Vous n’avez pas pu passer à côté. Andrea Iannone fera son grand retour en MotoGP à l’occasion du Grand Prix de Malaisie, et cet épisode de sa carrière pourrait même se prolonger en cas de finale à Valence, même si l’avenir est plus qu’incertain en raison des inondations qui frappent cette partie de l’Espagne. Mine de rien, la dernière fois que nous avons vu Iannone disputer une course MotoGP remonte à 2019, et son retour aux affaires fait tant parler que ça mérite bien un épisode de Parlons MotoGP.
Qui est Andrea Iannone ?
Je me faisais cette réflexion, mais il est possible que parmi mes lecteurs, certains ne connaissent pas Andrea Iannone, ou ne le connaissent que de nom. Après tout, cela fait cinq ans qu’il ne s’est plus présenté au départ d’un de nos Grands Prix. De plus, je pense qu’un petit flashback est nécessaire car certains ont souvent tendance à réécrire l’histoire, surtout quand elle concerne des pilotes électriques ou disparus trop tôt.
Pour la faire courte, Andrea Iannone est un pilote italien, trois fois troisième du championnat du monde Moto2 entre 2010 et 2012, ancien pilote d’usine pour Ducati, Suzuki et, finalement, Aprilia. Il est connu pour trois éléments distincts. Premièrement, sa personnalité. Iannone est un italien affirmé, mi bad-boy, mi top model. Clairement, c’est un personnage atypique comme il y en a trop peu, même si ses posts sulfureux sur les réseaux sociaux ne sont pas du goût de tous.
Deuxièmement, son talent, qui s’exprime de la même manière que lui sur la piste. Comme sa personnalité le laisse deviner, il était chaud bouillant, souvent impliqué dans de grosses batailles, et, parfois, des accrochages du même acabit. Il a décroché une seule victoire en MotoGP à l’occasion du Grand Prix d’Autriche 2016, la première pour Ducati après le départ de Casey Stoner fin 2010. Dans la chronologie ducatiste, c’est le pont entre Stoner et les années Dovizioso vs Marquez.
Troisièmement, son exclusion des circuits. Fin 2019, il fut interdit de compétition pendant quatre ans après avoir été contrôlé positif à une substance interdite. Le dopage n’était pas nouveau, mais la sanction n’en demeurait pas moins salée. On ne le revit plus jamais en MotoGP… jusqu’à maintenant.
Que de résilience !
Iannone est un de ces pilotes qu’on aime ou qu’on déteste. Mais peu importe ce que l’on pense de son attitude, disons, très italienne, il faut reconnaître qu’il n’a jamais trahi sa passion. En 2024, lorsque sa mise au placard prit fin, il retrouva un guidon en WSBK dans une équipe Ducati de second plan. Aussi incroyable que cela puisse paraître, il est parvenu à gagner une course cette saison, à Aragon ! Ses belles performances lui permirent de remplacer Fabio Di Giannantonio chez Ducati VR46 pour les deux dernières manches de cette campagne MotoGP. On ne peut pas dire que ce n’est pas mérité. C’est Valentino Rossi lui-même qui a contacté Iannone pour lui faire cette faveur, et selon moi, The Doctor a eu raison.
Le dossier Bulega
Nicolo Bulega, autre pilote Ducati et actuellement deuxième du championnat du monde WSBK, était aussi un client potentiel. Mais je ne comprends pas ceux qui préféraient Bulega à Iannone. D’abord, Bulega n’a jamais été fort en MotoGP puisqu’il n’y a jamais roulé, contrairement à Iannone. D’accord, Andrea a 35 ans, mais il a quand même l’expérience du très haut niveau en comparaison de Bulega, qui, lui, n’a jamais joué les meilleures positions même quand il était en Moto3, sans parler de son passage désastreux en Moto2. De plus, Rossi offre ainsi à Iannone – aussi surnommé Maniac Joe – une manière d’achever noblement sa carrière en MotoGP, car oui, l’Italien méritait une belle sortie même s’il était responsable de sa propre retraite anticipée. La résilience est récompensée, et c’est un beau coup médiatique par dessus le marché.
🚨Unexpected call 📞
Holidays postponed, see you at the #MalaysianGP 🤩@VR46RacingTeam 🤝 @andreaiannone29 @MotoGP #PertaminaEnduroVR46RacingTeam #MotoGP #AI29 #VR46 pic.twitter.com/sgiXyYOswg— Pertamina Enduro VR46 Racing Team (@VR46RacingTeam) October 28, 2024
Qu’attendre de son retour ?
Essayons de sortir la boule de cristal. Qu’est-ce que peut faire Iannone face au plateau actuel en MotoGP ? Eh bien, pas grand-chose, selon moi. Je suis assez pessimiste, mais pas apeuré comme le sont certains spécialistes. À en entendre, cette opportunité serait presque dangereuse tant les motos ont changé depuis 2019, tant elles sont devenues plus rapides et plus traîtres, tant le niveau de compétition s’est élevé. Honnêtement, je pense que Iannone n’a pas hésité une seconde, il s’en sortira. Il peut même faire mieux que dernier, car il bénéficiera d’une machine extrêmement performante en comparaison des Honda ou de la Yamaha de Rins par exemple.
Cependant, le plafond est assez bas. Déjà, car je pense que la grille WSBK actuelle est la plus faible de tous les temps. Jamais le niveau n’a été aussi dérisoire depuis que la DORNA a repris l’affaire en main. Trouvez-vous cela normal qu’Andrea Iannone ou que Danilo Petrucci, déjà sur le déclin au moment de leur départ du championnat MotoGP – nous allons en reparler – réussissent à gagner des courses face aux Toprak Razgatlioglu et autres Nicolo Bulega ? Bulega, qui, lui, n’avait strictement rien prouvé en mondial avant son accession en WSBK ? La différence de niveau va faire très mal, et dans mon esprit, le Moto2 est une ligue de bien plus haute volée que le Superbike actuellement.
Ensuite, car Iannone, au moment de la décision de justice à son encontre, était largement déclassé en MotoGP. Nous avions déjà vu ses meilleures heures, elles remontent à 2015 ou 2016. Non, ce n’est pas parce qu’il s’est fait bannir des paddocks qu’il allait devenir le nouveau Rossi. Il a réalisé une saison 2018 honnête sur Suzuki, mais déjà, sa régularité dans la performance qui lui avait tant servi en 2015 était partie aux oubliettes. Personne n’attendait rien de sa saison 2019 avec Aprilia aux côtés d’Aleix Espargaro, et cette dernière fut particulièrement difficile entre résultats décevants et blessures. Il arrivait, parfois, à se projeter devant – j’ai encore ce Grand Prix d’Australie en tête – mais il ne faisait plus partie de l’élite. Il n’y a pas de raison objective pour penser qu’il pourrait casser l’écran cinq ans plus tard, sans connaître la moto, l’équipe, l’environnement, etc.
Je ne le vois pas finir tout dernier, mais entrer dans les points sera difficile à moins d’un miracle. L’année passée, à Sepang, Alvaro Bautista (autre transfuge du WSBK mais alors champion du monde en titre de la discipline) avait terminé 17e en étant blessé. Un résultat similaire ne me paraît pas inatteignable. Je suis curieux de savoir ce que vous pensez de la question et d’Andrea Iannone. Alors, dites-le moi en commentaires !
Pour rappel, cet article ne reflète que la pensée de son auteur, et pas de l’entièreté de la rédaction.
Photo de couverture : Ducati VR46