pub

Nous poursuivons notre rétrospective de la saison de chaque pilote, du dernier jusqu’à Pecco Bagnaia. Pour apprécier la performance de nos héros, regarder leur place au général ne suffit pas. Ainsi, nous allons nous pencher sur les dynamiques, le contexte, les qualifications, l’attente que le pilote en question suscitait pour juger sa campagne. Cet avis reste subjectif, et nous sommes curieux de voir ce que vous en pensez en commentaires. Hier, c’était la saison du rookie Remy Gardner qui était à l’honneur. Vous pouvez retrouver l’article correspondant en cliquant sur cette phrase en surbrillance.

Aujourd’hui, penchons-nous sur le jeune Raúl Fernández, promis à un grand avenir.

I) Un peu de contexte

Le moins que l’on puisse dire, c’est que le jeune espagnol de 22 ans n’a pas crevé l’écran. Pour comprendre sa campagne, il faut revenir un an en arrière, afin de saisir le fond de la question. Fernández avait tout du génie. Pur produit KTM, il a disputé sa première saison complète en 2019 dans la plus petite des catégories. Rendez-vous compte. Il y a trois ans et demi de cela, Raúl débutait son aventure en mondial. Un point dont nous reparlerons ultérieurement.

Il se révéla en 2020, une année achevée en trombe. Puis, le passage en Moto2 porta ses fruits. Avec Remy Gardner, le duo KTM anima l’année et se partagèrent la plupart des succès. Même si le titre revint à l’Australien, l’on pensait légitimement que Fernández, de par son déficit d’expérience, son sens de la course et sa vitesse, était le meilleur des deux. Ainsi, la firme autrichienne propulsa les deux larrons en catégorie reine. Voilà l’histoire de Raúl Fernández en Grands Prix ; elle tient sur six lignes. Une progression dans les échelons aussi rapide est un fait rarissime.

 

Photo : Michelin Motorsport



II) Une saison dans le vent ?

Dès lors, et aussi contradictoire que cela puisse paraître, nous étions en mesure d’attendre beaucoup du jeune Espagnol. C’est paradoxal, mais étant donné l’engouement qu’il a suscité, pourquoi ne poursuivrait-il pas sa formidable lancée ? D’ailleurs, lui même ne cache pas ses ambitions et l’on a aussi découvert une forte tête en 2022, ce qui est loin d’être un défaut en MotoGP.

Et le soufflé retomba. Alors, certes, nous sommes conscients que la KTM RC16 n’est pas la meilleure moto pour débuter, d’autant plus que son coéquipier était lui aussi un rookie. Il ne fallait pas en attendre une saison à la Brad Binder, mais nous aurions tout de même voulu voir une étincelle, un beau résultat, quelques percées, une retranscription même partielle de ce que nous avions observé en Moto2. Dans les faits, il était le plus mauvais « performer » du plateau : il n’a jamais fait mieux que 12e (Sachsenring et Valence). Sur le plan statistique, le bilan est le même que son coéquipier Remy Gardner, ou presque.

Car oui, nous pensons tout de même que sa saison, aussi plate soit-elle, est relativement meilleure que celle de Gardner. Tout d’abord, nous ne pouvons omettre sa blessure à la main, qui lui coûta massivement le début de saison. Cela influe sur sa moyenne de points par course, qui est de 0,77, contre 0,65 pour Gardner. Cela représente tout de même un écart significatif, plus représentatif que la petite unité qui les sépare au championnat (14 points contre 13).

Rappelons qu’il a été meilleur que son coéquipier le dimanche :il a terminé devant lui neuf fois, contre six dans le sens inverse (quand les deux franchissaient la ligne). Pour finir, on note une légère amélioration en fin de saison (six points sur les quatre dernières manches), progrès que n’a pas affiché Gardner. Sa saison n’est donc pas si terrible que cela, même s’il n’y a pas de quoi crier au génie, tout du moins pour le moment. C’est la raison évidente pour laquelle il disposera d’un guidon en MotoGP l’an prochain, et pas Gardner.

III) Les raisons

À l’étude de son cas, d’autres paramètres rentrent en compte. Déjà, l’envie. KTM a laissé entendre que ses pilotes Tech3, en particulier Remy Gardner, n’y étaient plus, et cela très tôt dans la saison. Mais est-ce que Raúl Fernández y a « déjà été » ? Rappelez-vous de l’imbroglio concernant son contrat pour la saison 2022 ; tout portait à croire que le jeune espagnol désirait un guidon Yamaha dans la structure WithU RNF. Le management de KTM, souvent critiqué, eut le dernier mot.

Ce n’est pas l’état d’esprit idéal pour débuter une saison. Ensuite, Raúl affichait une certaine arrogance, qui, dans les faits, n’est pas un mauvais point. Mais cela doit être en adéquation avec ses performances et clairement, ça n’était pas le cas. Nous avons tous en tête les dures paroles concernant l’équipe Ajo en Moto2, mais aussi le coup de chaud dans le box Tech3 au Sachsenring. D’ailleurs, les responsables de KTM n’était pas les plus enthousiastes, et émettait de vives critiques à son égard dès le mois d’août.

 

Une blessure à la main qui le priva de deux Grands Prix. Photo : Michelin Motorsport

 

Vous l’aurez compris, ce n’est pas la situation idéale pour se mettre en confiance, surtout dans une catégorie MotoGP toujours plus compétitive où les compromis sont proscrits. Un rookie doit se montrer exemplaire comme tout étudiant, c’est la base pour apprendre.

Conclusion :

Nous ne pouvons pas jeter la pierre à Raúl Fernández. Son année, bien qu’assez anecdotique pour un homme aussi haut en couleur, était un brin plus encourageante que celle de son ancien coéquipier. En revanche, faire monter un pilote qui n’était engagé en mondial depuis 2019 était un pari très risqué. Que KTM pouvaient-ils en attendre de plus ? Fernández s’est battu avec ses armes, mais tout porte à croire qu’il aurait dû réaliser une à deux années supplémentaires en catégorie intermédiaire. Désormais, il est presque contraint à la performance, car une fois que l’on redescend en Moto2, la remontée s’avère tortueuse.

Le plan de la firme de Mattighofen est clair ; nous l’avons déjà longuement étudié. Cependant, l’accession en MotoGP de Fernández était peut-être le coup de trop. Du point de vue de l’efficience, leur stratégie est la bonne, encore faut-il savoir attendre. Les raccourcis n’existent pas dans le très haut niveau. Quoi qu’il en soit, nous souhaitons une belle année 2023 à Raúl Fernández, et qu’il garde son état d’esprit avec ce soupçon d’arrogance. Ces profils vont définitivement manquer dans le futur, et une fois bien maîtrisé, ce trait se transformera un avantage certain.

Qu’avez-vous pensé de sa saison ? Dites-le nous en commentaires !

 

Raúl pourra-t-il rebondir sur l’Aprilia ? Il n’a plus vraiment le choix à vrai dire. Photo : Michelin Motorsport

 

Photo de couverture : Michelin Motorsport

Tous les articles sur les Pilotes : Raúl Fernández

Tous les articles sur les Teams : Red Bull KTM Tech3