Pour bien commencer la nouvelle année, concentrons-nous
sur le principal outsider de cette saison 2022. Enea
Bastianini a chamboulé la hiérarchie. Par quatre fois, il s’est
imposé au nez et à la barbe des meilleurs pilotes, mais une
statistique bien précise illustre son côté
« tueur » dans l’âme.
Au cours d’un précédent article, nous avons déjà évoqué le
rendement des pilotes. Évidemment, il n’existe pas, en
sports mécaniques, des statistiques avancées permettant de calculer
l’efficacité réelle de chaque engagé. Basé sur un modèle utilisé en
football, nous pourrions traiter des « bonnes chances de
victoires » qu’un pilote a transformé (une pole, une bon
dépassement à un moment T de la course) pour en déduire son
rendement. Mais pour établir une donnée pertinente, il faudrait,
aidé d’un algorithme complexe, analyser toutes les courses MotoGP
depuis 2016 a minima –
soit l’introduction de l’E.C.U unique – et dresser des
probabilités de victoires pour chaque scénario. Vous l’aurez
compris, cela prendrait beaucoup trop de temps et de moyens.
Intuitivement, nous possédons une petite idée du rendement
de chacun. En effet, nous pouvons facilement statuer que
Johann Zarco n’est pas très efficace, lui qui
compte huit pole en catégorie reine mais aucune victoire.
Son taux de transformation est donc nul, ou
quasi-nul, car les résultats ne sont pas binaires,
contrairement au football (victoire/défaite).
Mais un chiffre en particulier peut nous aider à mieux
appréhender l’efficacité de chacun. Si l’on prend en compte les
tours menés par rapport aux victoires, nous pouvons aisément nous
faire une idée quant aux forces en présence. Justement,
Enea Bastianini bat à plate couture l’ensemble du
plateau.
En 2022, Bagnaia a confortablement mené ce classement. Il compte
189 tours en tête, et la plupart du temps, en
solitaire (Jerez, Mugello,
Assen, Silverstone,
Spielberg, et dans une moindre mesure,
Misano et Sepang). Ce chiffre est
gigantesque, puisque Quartararo, deuxième, n’en a
mené « que » 76. Rappelons que l’Italien
s’est imposé à sept reprises, contre trois pour le Français.
Miller, pour une victoire, a mené 55
tours, ce qui est déjà un beau total. Jorge
Martín, avec 41 tours, le suit, mais
n’est jamais monté sur la plus haute marche du podium. Vient
Rins, auteur de deux succès, avec
36 tours effectués en première position. Puis
Miguel Oliveira, avec 29 tours
menés pour deux victoires.
Cela doit vous mettre la puce à l’oreille. Bastianini, pour
quatre succès, n’a mené que 22 tours sur l’ensemble de la
saison. C’est juste énorme, et ça en dit long sur son
profil et surtout son potentiel. En un sens, cela démontre son
rendement. Il est, de loin, le plus efficace sur la
grille. L’argument des pole positions tient toujours, et
l’Italien n’en a eu qu’une seule en Autriche. Il n’a pas pu en
profiter en raison d’un problème mécanique, mais le samedi reste
l’un de ses points faibles
si l’on regarde l’ensemble de la saison.
Bastianini tire quatre victoires d’une pole et de 22 tours
en tête. Si l’on se penche en détail sur ses succès, c’est
encore plus impressionnant ; Il n’a mené que lors de six
Grands Prix seulement. Cinq tours au Qatar, qui
suffirent pour se mettre à l’abri de Brad Binder. Même
chiffre aux USA, et là encore, les concurrents n’y purent
rien. Au Mans, la chute de Pecco Bagnaia forcée par son travail de
sape lui offrirent sept petits tours en tête, pas
un de plus. Et lors de son coup de maître à Aragón, il ne
mena qu’un seul tour, mais le plus important de tous : le dernier.
Dingue.
Cette statistique fait peur, car « Bestia » est bel et
bien capable de diriger le peloton et d’imprimer un rythme seul en
tête, en plus d’être doté d’un sens du dépassement hors du commun.
S’il se retrouve devant un peu plus souvent en 2023, nous
pourrions bien avoir un nouveau champion du monde à la fin de
l’année car comme vous le savez désormais, Bastianini ne gâche pas
d’occasions. À savoir que les deux autres courses qu’il a
mené sans gagner sont les Grand Prix de Saint-Marin
(défaite pour 0’034’’) et de Malaisie
(défaite pour 0’270’’). Absolument incroyable.
Profitons de cette article pour rendre hommage aux autres bons
élèves. Aleix Espargaró n’a mené que cinq tours
sur la saison, mais cela lui a suffi pour s’imposer en Argentine.
Fabio est aussi un bon client, puisqu’il n’a
commandé que trois manches – ses trois victoires, bien qu’il
dispose d’un style totalement différent, plus en maîtrise que
Bastianini. Scénario similaire pour Miguel
Oliveira, qui a triomphé à chaque fois qu’il en a eu
l’occasion. Un réalisme exemplaire. De l’autre côté du spectre,
nous retrouvons Jack Miller, une victoire pour
55 tours bouclés en tête. La palme de la pire
efficacité revient à
Jorge Martín, qui n’a pas gagné malgré ses 41
unités, aidées par cinq pole.
Quoi qu’il en soit, cette statistique sera à prendre en compte lors
de la saison prochaine. Qu’en pensez-vous ?
Enea Bastianini est-il votre favori à la victoire finale ?
Dites-le nous en commentaires !