Accrochez-vous. Dans cette analyse détaillée comme rarement nous en avons réalisé, nous allons revenir en long, en large et en travers sur la signature de Johann Zarco chez LCR Honda, le fait qui anime la planète MotoGP depuis le week-end dernier. Avant de rentrer dans le vif du sujet, une petite précision s’impose.
À savoir
Plusieurs éléments sont à prendre en compte avant la lecture de cette analyse. Le plus important d’entre eux est la non appréhension de la dimension pécuniaire de ce choix. Nous allons étudier l’aspect sportif uniquement, et cela a ses conséquences, car la relation à l’argent dépend de chacun. Nous entendons, par là, que c’est un motif légitime, mais que nous n’en tiendrons pas compte puisqu’il s’agit, de fait, d’une préférence.
Deuxièmement, tout ce que nous allons dire n’enlève rien aux qualités intrinsèques de Johann Zarco. Nous pensons réellement qu’il s’agit d’un pilote « élite », assurément parmi les 7-8 meilleurs au monde. Après six saisons et demi au plus haut niveau, nous avons désormais une bonne idée quant à son talent, son plafond, mais aussi ses limites.
Dernièrement, l’avis que vous allez lire reflète uniquement la pensée de l’auteur, et non pas de l’ensemble de la rédaction. Vous êtes prêts ? C’est parti ! Nous allons étudier cette signature sous trois angles majeurs, subdivisés en parties et sous-parties. La première concernera le fond, la deuxième, la forme, et la troisième, plus courte, le point de vue de LCR.
I) Nous ne comprenons pas
Vous vous en doutiez à la lecture de l’introduction. Nous avons beau retourner la question dans tous les sens depuis maintenant trois jours, nous ne comprenons pas ce transfert. Sur le plan sportif, il ne fait aucun sens.
A) L’offre Ducati
Si nous avons bien suivi l’actualité, Ducati proposait une offre sur un an en MotoGP, tandis qu’Honda doublait la mise. C’est un argument convainquant, mais un peu fallacieux. Objectivement, l’offre de Ducati semble meilleure pour deux raisons extrêmement simples. Premièrement, une année sur une Desmosedici, c’est sans doute une possibilité de continuer à être très compétitif, peu importe où (nous en reparlerons demain). Les pilotes MotoGP sont très différents, mais tous ont un point en commun ; la volonté de gagner. Johann Zarco est, comme tous les autres, un grand compétiteur, double champion du monde Moto2 2015 et 2016, ainsi que vice-champion du monde 125cc en 2011. Il a choisi l’option la moins compétitive ; aucun jugement de valeur, c’est un fait.
EXCLU : Dans les coulisses de l’instant où @pramacracing a annoncé le départ de Johann Zarco 🥺♥️
(Évidemment, il fallait bien un peu de chanson pour aider à sécher les larmes) #AustrianGP pic.twitter.com/EEq84bJ7K7
— CANAL+ MotoGP™ (@CanalplusMotoGP) August 20, 2023
Deuxièmement, la promesse d’une saison sur une Ducati laisse potentiellement le choix au pilote pour retrouver un autre guidon performant un an plus tard. De ce que nous avons compris, il y avait une option en WSBK pour les années suivantes, mais rien n’empêche, à échéance du contrat en 2024, de rebondir en MotoGP chez une autre équipe ; cela dépend du pilote. Il y aura des opportunités ; on sait, par exemple, qu’Aleix Espargaró a déjà évoqué une possible retraite pour la fin de l’année prochaine. Si Johann Zarco avait réalisé une saison en outsider, aux alentours de la cinquième place au général comme il sait le faire, avec des podiums et des poles, nul doute qu’il aurait retrouvé une belle offre par la suite. Ne croît-il pas en ses chances de réaliser pareil exercice ?
B) Johann Zarco chez LCR Honda, du potentiel ?
L’offre Honda est factuellement moins alléchante pour quelqu’un qui désire gagner et qui a encore le potentiel de monter sur le podium. Elle court sur deux ans, certes, mais attention. Regardez Joan Mir, complètement démotivé après six courses, jusqu’à évoquer ses envies d’abandon. Observez le cas Marc Márquez, totalement résigné, qui a changé d’approche pour ne plus rien jouer. Penchez-vous sur le cas de Jorge Lorenzo, qui croyait, lui aussi, au projet Honda, jusqu’à ce que la RCV le broie en moins d’une demi-saison. Les deux derniers noms évoqués font partie des cinq meilleurs pilotes de tous les temps, au passage. Sans parler des Álex Márquez et Stefan Bradl, cassés mentalement.
Deux ans, sur le papier, c’est intéressant. Mais en MotoGP, le temps est relatif. Six courses avec Honda peuvent paraître comme une éternité, et mener à l’arrêt d’une carrière.
Imaginez qu’un pilote avec une bonne expérience en MotoGP ait à choisir entre un an sur Ducati ou deux avec Honda, mais sans que vous sachiez ce qu’il pilotait jusqu’ici. Il n’y a aucun scénario où un talent choisirait le constructeur nippon. D’ailleurs, l’exode est constaté depuis pas mal de temps maintenant ; il aura fallu trois courses à Álex Rins pour changer de crémerie, alors que lui a gagné un Grand Prix au guidon de la récalcitrante RC213V ! Cela devrait mettre la puce à l’oreille.
C’est tout pour cette première partie ! La deuxième partie est parue ! Cliquez ici sans attendre pour la retrouver. Dites-nous ce que vous pensez de ce transfert en commentaires, et pourquoi pas, ce que vous avez pensé de cet article ainsi que de notre argumentation.
Photo de couverture : Michelin Motorsport