Sentez-vous que quelque chose d’historique va se
produire sous nos yeux ? Nous oui ! Peu importe l’issue de cette
saison 2022, deux pilotes vont entrer dans la légende. Le duel à
distance Bagnaia – Quartararo restera dans les mémoires de longues
années durant. Est-ce fini pour autant ? Réponse en plusieurs
points.
I) Quartararo au plus mal, mais il reste de
l’espoir
Cela n’aura échappé à personne. « El
Diablo » a connu l’un de ses pires wee-ends en
carrière du côté de Phillip Island. Depuis
Misano, sa Yamaha n’est plus au niveau de la
Ducati, c’est un fait. Cependant, le problème va plus loin que ça.
En effet, le manque de performance a entraîné une perte de
confiance en sa machine, soit une atteinte à son mental. Cela a été
notamment visible dimanche, quand Quartararo n’arrivait pas à faire
la nette différence sur Crutchlow après son erreur en début de
course. La faute en elle-même est liée au sur-pilotage, un fait que
le Français établit clairement depuis Misano. C’est une
spirale infernale.
Ce freinage raté puis cette chute nous en dit long. En effet, nous
comprenions alors qu’il s’agissait de sa dernière chance, ou tout
du moins qu’il avait approché la 18e manche du championnat comme
tel, tentant le tout pour le tout. Pouvons-nous vraiment
lui en vouloir ? Comme nous le présentions dans une
analyse pré Phillip Island, il s’agissait sans doute
de la joute décisive.
En réalité, sa course révèle deux points précis, un
malheureux et l’autre encourageant. Premièrement, un «
Fabio » décomplexé et poussant sa machine au maximum n’a jamais pu
prétendre à la vitesse du groupe leader, qui était pourtant
relativement lente. C’est ici un grand motif d’inquiétude pour
Sepang. Sur une piste qui désavantageait moins la Yamaha,
en sur-pilotant, Quartararo n’a jamais été menaçant.
Nous pouvons établir un parallèle pertinent avec Maverick Viñales,
ici-même, en 2019. L’Espagnol, en bataille avec Márquez, avait
chuté en étant largement au-delà des limites de sa machine, mais,
lui, avait un bon rythme et jouait la gagne. Ainsi, nous ne
voyons pas tellement ce que Fabio peut faire de plus à Sepang en se
basant purement sur l’analyse de sa course.
En revanche, il existe un réel motif d’espoir. La
physionomie du championnat a changé du tout au tout. C’est la
première fois que Bagnaia mène devant Quartararo, et le
« momentum » n’est plus le même.
L’étude de l’histoire des sports nous apprend qu’il est toujours
plus facile de chasser que d’être chassé. La pression de la gestion
est réelle, et peut faire tomber même les plus grands. Valentino
Rossi avait été « victime » d’un revirement de situation
à son avantage en 2006, et perdit le championnat alors que tout lui
semblait promis. De plus, nous ne savons pas comment
Bagnaia peut faire face à cette pression en catégorie
reine.
II) Balle de match
Cet « avantage » pour Quartararo porte tout de
même un lourd inconvénient. Désormais, les cartes sont
dans les mains de Pecco. C’est triste à dire, mais Fabio ne peut
qu’espérer une erreur de Bagnaia pour renverser la tendance.
Lorsque les deux prétendants terminent la course, « Go
Free » est devant son dauphin à chaque fois depuis le
Portugal, soit la cinquième manche du championnat.
Pire encore, Quarta n’a terminé devant que deux fois sur
les dix courses où les deux ont franchi la ligne.
Du côté de l’Italien, il est même difficile de trouver des
failles. Nous pouvons l’affirmer dès maintenant : Il est
le meilleur pilote du monde. Et désormais, tout joue en sa faveur.
Une avance de quatorze points, un talent générationnel et qui ne
cesse de nous impressionner, un comportement et un langage corporel
exemplaire, du sang-froid, une vitesse rivalisant avec les
meilleures années de Márquez… Il n’a aucun défaut si ce n’est les
chutes fréquentes, et encore. Pour rappel, il a abandonné
par cinq fois contre trois pour Quartararo et quatre pour
Bastianini, ce n’est même pas si flagrant.
En plus de cela, Sepang lui réussit : Il s’y est déjà imposé en
Moto3 et y a été titré en Moto2
lors de la saison 2018. Le tracé en lui même favorise la Ducati et
son pilotage. On y compte deux grandes lignes droites et cinq gros
freinages appuyés, dont quatre à plat et en ligne en raison d’un
profil « Formule 1 ». Tout ce dont Pecco
raffole (Jerez,
Spielberg).
III) Le titre promis à Pecco ?
La seule dimension susceptible de retenir Bagnaia est la
pression de la gestion évoquée précédemment. Reconnaissez
que ça fait maigre. Pour conserver ses chances, Quartararo ne devra
pas perdre plus de 11 points sur Bagnaia. C’est
conséquent, mais l’Italien en a repris 16 à Buriram et en
Australie. Nous pouvons aisément imaginer une course
intelligente de sa part, et nul doute qu’il sera dans le groupe de
tête même s’il pleut.
Mais tout n’est pas perdu ! C’est pourquoi
nous sommes si enjoués à l’idée de ce rendez-vous. La pression du
premier est un phénomène qui ne prend pas sur tous les pilotes
(Lorenzo, Márquez en particulier) mais bel et bien
avéré. Cela peut changer la donne du tout au tout, et c’est pour
cette raison que le Grand Prix s’annonce si passionnant.
Verrons-nous un nouveau champion du monde dimanche soir ?
Dites-le-nous dans les commentaires ! Tous seront lus
et débattus.
Photo de couverture : Michelin Motorsport