Chaque saison, les marques européennes se montrent de plus en plus redoutables. Assiste-t-on a un véritablement changement en MotoGP ? Alors que la saison 2024 bat son plein, la dynamique semble être la même qu’en 2023, et qu’en 2022, aussi. Mais alors, pourquoi les constructeurs japonais sont passés, malgré leur importante puissance financière, derrière les Européens ? Il s’agit peut-être d’un problème bien plus profond qu’il n’en a l’air. Hier, déjà, je suis revenu sur de potentiels éléments de réponse, dans un article que vous pouvez retrouver en cliquant ici.
Une économie dépassée
Fin 2023, le pays semblait aller tout droit vers la récession. Mais finalement, les autorités ont relevé une – légère – augmentation du PIB au quatrième trimestre. Tout porte à croire que l’archipel est désormais la quatrième plus grande puissance mondiale derrière les États-Unis, la Chine, et depuis peu, l’Allemagne. Pour rappel, en 2010, le Japon était deuxième devant son rival chinois.
Comme un Français résidant actuellement au Japon nous l’a confié, il semblerait que ces entreprises poussiéreuses soient restées bloquées à l’âge d’or de l’industrie japonaise. Ils ont beaucoup innové il y a quelques décennies, et n’ont pas ce réflexe très américain de poursuivre en ce sens afin de rester au sommet de la pyramide. Deuxièmement, la présence de ces mastodontes en perte de vitesse empêche des petits industriels ingénieux de se lancer.
Revenons-en aux Grands Prix motos. Depuis 2016, il est possible pour une « petite » équipe comme Aprilia de rivaliser avec Honda ou Yamaha. Le vieux continent est empreint de cette « tradition garagiste », qui valorise l’innovation à petite échelle. Dans ce contexte, ces derniers sont gagnants, et sont amenés à l’être encore davantage ; voici mon pari sur l’avenir.
Logiquement, le sport devrait changer considérablement dans les prochaines années. Comme on l’a expliqué dans une précédente analyse, Liberty Media ne pourra plus se permettre de laisser une marque dominer dans une ère où le grand public se lasse aussi facilement. Les Européens sont infiniment plus à même de gagner cette bataille future.
Des choix qui reflètent un dynamisme en berne
Un autre point est particulièrement marquant ; le manque d’ambition. C’est sans doute une conséquence de ce que nous avons étudié jusqu’ici. On a l’impression que Honda et Yamaha n’en veulent pas autant que Ducati ou Aprilia (qui ont apporté des solutions aérodynamiques radicales). C’est visible en posant le regard sur les motos, mais pas que. Les recrutements et la gestion des programmes sportifs font peur.
Un de ces indicateurs a été la nomination de Joan Mir chez Honda Repsol, entre autres. Ce n’était pas un mauvais pilote, mais aux côtés de Marc Márquez, pourquoi ne pas faire un pari osé : un Ai Ogura ou un Raúl Fernández auraient pu faire l’affaire quitte à rouler une machine difficile avec un besoin de se renouveler. L’embauche de Luca Marini dans les derniers instants de la saison passée va dans ce sens. Exactement au contraire de Ducati qui se permet un Aldeguer tôt en 2024. Idem pour Yamaha, qui laisse filer Valentino Rossi chez Ducati monter son équipe satellite, jusqu’à ne plus en avoir depuis deux saisons maintenant ! Sans parler des incessantes défaites de Honda face à KTM en Moto3. Certes, une machine ailée à remporté le championnat 2023, mais il faut souligner le nombre de KTM/GasGas/Husqvarna/CFMoto performantes dans la plus petite des catégories.
En conclusion, j’imagine des Japonais encore sur le déclin en 2024, mais maintenus en vie sur le plan des par le talent de Fabio Quartararo, et peut-être, de Johann Zarco. Il faudra garder un œil sur ce phénomène inquiétant, car bien qu’aucune équipe ne soit là pour toujours, la perte de Honda et/ou Yamaha en plus de celle de Suzuki pourrait bien mettre à mal l’équilibre du championnat MotoGP.
La nouvelle réglementation prévue pour 2027 pourrait bien rebattre les cartes. Mais la puissance financière n’est pas nécessairement gage de victoire. On ne fait que répéter que Honda est le n°1 dans le monde, mais cela n’a pas empêché la firme ailée de se laisser dépérir de 2020 à 2024. Il en va de même pour la préparation de toutes nouvelles motos en vue de 2027.
Que pensez-vous de cette épineuse question ? Dites-le nous en commentaires !
Photo de couverture : Michelin Motorsport