Heureusement, aucune catégorie de Grands Prix n’est figée. Le Moto2, que l’on pensait mort au vu du pauvre spectacle proposé, renaît de ses cendres en ce début d’année. Le MotoGP, lui, est plus disputé que jamais. Et la plus petite classe dans tout ça ? Depuis quelques temps s’installe une tendance particulière en Moto3 ; un grand changement altère la physionomie des courses. Pas que le spectacle soit moins beau, mais juste, différent.
En paquet
Fermez les yeux, et imaginez-vous un seul instant devant un Grand Prix Moto3. Que voyez-vous ? Une bataille incessante pour la tête, des concurrents qui ne se font aucun cadeau. Des jeunes loups qui s’affrontent à grands coups de carénage, se chapardant à la moindre occasion de freiner plus tard que leurs vis-à-vis. Mais depuis quelques temps, ça n’est plus tellement comme ça que ça se passe. Cette vision faussée de nos souvenirs ne doit pas masquer la réalité des courses.
Il y a souvent un pilote qui part devant, et un groupe qui bataille derrière pour le suivre. Ce dernier est animé, certes, mais la plupart du temps, l’homme en tête parvient à se tisser un petit matelas de quelques dixièmes, largement suffisant pour ne pas subir les affres de l’aspiration en ligne droite, et aussi pour tuer tout suspense immédiat. Les changements de leader se comptent sur les doigts d’une main. Parfois, il va au bout.
Vous ne me croyez-pas ? Attendez de voir les chiffres. En 2023, la montée en puissance de Daniel Holgado sur le début de saison avait conduit à l’établissement de ce phénomène. Au Mans, le pilote Tech3 a mené l’intégralité de la course, sans jamais se faire rattraper. Puis, l’affirmation de David Alonso, pilote Aspar, ajouta du piment. Lui n’aime pas tant mener ; il préfère exploser dans les derniers instants. Nous avons eu une saison 2023 assez passionnante, il faut le dire.
Mais depuis la fin de l’exercice passé, cette tendance se concrétise, et notamment à quelques tours du terme, là où normalement, les jeunes sont les plus bouillants. Les quatre derniers Grands Prix en date en sont l’illustration même. Au Qatar, fin 2023, personne n’avait pu doubler Jaume Masia dans le dernier tour. À Valence, Ayumu Sasaki était bien supérieur au reste, et aucun de ses concurrents n’avaient pu le rattraper dans la dernière boucle. À Lusail, pour l’entame de cette saison 2024, Daniel Holgado, encore lui, n’a pas lâché la tête de toute la course ; sauf dans le dernier virage, où David Alonso lui chipa la victoire. Au Portugal, trois hommes se sont sérieusement échangés la première position, mais une fois de plus, Holgado n’a pas été inquiété dans le dernier tour.
🏁 #Moto3 RACE 🏁@daniholgado96 fends off Rueda to win at Portimao!🏆#PortugueseGP 🇵🇹 pic.twitter.com/ojz8AAvjg2
— MotoGP™🏁 (@MotoGP) March 24, 2024
Plus lisible
Sur les quatre derniers Grands Prix, on compte seulement un dépassement pour la première place dans le dernier tour en Moto3. Une catégorie qui, d’ordinaire, est tout à fait disputée jusqu’à la présentation du drapeau à damier. Est-ce la naissance d’une nouvelle stratégie de course visant à laisser s’épuiser le leader, à s’en servir comme lièvre ? Je ne pense pas, car Moto3 ne rime pas avec calculs. Enfin, jusqu’à maintenant. Le profil des engagés joue un rôle primordial dans cette statistique. Nous verrons, par la suite, si cela se poursuit ainsi.
Mais est-ce là une bonne nouvelle ? Au risque d’en décevoir plus d’un, j’aimerais voir davantage de courses comme celles-ci. J’ai souvent eu du mal avec le Moto3 un peu fouillis, complètement illisible et trop imprévisible. Ma saison de rêve ne compte pas douze vainqueurs différents et pléthore de performances si ahurissantes qu’elles en deviendraient banales. Non, je préfère largement quand ils s’appliquent, quand ils redoublent d’ingéniosité et de raison pour piquer au bon moment. Le spectacle est différent mais certainement pas moins qualitatif. La tension peut faire son effet, et voir souvent les mêmes équipes aux avant-postes, c’est s’assurer d’un titre mondial disputé, d’ajouter de l’enjeu aux batailles plus acharnées qui sont donc, par logique, plus rares.
J’aime la tournure que prend la catégorie, même si je sais pertinemment que de nombreux fans préfèrent le Moto3 plus conventionnel, à sept de front à l’abord du premier virage au Mugello. C’est bien aussi, je n’oserais dire le contraire, mais beaucoup moins impressionnant quand de telles images nous frappent l’esprit toutes les deux semaines. L’être humain s’habitue à tout, même à l’expression la plus pure et passionnée de la course entre concurrents dotés d’un matériel similaire.
J’aimerais beaucoup avoir votre avis sur cette statistique intéressante, et sur l’évolution du Moto3. Dites-moi ce que vous en pensez en commentaires !
Photo de couverture : Tech3