Dans la série « et avant ce circuit, il se
passait quoi dans le coin ? », attaquons-nous au
circuit de Sitges Terramar, qui a largement précédé le circuit de
Barcelona-Catalunya, situé sur la commune de
Granollers…
A Granollers, même en consultant nos archives espagnoles, on ne trouve pas grand-chose, juste quelques courses automobiles en ville, avec ce goûteux mélange de prototypes et de voitures de tourisme propre à ce genre d’épreuves, ainsi que quelques rares photos d’une course de motos…
Granollers 1971 – Crédit photo : Louis Oulevey
Granollers 1971 -Crédit photo : Louis Oulevey
Et malgré la présence de l’usine Derbi, à Martorelles, soit environ 5 kilomètres du circuit de Catalunya, où se sont déroulées quelques courses, il faut descendre plus au Sud pour trouver une compétition motocycliste de renom, c’est à dire à Barcelone et plus précisément au Parc de Montjuïc.
Encore un circuit en ville, certes, mais celui-ci a un glorieux passé puisqu’il a reçu des courses de F1 et continuera jusqu’en 1986 à recevoir les 24 heures d’Endurance moto; il mériterait donc un sujet à part entière !
Mais pour trouver un « vrai » circuit précurseur de
Catalunya, il faut encore descendre un tout petit peu plus au Sud,
à Sitges Terramar, où
l’on trouve encore aujourd’hui les restes de ce qui fut le
Monthléry espagnol. Façon de parler puisque le
circuit français fut construit juste après l’autodrome de Sitges.
Comme on le verra plus loin, pour un pays, se doter d’un autodrome
était alors un signe de prospérité et de modernisme…
Cette fois, au lieu de fouiller les sites de nos correspondants
espagnols, nous avons préféré rendre une (longue) visite
virtuelle à la bibliothèque nationale espagnole; l’occasion de
constater, une fois de plus et avec regret, que nous sommes, dans
ce domaine aussi, ni plus ni moins qu’un pays assez en
retard puisque les Espagnols ont depuis longtemps numérisé et
passé à l’OCR quasiment l’ensemble de leurs archives nationales,
presse comprise, et les offrent en consultation gratuite sur le
web.
Vous avez dit « France, pays de culture pour
tous »?
Alors, il sera facile, pour tout un chacun, de s’imprégner de l’espoir, de la grandeur, puis de l’abandon de ce qui fut et reste une sorte de gâchis…
L’histoire commence en 1922… Vous avez un moment ?
25 février 1922: l’Heraldo Deportivo présente à ses lecteurs le projet à travers un dossier plus que complet…
7 avril 1922: le roi est enthousiaste, débloque des crédits et une commission arrive…
22 avril 1922 : réunion de travail à Madrid…
16 septembre 1922 : le lancement du chantier est prévu pour demain…
5 octobre 1922 : compte-rendu de cette manifestation…
15 décembre 1922 : d’autres photos de la pose de la première pierre…
15 février 1923 : les travaux ont débuté et la maquette de la piste est présentée…
6 mars 1923 : les travaux commencent à prendre forme.
9 mars 1923 : on annonce la fin des travaux pour fin juin et les premières courses pour octobre. Une souscription est lancée…
31 juillet 1923 : le roi veut faire parrainer son circuit par les rois d’Angleterre et d’Italie…
31 juillet 1923 : on adjoint sept détenus aux quarante ouvriers pour accélérer les travaux…
1er août 1923 : les travaux ne sont toujours pas terminés mais la première course est entièrement planifiée, primes comprises…
Pendant cette propagande euphorique, les ouvriers sont en
grève.
Evidemment la presse n’en parle pas…
Elle ne le fera que le 3, dans tous les journaux, quand les
ouvriers reprendront le travail.
3 août 1923 : on « résout » le conflit et on passe à la vitesse supérieure. 200 ouvriers!
23 août 1923 : le roi donne deux coupes pour les futures courses…
Les travaux avancent (origine document inconnue)…
12 octobre 1923 : on allège les formalités douanières des ports pour faciliter la venue des concurrents étrangers…
20 octobre 1923 : lors des essais, un pilote étranger se blesse…
28 octobre 1923: le deuxième Grand Prix d’Espagne a bien lieu, effectivement parrainé par l’Italie et le Royaume-Uni…
30 octobre 1923 : compte-rendu des courses inaugurales. Notez que la censure ne se cache pas…
Mundo graphico :
Rare photo des motos qui, notons-le, tournent en sens inverse des voitures…
15 novembre 1923 : comme d’habitude el Heraldo Deportivo offre le reportage le plus complet…
Vidéos retraçant la vie du circuit…
Hélas, hélas, malgré tout le faste de cette première
manifestation, il se murmure que les caisses du
constructeur-organisateur, Frick Armangue, ont été vidées par les
entreprises de travaux publics qui ont exigé d’être payées sur le
champ et que les prix clairement claironnés dans toute la presse
n’ont jamais été donnés aux vainqueurs des diverses
catégories.
Sitges commence à avoir mauvaise
réputation…
Cela n’empêche pas les organisateurs de prévoir le premier Grand Prix Moto du championnat d’Espagne, le 18 mai 1924, conjointement au Gran Premio Internacional du « Reial Moto Club de Cataluña ».
Cette fois, le roi se déplace…
On y verra encore une course en janvier 1925 …
Puis une en décembre 1925 …
Une en septembre 1926…
Une en avril 1927…
Aujourd’hui, même avec beaucoup de diplomatie, vous ne pouvez guère le parcourir à pieds et vous imprégner des lieux. Du moins le jour, l’endroit étant dorénavant gardé.
Si vous souhaitez néanmoins vous y rendre, allez simplement à Sitges, commune située à une bonne vingtaine de kilomètres au sud de Barcelone par l’autoroute C-32, sortez à la sortie #26 et laissez-vous descendre vers la mer. Vous trouverez alors l’autodrome sur votre gauche. A vos risques et périls…
Sitges Terramar
Sitges Terramar
Sitges Terramar
Sitges Terramar