En 2021, KTM a connu une saison frustrante mais ponctuée
de grands moments. L’inconstance dans les résultats était
tout bonnement inexplicable comme rarement dans l’histoire des
Grands Prix motos. Ce point était sans aucun doute la plus grande
préoccupation de la formation autrichienne pour l’entame 2022. Même
s’il faudra attendre les premières courses européennes pour se
faire un avis plus complet, les hommes en orange ont impressionné
au Qatar. Analyse.
Tout d’abord, commençons par un point important. Cette fois, le
fait que Lusail ne soit pas une « piste
KTM » n’était en rien galvaudé. Si l’on jette un œil
aux statistiques, il s’agit du pire tracé pour la firme de
Mattighofen, et le seul où l’équipe a déjà vu ses
deux pilotes factory terminer hors des points (2017). Si l’on prend
uniquement ces mêmes pilotes d’usine (huit départs pour cinq
pilotes au total), le meilleur résultat n’était qu’une 12e position
acquise par Pol Espargaró en 2019. C’est dire ce
qu’une deuxième place représente.
Du côté de Brad Binder, ce résultat est le fruit
d’un long travail. L’an passé, le champion Moto3 2016 ne s’est pas
illustré aux avant-postes si ce n’est pour la seconde manche
autrichienne, remportée à la suite d’une course folle, sans
véritables conclusions à en tirer. Si l’équipe et les spectateurs
sentaient plus le potentiel de Miguel Oliveira, intouchable ou
presque dans un bon jour, Binder a réalisé une saison exemplaire,
empreinte de régularité. Ce type de saison
« à la Bradley Smith » passe trop souvent
hors du radar des médias car deux exploits et puis s’en va valent
mieux que dix courses solides, du moins sur les réseaux
sociaux.
Dès le vendredi, Binder ne cachait pas sa joie quand à la vitesse
de sa RC16. Le Sud-Africain s’en allait réaliser une course
excellente, deuxième à quelques mètres seulement d’un
Bastianini
en mission. Plein de bon sens et jamais au-delà de la
limite, Binder a même fait remarquer qu’il aurait pu disposer de
plus de puissance, la faute à un contrôle de traction réglé trop
haut à son goût. Invraisemblable.
Serait-ce la bonne année pour KTM ? Même s’il
est (bien) trop tôt pour le dire, les indicateurs sont au vert.
Binder, en particulier, dispose donc de la régularité, la capacité
d’adaptation en fonction des éléments nouveaux (nous avons vu
précédemment qu’il n’avait pas été tant impacté par les évolutions
en 2021), la vision d’un vainqueur, un bon sens de la course (il
peut dominer ou chasser, sur la pluie ou sur le sec)… Il ne lui a
manqué qu’une grande qualification pour s’affirmer en tant que
prétendant au titre.
Certes, la RC16 est imprévisible et peut jouer des tours, mais
Binder semble mentalement armé pour faire face à ces désagréments.
Au delà de ça, la cuvée 2022 semble bien née, et il vaut mieux
tâtonner un peu au tiers de la saison que de partir d’en bas, rien
que pour le moral des troupes, demandez à
Quartararo.
En revanche, des questions subsistent. La performance de
Oliveira, parti 14e, questionne. Celui qui était vu comme
le pilote n°1 a d’ailleurs disposé de nouveaux éléments
aérodynamiques au Qatar, mais ceux-ci n’y ont rien fait. Le
sympathique Portugais est un peu dubitatif, conscient qu’il doit se
ressaisir.
En effet, « l’académie » pousse fort. Outre
Gardner et Fernández, le team
Moto2 dispose de deux grands talents. Pedro Acosta
d’un côté, pourrait se révéler comme un véritable génie du pilotage
s’il venait à s’imposer pour sa première année en catégorie
intermédiaire. Marc Márquez et bien d’autres l’ont dores et déjà
pronostiqué champion. N’oublions pas Augusto
Fernández, assurément l’un des pilotes les plus
sous-cotés, qui pourrait aussi s’immiscer dans la cour des grands
en cas de contre performance.
Cette réserve peut être source de problèmes, car à moins d’engager
une troisième équipe, KTM devra lâcher du lest.
Cette profondeur d’effectif peut parfaitement être difficile à
gérer pour les pilotes, ajoutant une pression supplémentaire. Ne
brûlons pas les étapes : pour gagner, KTM devra fournir une machine
compétitive à toutes les courses, ce qui, pour le moment, n’est
jamais arrivé. Mais si les Autrichiens ont mis le doigt sur le
problème de l’an passé, alors nous pourrions bien avoir de
nouveaux champions au palmarès.
Qu’en pensez vous ? Binder peut-il jouer un titre, dans l’absolu ?
Dites le nous en commentaires !
Photo de couverture : Michelin Motorsport