déjà le championnat en 2022, cette fois contre le non moins redoutable Augusto Fernandez. Il avait les cartes en main après l’Australie, mais avait commis cette erreur impardonnable à Sepang, qui lui coûta le titre. Tous ses espoirs s’écroulèrent en un instant. À l’époque, je demandais, légitimement, si un pilote pouvait revenir d’une telle désillusion. Le Japonais me confirme que oui, mais uniquement grâce à une force mentale remarquable. Cela en fait un beau champion.
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— MTHelmets-MSi (@MthelmetsMSi) October 27, 2024
Un défi à venir
L’accession en MotoGP sera difficile, pour lui comme pour les autres rookies. Ogura, l’année prochaine, devra composer avec l’Aprilia RS-GP de l’équipe Trackhouse Racing aux côtés de Raul Fernandez. Peut-il réussir ? Il en a le talent, c’est certain, mais pour l’instant, je ne vois pas en Ogura un pilote capable de choquer la planète moto en catégorie reine.
C’est plus une question d’impression, et donc, très subjective, mais Ai Ogura ne me laisse pas la même impression qu’un Pedro Acosta ou même, qu’un Fermin Aldeguer. C’est particulier, notamment parce que l’Espagnol a commis beaucoup d’erreurs cette saison, mais ça ne s’explique pas. Au guidon, il m’impressionne simplement moins qu’un Canet, ou qu’un Lopez. Il est très bon et peut réussir, bien sûr, mais n’est pas non plus un champion exceptionnel au premier sens du terme.
Si l’on ajoute à cela la question du matériel, la tâche ne sera pas facile. L’Aprilia est une bonne moto, certes, mais l’année 2025 ressemble déjà à une saison de transition, avec deux nouveaux pilotes dans l’équipe d’usine, et l’arrivée d’un nouveau directeur technique en la personne de Fabiano Sterlacchini. La firme de Noale a quelques problèmes récurrents, comme cet essoufflement qui se fait sentir chaque saison quand la tournée outre-mer pointe le bout de son nez. Je pense que la situation est comparable à celle d’Augusto Fernandez en 2023, dans une équipe satellite d’un constructeur installé mais perfectible. Son passage en MotoGP sera donc un véritable défi, espérons qu’il réussisse cette transition qui s’est révélée assez difficile – au moins dans les premiers temps – ces dernières années pour une majorité de pilotes.
Kalex enfin battu !
Cela faisait depuis 2012 et la Suter de Marc Marquez que Kalex n’avait pas été battu en Moto2 ! Cette saison, le châssis qu’il fallait avoir était le Boscoscuro, et ce n’est même pas celui de l’équipe Speed Up qui s’est imposé. Cette diversité fait du bien à la catégorie intermédiaire, qui, dans ses premières heures, récompensait les expériences de certains génies de la mécanique. Une bonne nouvelle, même si cette relative domination est pondérée par l’absence d’un pilote KTM Ajo aux avant-postes. Aki et ses troupes avaient remporté les trois derniers championnats en date, mais, cette fois, ne disposaient pas des armes pour se battre, même pas un décevant Celestino Vietti.
Que pensez-vous du titre mondial d’Ai Ogura ? Dites-le moi en commentaires !
Pour rappel, cet article ne reflète que la pensée de son auteur, et pas de l’entièreté de la rédaction.
Photo de couverture : MT Helmets MSi/Ai Ogura